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Interdire l’avion pour protéger le climat, la surenchère des écologistes mène à tout, et à n'importe quoi
©Adrian DENNIS / AFP

ça plane pour eux !

« Les écologistes osent tout, c’est peut-être à cela qu’on va les reconnaître ». Fort du résultat aux européennes, certains proposent d’interdire les vols d’avion et de les remplacer par des voyages par le train quand cela est possible.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Les Tontons flingueurs ne connaissaient pas les écologistes militants, sinon ils s’en seraient donné à cœur joie. Delphine Batho et Mathilde Pano, respectivement députées non-inscrite et LFI à l’Assemblée nationale, soutenues par François Ruffin et la plupart des 17 députés de la France insoumise, ont donc déposé cette semaine une proposition de loi visant à interdire certains vols intérieurs. Le but est évidemment d’intervenir dans le débat qui a démarré à l’Assemblée sur la loi Mobilité. Le but est aussi de lancer la polémique sur l’opportunité du transport aérien.

Leur proposition est de supprimer l’avion à chaque fois qu’il existe des liaisons aussi rapides par le train. Donc a priori, Paris-Marseille, Marseille-Lyon, Rennes-Brest, Paris-Nantes… Il faut dire que le projet doit correspondre à l’air du temps puisqu’un certain nombre de députés de différents partis, soutenus par quelques associations dont la vocation est de lutter contre le réchauffement climatique, ont emboité le pas et rencontré du coup, un certain écho dans l’opinion.

En théorie, si comme le disent les signataires du projet « un Paris-Marseille en avion émet à peu près 50 fois plus de gaz à effet de serre que le même trajet en train », la logique peut justifier qu’on prenne le train, mais ça relève plus d’un choix individuel du consommateur ou des entreprises de transport que de la loi. D’autant que le temps de trajet est grosso modo le même. Tout le monde a fait le calcul. Si on ajoute au temps de trajet proprement dit, le temps qu’il faut pour relier les aéroports, pour passer la douane, les contrôles de bagages, on arrive à la même performance que le ferroviaire.

Mais ce n‘est pas tout...  Si l’avion pollue plus que le train, c’est aussi pour nos députés un moyen de transport qui aggrave « l’injustice sociale et l’injustice fiscale ». Et de rappeler que les billets d’avion bénéficient d’une taxation réduite et que le carburant n’est pas assujetti à la TVA.

François Ruffin ne cache pas son projet politique :

« La philosophie générale de cette proposition de loi est que l’avion doit être un transport d’exception et le train la norme. La philosophie est que le déplacement fait partie du voyage. Face au désir d’accélération de l’oligarchie, on doit avoir un désir de ralentissement. Il n’y aura pas d’avions verts, c’est démontré. Nous proposons une alternative, le ferroviaire. »

Au moins, les choses et les intentions sont-elles claires.

Alors, techniquement, les aspects purement techniques peuvent poser débat. Ils appellent surtout des études complémentaires. Que l’avion utilise beaucoup de kérosène, c’est une évidence, que le transport aérien participe grandement à la pollution mondiale, c’est aussi évident, mais tout arrêter revient à s’interdire la recherche et l’innovation. L’intelligence humaine a déjà fait d’énormes progrès dans ce domaine.  Elle est capable d’en

faire d’autres.

Mais au delà, ce qui est désolant et dangereux c’est la philosophie qui domine la pensée et l’action de beaucoup d’écologistes.

On a parfaitement compris que pour les écologistes radicaux, la vraie cause du dérèglement climatique, c’est le fonctionnement du système économique à l'échelle de la planète. Il faut donc le freiner et interdire certaines activités. Interdire et par la même punir tous ceux qui voudraient profiter des bienfaits de ce système.

Le raisonnement est simple. Si on pollue, c’est parce qu’il y a de la croissance. Pour arrêter de polluer, arrêtons de travailler. C’est tellement simple !

Il faut donc interdire la construction de nouveaux aéroports (Notre-Dame-des-Landes), il faut interdire les transports aériens, interdire les voitures automobiles, interdire la consommation de viande bovine, interdire la vaccination ... etc. la liste peut être longue, parce que le but de cette évolution est de casser la croissance économique.

Que beaucoup aient choisi ce modèle de développement, peu leur importe, que des millions d’individus dans les pays émergents ne rêvent que de manger à leur faim, de vivre dans des conditions meilleures, de se former, de voyager, de se soigner ...Peu importe, s’il faut casser les modèles de croissance pour sauver la planète, casser des emplois, des cultures etc....

Ce qui est désolant dans cette surenchère démago-écologiste, c’est qu’elle s’assoit sur la responsabilité des consommateurs. Les consommateurs sont grands et libres. Ils ont le choix de choisir les moyens de transport qui leur conviennent le mieux. Et ils sont les seuls à pouvoir le décider. Et dans le cas de l’avion, si le TVG a autant de succès c’est parce que pour certaines liaisons il est plus pratique et moins cher.   

Alors, qu’il y ait des règles du jeu, des normes sanitaires, et même de interdits... c’est légitime. Qu’il y ait des incitations fiscales, évidemment !  Il s’agit dans la plupart des cas de protéger la liberté individuelle des uns comme des autres.

D’une façon plus générale, il va falloir dans la politique de lutte contre le réchauffement climatique et la protection de l’environnement être beaucoup plus pragmatique que beaucoup qui, aujourd’hui, plongent dans l’idéologie et le dogmatisme.

Il faut sans doute faire confiance à la concurrence et permettre à cette concurrence de s’exercer. On n’a jamais obligé les consommateurs à acheter du bio, et pourtant le bio s’est imposé sur le marché...

Il faut sans doute faire confiance à la recherche, à l’innovation et à l’intelligence et permettre à cette recherche de se développer. Parce que la technique doit trouver des solutions pour des mécanismes de création de valeur qui soient écolo-compatibles.

Il faudrait aussi faire confiance aux contrepouvoirs pour impulser des évolutions plus économes. Les consommateurs agissent, les syndicats agissent beaucoup plus qu’on ne le dit dans les entreprises et ils se trouvent que ces syndicats ont plus de succès que les autres (cf. la CFDT)

Enfin, il faut aussi dire la vérité sur la pollution dans le monde. Cette pollution est fabriquée à 80% par les Etats-Unis, la Chine et l’Inde. Si on met de coté les Etats-Unis où il faut mieux compter sur les entreprises que sur la Maison Blanche pour faire quelques progrès, si on s’intéresse à la Chine et à l’Inde, on ne voit pas comment et pourquoi, ces deux puissances émergentes abandonneraient un modèle économique qui doit leur permettre de sortir de la misère plusieurs milliards d’habitants. Ils n’ont pas d’autre choix. Alors qu’en Occident, on puisse s’intéresser au prix fort au développement des énergies naturelles c’est bien, mais on pourrait aussi s’interroger sur la façon d’aider les émergents à parvenir à une croissance propre. Parce qu’actuellement, on a quand même tendance à leur vendre des outils dont on ne veut plus chez nous. Les voitures au diesel, ce n’est évidemment pas bien pour la planète mais très bien pour l’Afrique. Les centrales au charbon en Chine et en Inde ... Ne parlons pas des turbines à gaz qu’on veut continuer à produire en Europe pour les vendre à bas prix à l’Asie.

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