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L’année 2019, pour Emmanuel Macron, se présente comme une équation à 3 inconnues
©LUDOVIC MARIN / AFP

Atlantico Business

L’année 2018 d’Emmanuel Macron lui laissera un souvenir désastreux. Celle qui s’ouvre est encore plus incertaine.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Alors que le quinquennat d’Emmanuel Macron avait démarré sur les chapeaux de roue, l’année 2018 se termine en cauchemar. 

Fini l’euphorie de l’élection présidentielle qui apportait un souffle tellement nouveau que les premières réformes sont passées avec le soutien d’une large partie de l’opinion publique. La réforme de la SNCF, la réforme du droit du travail s’annonçaient comme les plus difficiles. Elles ont été expliquées et soutenues par l’ensemble du pays. Malheureusement, cette euphorie n’a pas duré très longtemps. La croissance internationale s’est retournée, et la France a mal compris les promesses d’un temps nouveau. La gouvernance est passée d’imprécisions en incertitudes et surtout, n’a pas su expliquer la suite du film. Les Gilets jaunes sont venus rappeler que les promesses s’étaient perdues et que les projets étaient illisibles. 

L‘année 2019 pour Emmanuel Macron s‘ouvre avec une équation à trois inconnues. Lesquelles, comme chacun le sait, sont les plus difficiles à résoudre. La fin de son quinquennat dépend de cette équation.

Trois inconnues, trois défis. 

1ère inconnue : la suite des réformes inscrites au programme est consubstantielle au diagnostic sur lequel il a fondé toute sa politique. Il ne peut pas baisser les bras et changer de cap. Si la France souffre d’un déficit de compétitivité, si la France veut recoller au peloton des grandes nations occidentales, elle doit retrouver sa puissance économique. D‘où la nécessité de retrouver cette compétitivité qui nous manque depuis plus de 10 ans. Pour retrouver cette compétitivité, il faut renforcer l’écosystème des entreprises. D‘où la flexibilité du travail, d‘où la baisse des impôts supportée par les entreprises sur le capital (c’est à dire l’investissement) et sur le travail (charges sociales). Mais ça n’est pas tout, il faut poursuivre les chantiers qui ont été ouverts sur le système de santé, l’assurance chômage, les retraites... Sur la formation et l’éducation nationale. Or, la révolte des Gilets jaunes a, dans son foisonnement de postures et de revendications souvent contradictoires, quand même signifié au pouvoir que sa gouvernance était mal perçue et mal acceptée.  

Comment, dans ces conditions, poursuivre des réformes si le conducteur en chef du chantier est l’objet d’un phénomène de rejet?

Emmanuel Macron doit trouver la potion magique qui fera que les Français acceptent ces réformes. Sinon, il abandonnera les réformes et retombera dans l’immobilisme qui a tenu lieu de politique à des présidents comme Jacques Chirac ou comme François Hollande. Courage fuyons. Ceci dit, c’est cet immobilisme que les Gilets jaunes rejetaient aussi.

2e inconnue, l’Europe. L’Union Européenne va commencer l’année par le bouleversement du Brexit. Suivront les élections européennes qui vont constituer un test important sur la capacité des Européens à réformer les institutions. Les courants populistes et les discours très démagogiques tirent toutes les sociales démocratie vers la face la plus sombre de l’Union Européenne, celle qui tournerait le dos à l’approfondissement du rapprochement et le fédéralisme. Le climat n'est pas au raisonnable. Le climat est dominé par l'émotion. Or l’émotion permet de vivre certes, mais surement pas de construire. 

Emmanuel Macron est le seul des candidats à la présidentielle à avoir fait campagne sur le thème de l’approfondissement de l’Union Européenne. Et c’est lui, le candidat le plus pro-européen qui a été élu. Ça n’est pas un hasard, c’était pour lui une responsabilité. Or, tous les pays de l’Union Européenne sont imbibés par des courants froids du populisme qui demandent tous la même chose : plus de démocratie directe (alors que la règle de l’unanimité rend la gestion de la communauté très difficile), plus de protection sociale encore, et quand il aborde les questions de la solidarité au sein même de l’Europe, plus de mutualisation des dettes, à condition de les faire payer par les autres que soi-même. Courage fuyons. 

Les élections européennes peuvent consacrer les progrès importants des anti-européens. Quelle peut être la réaction et la ligne éditoriale d’Emmanuel Macron qui reste sur le papier l’un des seuls chefs d’Etat de l'Union Européenne le plus favorable au renforcement de l'UE, vers plus de solidarité et de gouvernance commune?

3e inconnue, quel projet pour la France. C’est banal que de le rappeler. Quand Emmanuel Macron est arrivé au pouvoir, il avait un projet et une vision, restaurer le système économique français et sa compétitivité. Faire de la France une startup nation. Les évènements de la fin de l’année ont mis fin au grand projet macroniste « make France Great again ». 

Sur le fond, le projet n’est sans doute pas rejeté par la majorité des Français qui ont toujours considéré que Macron apportait du sang neuf dans un univers affreusement conservatiste depuis trente ans, mais sur la forme, on sait maintenant que ça ne peut pas passer. Sur la forme, la majorité des Français ont du mal à acheter le paquet de réformes à venir. 

Pour passer des réformes structurelles aussi profondes que la question des retraites, du système fiscal, de l’assurance chômage, la réforme de l’Europe etc.Il faut réunir des conditions rares et fortes. Ça ne peut passer à deux conditions minimum :

Premièrement, il faut être en situation de crise extrême grave où les Français seraient convaincus que la gravité de la situation commande beaucoup d’efforts. « La crise rend intelligent » disait Machiavel. 

Deuxièmement, que ces réformes soient portées par un chef extrêmement rassurant et charismatique. 

Nous sommes en période de crise extrême grave mais on a toujours endormi les douleurs à coup d’emprunt public, à tel point que depuis trente ans, les Français ont compris qu’on n’allait jamais, sans doute, payer nos dettes. 

Quant au chef charismatique que représentait Emmanuel Macron au début, par sa jeunesse, son intelligence et son ambition, ce chef-là, a disparu.  

Il faut ajouter à son logiciel qui règle le dynamisme économique un autre logiciel puisant aux sources de la sociale démocratie et qui redistribuerait au « plus grand nombre » un peu des richesses gagnées et préemptées par une partie des plus riches.

C’est ce projet et l'histoire qui va avec que Macron doit présenter s’il veut conserver une chance de garder son pouvoir de changer les choses. 

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