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Et si on se débarrassait enfin du mot « jeunes » ?
©MEHDI FEDOUACH / AFP

SOS sémantique

Il est parfaitement inutile et surtout mensonger. Un masque pour dissimuler la réalité.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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Un jeune c'est, comme dirait monsieur de La Palice, quelqu'un qui n'est pas vieux. On lui reconnaît de la vigueur, de l’impétuosité. Du courage quand ce n'est pas de la témérité due à son jeune âge.

Les treize soldats français morts au Mali étaient des jeunes. Alain Fournier, l'auteur du magique Grand Meaulnes, était jeune quand il mourut au front en 1914. Françoise Sagan avait 16 ans quand elle écrivit Bonjour tristesse : c'était une jeune.

Il y a en France des millions de jeunes. Ils travaillent, vont au lycée, étudient. Ils pensent avoir l'avenir devant eux. Ils sont, pour la plupart, consciencieux et plein d'allant. D'eux, de ces jeunes là, on ne parle presque jamais.

En effet, ils ont été effacés de la Terre par des « jeunes ». Ce mot-là est un mot de vieux, inventé par les vieillards des médias qui entendent gouverner la langue pensant ainsi gouverner les choses. Dire « jeunes » c'est mettre un peu de peinture rose sur une réalité qui est plutôt noire. Parler des « jeunes », c'est accorder à quelques « incivilités » fougueuses le charme de l'adolescence.

Les lycéens qui ont filmé la jeune fille en train de brûler dans un lycée de Villemomble étaient des « jeunes ». Ceux qui s'entre-tuent pour des histoires de shit sont également des « jeunes ». « Jeunes » aussi sont ceux qui taquinent les policiers et les pompiers avec des cocktails Molotov.

Des centaines de « jeunes » ont quitté la France pour aller tuer en Irak et en Syrie. Mais là, comme ils avaient dépassé les bornes admises, on a eu la pudeur de les appeler « djihadistes ». Pour autant, certains disent les comprendre : ils seraient malheureux dans leurs cités. La plupart d'entre-eux se révoltent sur place en affrontant les forces de l'ordre. D'autres, beaucoup moins nombreux, sont allés tuer au loin à la recherche d'émotions plus fortes.

La langue française est riche, très riche. Le Larousse en témoigne, mais il n'a pas retenu le mot « jeunes ». En revanche, on peut y trouver le mot « voyous », « délinquants », « meurtriers » et « émeutiers »...

P.S. : Nous sommes en 2019 après J.-C. et en 1441, année de l’Hégire. Ça aussi c'est « jeune ».

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