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"La slow démocratie" de David Djaïz : des pistes intéressantes pour reprendre notre destin en main
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Bertrand Cousin

Bertrand Cousin

Bertrand Cousin est Senior Counselor de la société APCO Worldwide. Ancien élève de l'ENA, il a notamment été maître des requêtes au Conseil d'Etat, maire adjoint de Brest et député.

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"La slow démocratie" de David Djaïz

Allary éditions, 314 pages, 20.90 €

RECOMMANDATION
Excellent


THÈME
L’auteur veut réhabiliter le rôle de la Nation pour maîtriser les dérives de l’hypermondialisation. Cela peut apparaître comme un paradoxe ou pire comme un encouragement aux populistes-nationalistes qui prospèrent sur les fractures sociales et territoriales ainsi que sur la crise identitaire. A vrai dire, il trace une série de propositions concrètes permettant de retisser les liens des citoyens au niveau de l’Etat et surtout des territoires.

Loin de s’éloigner de l’Europe, devenue trop technocratique, il s’agit de cadrer ses compétences pour qu’elle cesse d’être un relais automatique de la mondialisation en imposant le règne du marché unique. David Djaïz est un éclaireur du futur avec une torche efficace et bienveillante.  C’est un ouvrage optimiste, avec un regard original sur notre société en voie de délitement.

POINTS FORTS
La démonstration est formidablement documentée, par l’exploitation de nombreux ouvrages et articles, notamment en anglais. Les statistiques, tableaux et graphiques donnent une assise indiscutable à son argumentation, sans être trop touffus.

L’auteur découpe l’histoire du monde en trois tranches 1979-1989-2000, pour décortiquer les étapes de la grande crise qui secoue le monde : le divorce entre la mondialisation et la démocratie, l’écart croissant entre les nomades enrichis par la technologie de l’Internet et les sédentaires englués dans la pauvreté des territoires, terreau du populisme (Brexit). Il souligne l’affaiblissement des Etats-providence parallèlement à la hausse de la fiscalité.

Surtout, la force de la « slow démocratie » est dans les propositions concrètes, qui développeraient à une grande échelle des actions parfois déjà engagées :

-Encourager la mixité sociale par un service civique notamment en faveur des personnes dépendantes et d’actions en faveur de l’environnement, les colonies de vacances, des écoles ouvertes, les activités culturelles et sportives de nature à restaurer une sorte de fraternité entre les classes sociales.

- Favoriser la participation à la vie locale par des conseils de citoyens-usagers, à la vie sociale par de véritables élections dans les organismes paritaires.

- Dynamiser le sentiment de réciprocité par l’actionnariat populaire, l’épargne salariale et la distribution aux salariés d’un capital, même modeste, dans certaines circonstances.

- Revivifier les bassins de vie locaux en développant des activités pouvant être localement pris en charge (vente d’aliments frais, traitement des déchets, entretien des paysages, panneaux solaires, artisanat). Les gilets jaunes sont issus de cet abandon.

Tout cela implique une nouvelle répartition des compétences au sein de l’Etat-Nation qui doit exercer une régulation en faveur d’un New Deal territorial, assurer la sécurité publique et la protection juridique, combattre la criminalité et les dérives identitaires.

POINTS FAIBLES
Le titre du livre « slow démocratie » est inadapté alors qu’il faut résolument et rapidement revivifier la vie locale, restaurer l’Etat de droit, se protéger de l’hypermondialisation. C’est en réalité à un enthousiasme ardent auquel David Djaïz nous incite et non pas une bouillie de « slow food ».

EN DEUX MOTS
Un livre important qui nous permet de bien comprendre les étapes (économiques, politiques, technologiques, culturelles) qui conduisent à la situation présente d’effritement du lien social, d’endettement énorme des Etats, de l’entrée en déshérence de nombreux quartiers de banlieue et de territoires isolés.

Surtout des trajectoires précises d’action sont dessinées qui, à coup sûr, vont dans le bon sens. L’on aurait même envie que David Djaïz devienne ministre de l’aménagement du territoire !

UN EXTRAIT
P75 : Le peuple national aspire à se gouverner lui-même mais il rejette l’héritage libéral de l’Etat de droit, désormais perçu comme un cheval de Troie de la mondialisation.

P139 : La révolution technologique joue un rôle important dans la déformation de la pyramide des revenus et des patrimoines.

P217 : Il est nécessaire de traiter les grands défis comme le réchauffement climatique, la fiscalité des géants du numérique, l’extinction de la biodiversité, la lutte contre les paradis fiscaux ou encore l’intelligence artificielle, à l’échelle européenne et mondiale.

P221 : D’un côté, une communauté politique affaiblie, fragilisée, incertaine de ses valeurs et de son projet. De l’autre, l’appel de la tribu, de ses fraternités d’armes, d’un projet fort et clair, quoique profondément sanguinaire et régressif (l’Islamisme).

P236 : Un contrat naturel, c'est-à-dire une prise en compte des relations entre les hommes avec le Système-terre et ses capacités de charge limitées.

L'AUTEUR
Né en 1990 à Agen, David Djaïz, avec une moyenne de 19.9 au Baccalauréat, a intégré Normale Supérieure, est sorti de l’ENA en 2016 pour être nommé à l’Inspection des Finances. Auteur de La guerre civile n’aura pas lieu  (Le Cerf 2017), il enseigne également à Science-Po Paris.

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