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Grand écart : entre ses promesses et la modernisation de la France, que choisira François Hollande ?
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La voie du milieu

Élu sur le rejet de son adversaire plutôt que sur son programme, François Hollande va pourtant bien devoir le mettre en application, tant bien que mal. Le nouveau président pourra-t-il réformer la France et mettre en place les bases d'une gauche moderne et libérale ? Plusieurs voies s'offrent à lui.

Guillaume Lagane

Guillaume Lagane

Guillaume Lagane est spécialiste des questions de défense.

Il est également maître de conférences à Science-Po Paris. 

Il est l'auteur de Questions internationales en fiches (Ellipses, 2021 (quatrième édition)) et de Premiers pas en géopolitique (Ellipses, 2012). il est également l'auteur de Théories des relations internationales (Ellipses, février 2016). Il participe au blog Eurasia Prospective.

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La défaite de Nicolas Sarkozy s’explique sans doute par le désir d’alternance, après dix ans de domination de la droite et par l’impact de la crise de 2008. Elle exprime aussi, quoiqu’on en dise, un rejet par les Français des réformes menées depuis 2007. Il s’agit d’un rejet, classique en France au sein du « peuple de gauche », des politiques « libérales » du sarkozysme : réduction douce du nombre de fonctionnaires, refus des augmentations générales d’impôts, voire baisse de certains d’entre eux (la si décriée loi TEPA en 2007, détricotée ensuite).

Mais, plus profondément, la défaite révèle la déception que ces réformes n’aient pas été plus profondes. Face à la crise, beaucoup de Français étaient prêts, confusément, à des sacrifices qui ne sont pas venus. L’assistanat a pris le masque nouveau du RSA. Les universités sont devenues « autonomes » mais pas comme Harvard. Les « régimes spéciaux » le sont encore un peu. L’âge de la retraite a été élevé mais pas assez pour équilibrer le système. Le marché du travail est resté verrouillé par une réglementation tatillonne et une indemnisation généreuse du chômage. Aucune politique publique n’a été abandonnée, aucune privatisation menée alors qu’abondent les candidats, en commençant par des médias publics dont on a naïvement découvert la partialité pendant la campagne. Nicolas Sarkozy n’a pas été le Thatcher français.

Quant à François Hollande, il se trouve confronté à une double impasse. Le nouveau président peut être tenté d’appliquer un programme qu’il n’a pas eu à beaucoup défendre tant son élection tient, pour l’essentiel, au rejet de son prédécesseur. Le problème est que, si modeste soit-il par rapport aux grandes envolées de 1981 (rompre avec le capitalisme) ou 1997 (mise en place des 35 heures), ce programme est difficilement applicable. L’augmentation de l’allocation de rentrée scolaire (20 à 40 € de plus par enfant pour une allocation qui pèse tout de même 1,5 Md €), l’accroissement immédiat du nombre de professeurs des écoles (en puisant dans la liste des recalés à l’examen…), la remise en question de la réforme des retraites, constituent de nouvelles dépenses publiques pour un Etat qui, chaque jour, emprunte 500 M € sur les marchés. La mise en œuvre d’une telle politique va à l’encontre des réformes structurelles attendues par ces mêmes marchés, qui risquent de sanctionner la France.

A l’inverse, on peut imaginer que le nouveau président refuse l’isolement du pays, le fameux « la Corrèze plutôt que le Zambèze » (expression du célèbre journaliste de Paris-Match, Raymond Cartier) qui poussa l’opinion française à souhaiter l’abandon de l’empire colonial dans les années 1950. Il se lancerait alors dans les réformes du marché du travail, dans les réductions de dépenses publiques, dans les politiques de libéralisation, de concurrence et d’innovation que listait, en 2008, le rapport Attali. Il ferait alors naître cette fameuse gauche moderne et libérale dont la France était jusqu’alors orpheline. Mais on ne voit guère sur quelle force François Hollande, si tant est qu’il ait lui-même l’ambition d’être un Blair ou un Schröder français, pourrait s’appuyer dans une telle entreprise. Sauf à imaginer que l’état-major de la CGT soit, en réalité, formé de théoriciens libéraux masquant leur agenda caché derrière un discours de gauche radicale, aucune des forces sociales qui l’ont porté à l’Elysée ne souhaite de telles réformes.

Reste une troisième voie, celle de l’immobilisme. Elle fut théorisée par un autre ancien président du conseil général de Corrèze, Henri Queuille, plusieurs fois ministre. Queuille, souvent cité par Jacques Chirac, rappelait que la politique ne consiste pas à résoudre les problèmes mais à faire taire ceux qui les posent. Et qu’aucun problème n’existe dont une absence de solution ne finisse par venir à bout. Une maxime amusante mais une politique dangereuse dans un pays dont la situation financière est de plus en plus incertaine.

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