Ces économistes farfelus qui pensent qu'on peut facilement réduire le chômage à zéro<!-- --> | Atlantico.fr
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Pour les chartalistes, il faut abolir le chômage. Pas juste le réduire : l'abolir.
Pour les chartalistes, il faut abolir le chômage. Pas juste le réduire : l'abolir.
©Reuters

Le nettoyeur

Cette semaine, le "nettoyeur" Pascal Emmanuel Gobry, propose de découvrir une des écoles de pensées qui a été ravigorée par la crise : le chartalisme. Pour eux, il ne faut pas juste réduire le chômage mais l'abolir.

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry

Pascal-Emmanuel Gobry est journaliste pour Atlantico.

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Une des vertus de la crise financière aura été de donner un coup de fouet aux théories économiques hétérodoxes, et ainsi d'enrichir le débat économique. Une des écoles de pensées qui a été ravigorée par la crise s'appelle le chartalisme, ou théorie monétaire moderne, qui a bien expliqué les effets des politiques monétaires entreprises après la crise.

Le chartalisme étudie les conséquences du fait que dans une économie moderne, c'est l'Etat qui crée la monnaie. Puisque l'Etat crée la monnaie, il peut se financer indéfiniment : l'objectif de l'impôt n'est pas de financer l'Etat, mais d'obliger les citoyens à utiliser la monnaie et donc de lui donner cours. Dans ces conditions, les déficits et la dette publique ne sont pas un problème, puisque l'Etat peut toujours créer de la monnaie pour rembourser sa dette. Ce cadre théorique explique très bien pourquoi l'Europe subit une crise monétaire et non une crise de la dette, et pourquoi les Etats même très endettés n'ont pas de mal à se financer.

Mais ce qu'il y a peut être de plus intéressant dans le chartalisme, c'est ses préconisations au sujet du chômage. Pour les chartalistes, il faut abolir le chômage. Pas juste le réduire : l'abolir.

Pour l'école économique dominante, le néo-keynésianisme, le taux “optimal” de chômage est aux alentours de 5%, pour prendre en compte le fait que les gens mettent du temps à retrouver un emploi même lorsque l'économie fonctionne bien. Si le taux de chômage est proche de zéro, c'est un signe de surchauffe et que le marché du travail n'arrive pas à répondre aux demandes d'emploi.

Pour les chartalistes, tolérer le chômage c'est tolérer les récessions : lorsqu'il y a du chômage, ça veut dire que la demande des ménages est plus faible qu'elle ne pourrait l'être, et donc que l'économie est en sous-régime. L'Etat doit donc, par la loi, garantir un emploi à chacun. En ce faisant, il garantit un certain niveau de demande et empêche donc les récessions prolongées. Cette idée de garantie d'emploi est encore plus controversée que les idées monétaires des chartalistes.

La critique néo-keynésienne de la garantie d'emploi est essentiellement microéconomique : en garantissant un emploi à chacun, l'Etat pourrait créer de l'assistanat, et empêcher les entreprises de créer des emplois productifs en les remplaçant comme employeur de dernier ressort. Pour mettre en place cette garantie d'emploi, il faudrait créer une bureaucratie gigantesque.

Pour les chartalistes, les néo-keynésiens sont cruels et manquent d'ambition. Cruels parce que les travailleurs font les frais d'ajustements macroéconomiques dont ils ne sont pas responsables, et manquent d'ambition parce que l'objectif de la politique économique devrait être le plein emploi au lieu de se résigner à des cycles de récessions et de chômage. Les néo-keynésiens voient les cycles économiques comme une loi de la nature à subir, comme les marées ou la levée du soleil, alors que pour les chartalistes il n'y a pas de malédiction.

Qui a raison ? Une garantie d'emploi est fort probablement irréaliste à l'heure actuelle. Mais là où les chartalistes ont raison est qu'ils ont montré l'importance de la demande pour relancer une économie en récession. L'austerité est entrain de fusiller la zone euro, et les Etats-Unis, qui ont eu une politique modérée de relance de la demande, ont une reprise modérée. La garantie d'emploi est la version la plus extrême d'une stimulation de la demande, mais l'idée qu'il faut stimuler la demande va rester avec nous pendant longtemps. Ainsi, surtout, que l'idée qu'il faut chercher du côté des économistes hétérodoxes...

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