Relance contre austérité en zone euro : de Hollande ou de Merkel, qui va l'emporter ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Pour la première fois dans l’histoire, Herman Van Rompuy, président de l’Union européenne est venu rencontrer à Paris un Président élu avant même son investiture.
Pour la première fois dans l’histoire, Herman Van Rompuy, président de l’Union européenne est venu rencontrer à Paris un Président élu avant même son investiture.
©Reuters

Match idéologique

Pour la première fois dans l’histoire, Herman Van Rompuy, président de l’Union européenne et Jean-Claude Juncker, président de l’euro-groupe, sont venus rencontrer à Paris un Président élu avant même son investiture. Les institutions européennes cherchent-elles à aider le Président de la République ou à faire pression sur lui ?

Gérard Bossuat

Gérard Bossuat

Gérard Bossuat est professeur à l'Université de Cergy-Pontoise, titulaire de la chaire Jean Monnet ad personam.

Il est l'auteur de Histoire de l'Union européenne : Fondations, élargissements, avenir (Belin, 2009) et co-auteur du Dictionnaire historique de l'Europe unie (André Versaille, 2009).

 

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La situation est singulière. La campagne électorale a résonné des attaques contre l’euro et le Pacte de stabilité ou contre l’absence de mobilisation contre le chômage. Les débats sur les enjeux européens revinrent sur le devant de la scène entre les deux tours. Le Pacte de stabilité passa surtout pour un Pacte d’austérité. Les soubresauts de la rue grecque et espagnole, le taux de chômage hallucinant en Espagne, incitent les candidats à remettre en cause l’accord sur le mécanisme européen de stabilité du 9 décembre 2011 ou traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), appelé aussi Pacte budgétaire européen, signé le 2 mars 2012 par 25 pays. Il conforte la discipline budgétaire et la coordination des politiques économiques des pays de la zone euro+, exige le respect des critères de convergences de Maastricht (pas de déficit public supérieur à 3% du PIB, pas d’endettement supérieur à 60% du PIB) et l’inscription dans les textes constitutionnels de la règle d’or de l’équilibre budgétaire. François Hollande déclare vouloir renégocier le TSCG pour privilégier la croissance et l’emploi dans un esprit de solidarité avec l’Eurozone.

La gauche jugeait depuis longtemps que la croissance était ignorée par l’Union européenne. Le Pacte de stabilité et de croissance avait été adopté en juin 1997 au Conseil européen d’Amsterdam. Imposé par Théo Waigel, ministre allemand des Finances, il instituait une surveillance multilatérale préventive des déficits et créait une procédure dissuasive en cas de déficit excessif alors que Jospin proposait un vrai pacte de croissance.
Les lendemains de cette élection présidentielle sont « chauds ». Pour la première fois dans l’histoire, deux hauts responsables de l’Union, Herman Van Rompuy, président de l’Union européenne et Jean-Claude Juncker, président de l’euro-groupe, rencontrent à Paris un Président élu avant même son investiture. Les institutions européennes chercheraient-elles à faire pression sur le Président de la République ? Est-ce pour l’aider ou le mettre en garde ? Le message est clair : la solution de la crise se trouve dans la mobilisation des institutions de l’Union européenne et plus seulement dans le directoire franco-allemand. Le président de la Commission, José-Manuel Barroso dit aussi compter sur Paris pour relancer l’agenda 2020 qui oriente la croissance européenne, à moins que ce ne soit le contraire ? Ces déplacements témoignent d’une situation d’urgence. Ils rappellent aussi que rien ne peut se faire sans les partenaires européens de la France et évidemment pas sans l’Allemagne.
L’ambiance générale porte cependant, sauf dans les cercles dirigeants allemands au pouvoir, à prendre en considération la demande de croissance des sociétés européennes. Or le terme de croissance ne signifie pas la même chose au-delà et en deçà du Rhin. La fraction conservatrice au pouvoir en Allemagne considère que la croissance signifie moins d’Etat, moins d’interventions publiques, plus de liberté pour fixer les salaires, le temps de travail, les embauches et les licenciements ou le montant des pensions. La position de Hollande exige qu’à côté des mesures de retour à l’équilibre, réaffirmées solennellement, un nouvel accord sur la croissance soit négocié. Une relance keynésienne, massive, de type New Deal par l’argent public est impossible. En revanche les Français attendent une relance économique, industrielle, aboutissant à une augmentation du PIB. Hollande table sur une croissance de 1,7 %, alors que la Commission européenne annonce 1,2 % et un déficit public de 4,2%, pour la France. 
Nicolas Sarkozy a utilisé les mécanismes bilatéraux et multilatéraux de la coopération intereuropéenne pour agir en Europe. Angela Merkel tout autant, mais pour faire appliquer une stricte politique de rigueur budgétaire. A l’occasion de ces crises, le couple Sarkozy-Merkel n’a pas été capable de donner un sens à la construction européenne en sorte que les citoyens puissent se l’approprier. Un accord Hollande-Merkel est indispensable comme il ne l’a jamais été. Encore faut-il donner un contenu à la croissance. C’est l’enjeu de leur rencontre du 15 mai.
Des pistes sont ouvertes : Eurobonds, des obligations émises par la zone euro pour financer des projets d’investissement de dimension européenne ; financement de la dette des Etats par la BCE, dans des conditions strictes ; modification du taux de change de l’euro; ré-industrialisation de l’Union et remise en cause de l’ouverture du marché européen ; gouvernement économique de la zone euro. La Commission de son côté envisage de financer par des emprunts européens et par la BEI de grands travaux d’infrastructure et de soutien aux PME. La taxe envisagée sur les transactions financières de 0,1% et les Fonds structurels inutilisés pourraient offrir des marges de crédits.
L’avenir de la France est dans la solidarité européenne, pas dans l’aventure solitaire et nationaliste. Il appartient au nouveau président de convaincre sa partenaire allemande de l’excellence d’un projet de croissance économique et sociale. L’appui des institutions européennes est indispensable. François Hollande et ses émissaires travaillent sans doute déjà auprès des capitales européennes pour valider quelques idées force concernant relance et croissance. L’Union européenne apparaitra alors comme une organisation protectrice et gagnera l’estime des citoyens. En relevant ce défi, le président de la République pourrait donner un signal de confiance dans l’avenir et apparaitre en grand Européen.

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