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Quand Francetv slash assure la promotion de l'islamisme politique par le voile
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Victimisation

Naëm Bestandji revient sur la publication d'une vidéo intitulée "#ÇaMeRévolte : l’Islamophobie" sur la chaîne 100% numérique de France Télévisions, Francetv slash.

Naëm Bestandji

Naëm Bestandji

Écrivain/essayiste, Naëm Bestandji est un laïque et féministe engagé. Il a longtemps travaillé dans le domaine socio-culturel auprès des enfants et adolescents des quartiers populaires. Il y a toujours vécu et a été très tôt confronté à la montée de l'intégrisme religieux.

Il a publié de nombreux articles sur l’islamisme politique.

Son site internet : https://www.naembestandji.fr/

Il est l’auteur d’un essai remarqué, pour tout comprendre sur le sexisme politique du voile : « Le linceul du féminisme – Caresser l’islamisme dans le sens du voile » (éditions Séramis, novembre 2021).

Voir la bio »

Francetv slash est une chaîne 100% numérique de France Télévisions, donc une chaîne du service public. Elle s'adresse à tous mais surtout aux jeunes. Le mardi 3 mars 2020, elle a mis en ligne une vidéo intitulée "#ÇaMeRévolte : l’Islamophobie" (1). Son contenu interroge autant que son intitulé.

Nous y voyons une jeune femme, Maryem Gargoubi, voilée d'un hijab noir bien enroulé autour de son cou pour ne rien laisser paraître de ce qu'elle considère être des attributs sexuels. Face caméra, elle souhaite témoigner de son vécu et crier sa révolte.

La victimisation comme technique de communication

Les premiers mots entraînent dès le départ les spectateurs dans l'erreur : "est-ce que je suis encore libre aujourd'hui en France de décider de ma tenue vestimentaire ?"

Cette question rhétorique sous-entend que la réponse est "non". Or, chaque citoyen, quelles que soient ses origines ou convictions, est libre de s'habiller comme il l'entend. Mais comme toute liberté, elle est encadrée par la loi et par les règlements intérieurs des entreprises ou autres structures accueillant du public. Ce simple rappel qui concerne chacun d'entre nous est vécu comme une attaque ciblée des femmes voilées en raison du refus de leur accorder un privilège. C'est le principe même de la stratégie victimaire, utilisée notamment pour le burqini.

Ce sont des hommes qui ont prescrit le voilement des femmes et ont défini ce qu'est censée être la "pudeur" féminine.

De plus, ce qu'elle porte n'est pas une simple "tenue vestimentaire". C'est un voile, avec toute la charge sexiste, politique et islamiste qu'il incarne. Ce n'est pas elle qui choisit cette "tenue". Elle ne l'a pas inventée ni eu l'idée seule. Ce sont des hommes qui ont prescrit le voilement des femmes et ont défini ce qu'est censée être la "pudeur" féminine. Cette jeune femme qui témoigne ne fait que se conformer à l'obligation fixée par les islamistes. Comme elle souscrit à cette norme et obligation masculine, comme elle a intégré le fait que son corps est un objet sexuel tentateur et sa tête un sexe qui doivent être cachés, comme elle ne souhaite pas courir le risque d'une punition divine brandie par les islamistes, elle consent à se soumettre à cette injonction. La servitude volontaire n'est pas synonyme de liberté. Ce qui explique son intransigeance et son incapacité psychologique à retirer son voile, quitte à ne pas trouver d'emploi. C'est du fanatisme pur. Mais pour Francetv slash, les obstacles à cette (auto) discrimination "choisie" serait de la discrimination.

Cette entrée victimaire installe l'ambiance du reste de la vidéo pour aller au cœur du message : la promotion du terme "islamophobie". La jeune femme donne la définition du CCIF. Elle esquive ainsi, comme le CCIF, son véritable sens qui est la fusion entre peur, critique, moquerie de l'islam (légaux) et les discriminations envers les musulmans (interdits). L'intérêt est d'empêcher toute critique de l'islam et de l'islamisme assimilée à une attaque contre des individus en raison de leur foi. Les islamistes se présentant comme de simples musulmans, toute critique à leur encontre (dont le sexisme du voile) serait une attaque contre tous les musulmans donc de "l'islamophobie". Les islamistes considèrent également que les musulmans forment un peuple, au point de racialiser leur religion. Cette essentialisation permet d'accuser de traitrise tout musulman critiquant l'islamisme et en même temps de faire du blasphème ("islamophobie") une forme de racisme. C'est exactement ce que fait la jeune femme à la fin de cette vidéo où elle inclut le refus de son sexisme "religieux" dans l'ensemble des racismes.

L'affirmation sans complexe du lien avec le CCIF

Cette propagande inspirée des islamistes du CCIF ne s'arrête pas là. La jeune femme reprend ses chiffres concernant les actes "islamophobes". Francetv slash assume cette source en l'affichant dans sa vidéo. La chaîne ne se pose aucune question sur le peu de sérieux des "statistiques" du CCIF, maintes fois dénoncées comme non fiables. C'est d'ailleurs bien pour cela qu'il n'en donne plus aucun détail depuis plusieurs années. Mais cela ne gêne aucunement le média du service public, ni le fait que cette association représente l'idéologie des Frères musulmans.

La valorisation de la manifestation du 10 novembre 2019 contre "l'islamophobie" par Maryem Gargoubi achève de démontrer son adhésion à la frange radicale de sa religion. Cette manifestation fut organisée par des Frères musulmans, dont le CCIF, et quelques salafistes, en partenariat avec une frange perdue de la gauche. C'est là que nous avons vu, effarés, des étoiles jaunes sur des enfants pour faire croire que les musulmans français sont aujourd'hui dans la même situation que les Juifs sous l'Occupation. C'est là que l'ex directeur du CCIF, Marwan Muhammad, avait crié et fait crier à des dizaines de personnes "Allahou akbar" dans les rues de Paris. La jeune femme considère que cette manifestation "était un début d'une lutte marquée par un évènement historique". C'est vrai. C'est celui de l'alliance au grand jour entre l'extrême droite musulmane et une partie de la gauche. Cette manifestation, comme cette vidéo, ont pour source le sexisme du voile. Cet accessoire vestimentaire est au cœur de la stratégie politique victimaire de l'islamisme. Sans lui, l'islamisme aurait beaucoup plus de difficultés à poser ses jalons, comme à Francetv slash par exemple. La vidéo ci-dessous démontre cette affirmation en exposant ce que signifient réellement le voile, le profil et les liens entre les principaux organisateurs de la manifestation contre "l'islamophobie". Voilà ce que Francetv slash cautionne, voilà ce que Maryem Gargoubi présente comme "le début d'une lutte marquée par un évènement historique" :

Alors pourquoi, selon Maryem Gargoubi, toutes ces polémiques autour du voile ? Parce que ce serait le moyen de "dissimuler les vrais problèmes (chômage, accès au logement, réforme des retraites)". C'est l'argument typique de ceux qui manquent d'arguments. Le voile fait autant parler car les islamistes font tout pour cela. Il suffit d'observer par exemple les gesticulations des militantes pro burqini ou l'instrumentalisation de chaque affaire de voile par le CCIF. De plus, le voile interroge l'égalité des sexes et l'avancée de l'islamisme politique. Ce ne sont pas des sujets secondaires.

L'assignation de tous les musulmans et les féministes appelés à la rescousse

Enfin, pour compléter la panoplie victimaire, nous retrouvons l'implication de l'ensemble des musulmans à son auto-discrimination. Elle ne parle pas de l'auto discrimination des musulmanes voilées mais de la "marginalisation" de la "communauté" toute entière. Comme si toutes les musulmanes étaient voilées. Comme si tous les musulman(e)s considèrent le voile comme religieux et adhèrent à son interprétation intégriste de l'islam. Les musulmans ne sont pas marginalisés. Critiquer et refuser le sexisme du voile n'est pas "taper sur les musulmans", contrairement à ce qu'elle déclare. Les musulmanes peuvent travailler. Seul le port du voile est encadré. Si Maryem Gargoubi est dans l'incapacité psychologique de retirer son voile pour les quelques heures de son travail, c'est cela qu'il faut questionner et dont on doit s'inquiéter, non de lois et règlements applicables à toutes et tous.

Pour conclure, la jeune femme a recours à ce que j'ai nommé la rhétorique d'inversion de l'islamisme politique. Elle appelle les associations féministes à être solidaires avec elle. Sa servitude volontaire à la gestion de la libido masculine se transforme en liberté de son corps pour séduire les féministes. C'est un classique depuis plusieurs années. Il est vrai que cela fonctionne parfois, comme avec le Planning familial par exemple.

Francetv slash au service d'une militante islamiste

Si Maryem Gargoubi reprend autant d'éléments de langage du CCIF, ce n'est pas un hasard. Sa page Facebook montre une obsession religieuse non négligeable. Cette obsession fusionne avec ses multiples partages de publications du CCIF et de sujets autour de la promotion du voile.

En janvier 2015, quelques jours après les attentats, elle publia par deux fois l'image "Je suis Mohamed" avec une expression religieuse en arabe. Cette image fut partagée à cette époque par de nombreux identitaires musulmans et islamistes qui ne se reconnaissaient pas dans le deuil national. S'identifier ainsi au dernier des Prophètes, dire "Je suis Mohamed", est un blasphème, mais pas pour les fanatiques.

Elle aime aussi prendre la défense et partager des photos de Mohamed Morsi, seul Frère musulman à avoir été élu Président à ce jour (avec R. T Erdogan, mais qui est un cas différent). Elle n'est pas "Charlie", elle est le Prophète "Mohamed" et "Morsi".

Pour parfaire le tableau et confirmer, s'il en était encore besoin, son adhésion à l'idéologie frériste, Maryem Gargoubi a publié sur sa page, en mode public pour bien l'assumer, le signe de ralliement des Frères musulmans depuis 2013 : la "Rabia", ou la "main du Tamkine", suite au coup d'État contre Mohamed Morsi en Égypte. Les quatre doigts représenteraient quatre étapes. L'ultime étape serait le tamkine : la domination politique de l'islam version Frères Musulmans. Ce geste de la main a été brandi par toutes les personnalités de la Confrérie, de Youssef Al-Qaradawi en passant par R. T. Erdogan et Rached Ghannouchi (chef du parti islamiste tunisien).

France Télévisions n'est pas à sa première collaboration avec le CCIF

Ce n'est pas la première fois que France Télévisions se fait le porte-voix du CCIF et de l'islamisme politique en général. En septembre 2017, FranceTV éducation, destiné à l'éducation et à la jeunesse, a produit avec l'argent du contribuable une vidéo censée lutter contre les discriminations envers les musulmans. Mais en réalité, elle n'avait fait que véhiculer la propagande de leur frange intégriste (2). Elle confondait déjà musulmans/intégristes musulmans et liberté d'expression/propos antimusulmans, grâce à son travail prémâché par le CCIF qui avait fortement influencé la réalisation de cette vidéo.

Plus récemment, et pour revenir à Francetv slash, cette chaîne 100% numérique s'était déjà illustrée en mai 2019.

Parmi ses programmes variés, elle produit une série destinée à la jeunesse, "Skam". Le problème est qu'elle est fortement inspirée par le racialisme. Résultat : dans un de ses épisodes, France Télévisions promeut le sexisme et s'inspire de la propagande islamiste et racialiste pour banaliser le voile auprès des jeunes (cible privilégiée des intégristes) (3).

On y retrouve donc la fausse (et choquante) comparaison entre voile (qui relève d'un "choix" idéologique et sexiste plus ou moins contraint) et homosexualité (qui ne relève pas d'un choix mais de la nature de chacun). On y fait aussi la comparaison entre le voile et la couleur de peau. Comme si l'adhésion à un extrémisme religieux était inscrite dans les gênes. France télé met donc au même niveau la critique et le refus d'une idéologie sexiste et totalitaire (l'islamisme), et le rejet d'individus (les homos, les noirs) en raison de ce qu'ils sont en tant qu'Êtres humains. Cette chaîne fait ainsi de l'essentialisme, l'adhésion à une idéologie religieuse ne relevant plus d'un choix mais de la biologie. Cela colle à sa volonté de promouvoir le terme "islamophobie".

Pour France Télévisions, l'adhésion à une idéologie religieuse ne releve pas d'un choix mais de la biologie.

Pour montrer une pseudo tolérance, la chaîne publique contribue au développement de l'intégrisme musulman dont le sexisme du voile est l'outil de propagande par excellence. Elle contribue donc à conforter les jeunes filles voilées dans leur auto discrimination sexiste et à enfoncer toutes les musulmanes qui résistent encore à cela, puisque le service public valide l'idée islamiste qu'une musulmane est forcément voilée dans les deux vidéos.

Cela m'amène à avoir une pensée pour ces musulmanes égorgées en Algérie car elles refusaient de porter cette "tenue vestimentaire", à toutes ces femmes à travers le monde qui sont oppressées, voire violentées, pour les amener au "libre choix" du port de cet accessoire sexiste, à toutes celles qui luttent contre le voilement. Toutes ces femmes sont la preuve que le voile n'est pas une "tenue vestimentaire" comme une autre, et encore moins un "signe religieux".

Cette complaisance par ignorance de France Télévisions n'est qu'un exemple parmi tant d'autres qui illustrent le danger de l'islamisme politique dont le voile est l'outil principal. Si certaines s'attachent à défendre la liberté de leur intégrisme religieux, de l'apartheid sexuel et du sexisme "choisi", d'autres préfèrent se battre pour s'en émanciper. L'argent du contribuable ne pourrait pas servir à défendre les secondes plutôt que les premières ?

Mise à jour : la vidéo a été supprimée par Francetv slash le 04-03-2020. Soit le lendemain de la publication de cet article.

(1) #ÇaMeRévolte : l’Islamophobie
(2) FranceTVéducation et islamisme : plus d'ignorance que de pédagogie
(3) SKAM FRANCE EP.9 S4

Cet article a été initialement publié sur le site de Naëm Bestandji, cliquez ICI 

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