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Comment Jacques Chirac a tenté d’échapper aux foudres de la justice avec son cabinet noir
©PATRICK KOVARIK / AFP

Bonnes feuilles

Olivier Toscer et Nicolas Beau publient "Dans l’œil des RG" aux éditions Robert Laffont. Les RG - devenus aujourd'hui le Renseignement territorial (RT) - agissent dans le cadre de l'État de droit. Pour la première fois, de nombreux acteurs ont accepté de se livrer. Ils racontent comment ils voulaient tout savoir sur tout le monde pour la défense de la République. Extrait 1/2.

Olivier Toscer

Olivier Toscer

Ancien journaliste d'investigation à L'Obs, Olivier Toscer est réputé pour ses enquêtes sur la police et le Renseignement. Il est l'auteur chez Robert Laffont d 'Ennemis d'Etat, en avril 2019.

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Nicolas Beau

Nicolas Beau

Nicolas Beau est journaliste. Après une longue carrière au Canard enchaîné, émaillée de nombreux scoops, il est l'auteur de plusieurs best sellers, dont La Reine de Carthage (La Découverte, 2009).

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Le patron des RG est en cheville avec l’homme des affaires sensibles de l’Élysée. Bertrand Landrieu, le directeur de cabinet du président de la République, le confirme : « Il ne m’en parlait pas. Mais tout se savait au Château où Dominique de Villepin avait des contacts fréquents avec Yves Bertrand. » Et ce n’est pas anodin : Dominique de Villepin a toujours été considéré comme le principal animateur de ce que l’on appelle alors le « cabinet noir de l’Élysée ». 

« Ce qui a été appelé le cabinet noir de l’Élysée, c’était la petite réunion des gens concernés par les affaires judiciaires dans lesquelles Jacques Chirac était cité, précise Bertrand Landrieu. J’en faisais partie avec quelques avocats. Mais bon, cela n’avait rien de sulfureux, minimise-t-il. On était amenés à se réunir de temps en temps pour échanger des analyses sur les initiatives judiciaires. Cela n’allait pas plus loin… » 

Toutes les enquêtes journalistiques ont pourtant montré que ce cabinet noir était en réalité une machine de guerre mise en place à l’Élysée pour éviter au président – par tous les moyens – les foudres de la justice. Mais également pour discréditer les adversaires politiques menaçant la réélection de Jacques Chirac. 

Dès lors, le patron des RG et le bras droit de Jacques Chirac ont-ils fomenté ensemble les deux derniers coups bas notables montés contre Lionel Jospin à l’approche du scrutin de 2002 ? Difficile d’être formel en ce qui concerne Dominique de Villepin. Mais la main d’Yves Bertrand est, elle, très décelable. 

Elle est solidement documentée dans l’affaire dite de « l’île de Ré ». 

L’affaire est révélée par L’Express. En janvier 2002, l’hebdomadaire se fait écho de l’ouverture d’une enquête préliminaire, suite à une plainte déposée le mois précédent par une ligue européenne de défense des victimes de notaires (sic), présidée par une certaine Gisèle Néron. La plaignante affirme avoir décelé « deux irrégularités dans l’acte de vente de la maison de vacances qu’ont acquise les époux Jospin », précise l’hebdomadaire. Elle s’interroge sur l’absence de toute mention d’origine des fonds, notamment toute référence à un prêt, alors que la maison a été « payée comptant », ainsi que sur « la présence de deux lieux distincts – Matignon et Ars-en-Ré – dans la signature du contrat ». Émoi à Matignon, où l’on tente d’éteindre l’incendie avec un communiqué indiquant que « la maison d’environ cent vingt mètres carrés, mise en vente depuis plus de trois ans, avec une petite cour et sans jardin », avait été achetée le 30 janvier 2001 pour un montant d’une valeur de 300 000 euros hors frais de notaire, ce qui correspond « au prix du marché immobilier de l’île de Ré à la date de la transaction », précise le communiqué. 

Las ! toute la presse lance des enquêtes. Un parfum de scandale entoure tout d’un coup le futur candidat à la présidentielle, Lionel Jospin. Mais quelques semaines seulement. De simples vérifications montrent qu’aucune irrégularité n’avait présidé à l’achat de la maison de vacances. L’affaire fait pschitt. On apprendra plus tard que la plaignante était une intime d’Yves Bertrand… et que ce dernier avait consigné les détails de l’accusation dans ses carnets secrets bien avant que la plainte soit déposée. « Tout ça a été un turbin comme on dit, ou un chantier, bref une manipulation au service d’une mauvaise cause politique », s’étrangle encore aujourd’hui Daniel Vaillant. Même dégonflée en quelques jours, la fausse affaire de la maison de l’île de Ré plombe d’entrée la campagne du candidat socialiste.

Extrait du livre d’Olivier Toscer et Nicolas Beau, "Dans l’œil des RG", publié aux éditions Robert Laffont

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