Tournant dans le traitement du diabète ? L'association américaine consacrée à la maladie reconnait l'efficacité des régimes pauvres en sucres<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Santé
Tournant dans le traitement du diabète ? L'association américaine consacrée à la maladie reconnait l'efficacité des régimes pauvres en sucres
©Joshua Blanchard / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

Enfin !

L'ADA, Association américaine du diabète a enfin reconnu l'efficacité des régimes pauvres en sucres. Combien de temps faudra-t-il pour que cette bonne nouvelle passe l'Atlantique ?

Guy-André Pelouze

Guy-André Pelouze

Guy-André Pelouze est chirurgien à Perpignan.

Passionné par les avancées extraordinaires de sa spécialité depuis un demi siècle, il est resté très attentif aux conditions d'exercice et à l'évolution du système qui conditionnent la qualité des soins.

Voir la bio »

L'enjeu est important : l'obésité, le syndrome métabolique et le diabète type 2 représentent la maladie chronique la plus répandue dans les pays industrialisés qu'il s'agisse de pays à hauts à bas revenus. Cette épidémie de diabésité alimente les maladies cardio-vasculaires, augmente le risque de cancer et de certaines formes de démences, menace l’espérance de vie. Nos concitoyens ont bien compris que l'enjeu était de vivre longtemps avec des capacités cognitives permettant une vie relationnelle de qualité et aussi des capacités physiques permettant de déambuler, de lire, écouter de la musique parler avec ses proches au moment où l'âge nous convainc que le chemin qui nous reste à faire est avant tout l’échange social et le partage enrichissant d’une expérience. 

Dans ce contexte, ni les recommandations officielles,ni les traitements n'ont réussi à infléchir la progression de cette épidémie. Comme toujours dans ce type de résultat paradoxal il y a ceux qui pensent que nos concitoyens ne suivent pas assez les recommandations et ceux qui pensent au contraire que ces recommandations sont inefficaces donc erronées. Pour connaitre la vérité il faut faire des recherches expérimentales.

Penser différemment la diabésité c'est avant tout considérer qu'un train peut en cacher un autre. Il est certain que la sédentarité, l'humanité s'est assise après l'industrialisation, combinée à la disponibilité ad libitum de calories alimentaires représentent 2 causes significatives de cette épidémie. Mais en regardant de plus près les transformations qualitatives de notre alimentation dans le régime d'abondance que nous permet la production agro-alimentaire actuelle, 2 faits ont éveillé l'attention des scientifiques et ce depuis longtemps. Tout d'abord l'importance des sucres dans notre alimentation et ensuite l'importance des produits par rapport aux aliments entiers peu transformés. En Janvier 1985 Boyd Eaton et Konner publient dans le New England Journal of Medicine : Nutrition paléolithique - Examen de sa nature et de ses implications actuelles

Dans cet article disruptif ils propulsent la vision évolutionniste de la diabésité et d’autres maladies au devant de la scène médicale. Nous vivons avec un patrimoine génétique très proche due celui du paléolithique mais notre alimentation a changé drastiquement. Des milliers d’articles scientifiques ont confirmé ce constat. La prescription paléolithique qu’ils rédigent a été largement citée dans la littérature scientifique. À l'évidence les transformations alimentaires brutales au sein desquelles la prépondérance des sucres rapides et l'abandon des aliments entiers pour des produits raffinés hyper transformés et constitués d’un assemblage complexe de nutriments n'existant parfois pas dans la nature (comme les acides gras trans), peut être regardée comme une transition trop rapide. Notre métabolisme ne peut s’adapter car il est programmé pour la survie dans un univers de rareté alimentaire. En effet toute adaptation génétique à un nouvel environnement prend des milliers d’années. Que faut il retenir comme conséquence principale? Ce régime d'abondance en calories, privilégiant les sucres et les aliments raffinés sous forme de produits industriels à une conséquence majeure et rapide:  le stockage des calories non utilisées, la prise de poids, l'obésité et ensuite en fonction des susceptibilités individuelles le syndrome métabolique et le diabète type 2.
Pour de multiples raisons la médecine conventionnelle a considéré que cette épidémie pouvait être traitée avec des médicaments. Normaliser le taux de sucre dans le sang avec des hypoglycémiants ou quand le pancréas est épuisé avec de l'insuline représentent actuellement le traitement standard. Il sauve des vies mais ne prévient pas. Cette prise en charge médicamenteuse ralentit peu les complications du diabète type 2, ne met pas les obèses à l’abri des complications biomécaniques, du sur risque de cancer et de l'évolution inéluctable vers les maladies cardio-vasculaires.  Depuis plusieurs années et en particulier après l'article de Boyd Eaton de nombreux chercheurs cliniciens, biochimistes ont préconisé la réduction des sucres dans l'obésité le syndrome métabolique et le diabète type 2. Plus récemment des essais cliniques sont venus corroborer les histoires cliniques que de nombreux médecins ont pu observer. Un régime pauvre en sucres permet rapidement de réduire le surpoids et de normaliser la glycémie notamment au début du diabète type 2. Une méta-analyse d’essais cliniques sur les régimes pauvres en sucre a démontré leur efficacité non seulement sur le poids mais aussi sur les paramètres métaboliques comme les triglycérides. La réussite est bien sûr liée à l'environnement du patient et à l'observance de ces régimes dans la vie de tous les jours. 

Ce qui est nouveau c’est qu’en ce mois de janvier l'association américaine du diabète (ADA) une institution mondiale très reconnue, a publié ses nouvelles recommandations. Pour la première fois l’ADA reconnaît que le régime pauvre en sucres est une option efficace dans la prise en charge non médicamenteuse du patient diabétique type 2. C'est-à-dire de l'immense majorité des patients diabétiques. C'est un événement considérable qui va ouvrir une nouvelle ère de prévention du diabète type 2.  Les conséquences ne sont pas uniquement médicales, l'industrie agroalimentaire  a jusqu'alors fait la sourde oreille, alors qu’elle transforme énormément de produits sucrés et ajoute du sucre dans presque tous les produits présents dans les gondoles des supermarchés. Elle ne pourra plus se réfugier derrière les recommandations officielles pour cacher le sucre, en ajouter, ou nier la participation des sucres dans la genèse de l'obésité du diabète type 2. Continuer son business comme d'habitude n’est plus une option. 

“Pour les personnes atteintes de diabète de type 2 ou de prédiabète, les régimes alimentaires contenant peu de glucides peuvent améliorer les résultats liés à la glycémie et aux lipides pendant un an maximum . Une partie du défi que pose l’interprétation de la recherche sur les aliments à faible teneur en glucides est due au large éventail de définitions d’un régime alimentaire pauvre en glucides (85,86). Les études sur les régimes alimentaires contenant peu de glucides indiquant généralement des problèmes de viabilité à long terme, il est important de réévaluer et d’individualiser régulièrement les orientations des plans de repas pour les personnes intéressées par cette approche. Les prestataires doivent maintenir une surveillance médicale constante et reconnaître que certains groupes ne sont pas adaptés aux régimes alimentaires faibles en glucides, notamment les femmes enceintes ou allaitantes, les enfants et les personnes souffrant d'insuffisance rénale ou de troubles du comportement alimentaire. Ils doivent être utilisés avec prudence pour ceux qui prennent des inhibiteurs de SGLT2 en raison du risque potentiel d’acidocétose. Les recherches sur les habitudes alimentaires du diabète de type 1 sont insuffisantes pour soutenir un régime alimentaire au lieu d'un autre à l'heure actuelle.

Pour terminer ce très court aperçu de ces nouvelles recommandations je voudrais souligner qu’il existe une condition de bonne exécution et d’observance de ces régimes: diminuer la ration de sucres de manière drastique n'est pas une pratique anodine pour un diabétique type 2 c’est pourquoi il faut consulter. Ce régime ne doit s'envisager qu'avec le concours d'un médecin et d’un diététicien ne serait-ce que pour identifier les sources de glucides dans les aliments et adapter le traitement, c'est-à-dire habituellement l'alléger en fonction des résultats biologiques au fur et à mesure de la perte de poids.

Le sujet vous intéresse ?

Thématiques

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !