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"Angels in America" de Tony Kushner : virus à maux couverts
©DR / Christophe Raynaud de Lage

Atlanti Culture

Charles-Édouard Aubry pour Culture-Tops

Charles-Édouard Aubry pour Culture-Tops

Charles-Édouard Aubry est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).
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"Angels in America"

De Tony Kushner
Adaptation de Pierre Laville
Mise en scène : Arnaud Desplechin
Avec Dominique Blanc, Michel Vuillermoz, Florence Viala, Jérémy Lopez, Clément Hervieu-Léger, Christophe Montenez, Jennifer Decker, Gaël Kamilindi

INFOS & RÉSERVATION
La Comédie française
Place Colette
75001 Paris
Tél. : 01 44 58 15 15
http://www.comedie-francaise.fr
Du 18 janvier au 27 mars 2020. 2h50 avec entracte

RECOMMANDATION
Excellent


THÈME
• New-York 1985 : début des années sida. Les homosexuels découvrent la maladie, qui va redéfinir leurs rapports amoureux, mais aussi les rapports avec le monde qui les entoure.

Autour d’eux, c’est le chaos : le rêve américain tourne au cauchemar, à Tchernobyl,  une centrale nucléaire explose, le dérèglement climatique pointe, et le marxisme triomphe encore et toujours..

• Cette pièce foisonnante est difficile à résumer en quelques lignes, mais, vous l’aurez compris, l’apocalypse n’est pas bien loin, et les anges ont fort à faire...

• À  partir de cette immense fresque de sept heures, Desplechin a resserré l’action autour de cinq personnages et leur chassé-croisé amoureux, métaphore d’un monde en perdition. Angels in America est donc une « fantaisie gay » qui brosse un portrait flamboyant des amours homo- et bisexuelles menacées par le sida sous l’ère Reagan.

POINTS FORTS
• Il y a dans le théâtre de Tony Kushner une puissance d’évocation qui dynamite toutes les résistances. Juif, homosexuel et marxiste lui-même, il restitue la douleur de vivre dans un monde réglé par des Républicains homophobes, à une période où le sida était tenue par ceux-ci pour une malédiction divine. Pouvoir, religion, dogme, argent, puissance, intolérance, on trouve dans Angels in America, un concentré des maux qui continuent d’accabler notre époque.

• La troupe de la Comédie française, comme toujours, est irréprochable. Si on est habitué aux performances tant théâtrales que cinématographiques de Dominique Blanc – qui endosse avec brio six rôles, hommes et femmes confondues - et de Michel Vuillermoz, qui campe un avocat véreux, juif, homosexuel obnubilé par le pouvoir, les six autres comédiens méritent tous d’être félicités, habitant leurs personnages avec une grande justesse.

• Un dispositif scénique brillant accompagne la quarantaine de changements de décors. L’expérience cinématographique de Desplechin se retrouve dans la musique de fond omniprésente, la projection de vidéo sur les murs pour produire un arrière-plan animé qui renforce la sensation de fluidité dans les déplacements, et même un spleet-screen pour suivre deux actions simultanément.

POINTS FAIBLES
• La version montée par Arnaud Desplechin pâtit peut-être d’avoir été écourtée, dans un resserrement nuisible à une exposition plus complète des différents sujets abordés. En réduisant les dialogues qui permettaient d’approfondir les relations entre les personnages, on perd également de leur intensité, car un montage trop “cut” ne permet pas d’exposer la situation dans toute sa complexité.

La multiplication de scènes très courtes nuit paradoxalement à la densité de la pièce.

EN DEUX MOTS 
Voir une pièce ambitieuse dans son sujet, son texte et sa mise en scène au Français, est toujours une expérience bénéfique, dont on ressort heureux, car rares sont les salles parisiennes portant un tel niveau d’ambition, d’exigence et de qualité.

UN EXTRAIT
Roy Cohn, l’avocat (ancien bras droit du sénateur anticommuniste McCarthy)  interprété par Michel Vuillermoz : « Je ne suis pas un homosexuel. Je suis un hétérosexuel qui couche avec des mecs »

L'AUTEUR
Tony Kushner,  écrivain américain né en 1956 à Manhattan,  a écrit Angels in America en deux temps : une première partie en 1987, et la suite en 1989, qui furent présentées  successivement à San Francisco en 1991 et 1992, puis montées pour la première fois intégralement à Londres. La pièce rencontre vite un succès international, et se donne en France dès 1994.

En 2003, Mike Nichols en fait un film (avec Al Pacino, Meryl Streep et Emma Thompson), alors que Peter Eötvös s’en inspire pour un opéra créé au théâtre du Châtelet en 2004.

Tony Kushner, auteur d’autres pièces a, parallèlement, adapté et monté aux Etats-Unis diverses œuvres classiques du théâtre européen.

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