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Taxe GAFA : quand le Gouvernement répond à la grogne fiscale … par plus de taxes !
©BERTRAND GUAY / AFP

Premier janvier

La France prélèvera la taxe GAFA d'ici le premier janvier. Bruno Le Maire estime que c'est ainsi plus de 500 millions d'euros qui pourront rentrer dans les caisses de l'Etat.

Guillaume Labbez

Guillaume Labbez

Après un début de carrière en cabinet ministériel sous les gouvernements Raffarin et de Villepin, Guillaume Labbez devient Conseil en communication et en affaires publiques et Maître de conférences en Négociation à l'école d'Affaires publiques de Sciences Po. Engagé dans le débat d'idées, il est administrateur de la Fondation Concorde, secrétaire général de DroiteLib' et membre du bureau politique des Républicains.
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Alors que la grogne fiscale enflamme le pays depuis plus d’un mois, le Gouvernement décide de répondre par plus de taxes. La « taxe GAFA » pourrait ressembler à une annonce habile dans la mesure où ces grandes entreprises américaines concentrent sur elles l’expression de nombreuses frustrations d’un continent européen qui peine à entrer dans le XXIe siècle. Mais cette mesure relève de la démagogie et pourrait se révéler dangereuse pour notre futur. Sous prétexte de rétablir l’équité fiscale, sujet plus complexe qu’on ne veut l’entendre, le Gouvernement invoque une mesure qui grèvera la compétitivité numérique européenne, sans pour autant s'attaquer au véritable enjeu : la baisse de la dépense publique.

L’équité fiscale. Les GAFA, à qui on reproche de ne contribuer que très peu aux recettes budgétaires françaises, sont tous imposés sur leurs bénéfices au niveau mondial dans la moyenne des contributions des autres entreprises multinationales, soit autour de 26% de leurs bénéfices. Ce que le soutien de la « taxe GAFA » dénonce comme une injustice fiscale n’est en fait qu’une mauvaise localisation des prélèvements fiscaux. En effet, aujourd’hui la notion d’établissement stable qui permet de déterminer la localisation de la création de valeur fait l’objet d’un consensus international né à une époque où l’industrie lourde prévalait encore dans la création de richesse mondiale. Notre système de fiscalité mondiale doit passer du modèle fordien au modèle numérique, car demain l’économie du numérique concernera tous les industriels. C’est l’objet des négociations qui ont actuellement lieu à l’OCDE, mais il faudra s’armer de patience pour voir émerger un nouveau consensus. A des enjeux complexes, le Gouvernement donne donc une réponse simpliste : une surtaxe arbitraire sur le chiffre d’affaires afin de financer ses cadeaux de Noël.

Une menace pour la compétitivité. Ce que tous les media ont promu comme une « taxe GAFA » (sus à l’envahisseur américain !), est en fait une véritable taxe sur les activités numériques qui touchera entreprises américaines, chinoises et européennes. Nos fleurons numériques naissant pourraient en être gravement fragilisés, de grands patrons de la Tech européenne (Spotify, Zalando, Booking.com) avaient d’ailleurs manifesté leur inquiétude le 30 octobre dernier dans une lettre ouverte aux Ministres des Finances européens. Alors qu’encore une majorité de leur chiffre d’affaires est réalisée en Europe, cette surtaxe serait pour elles une charge importante. En outre, on ne le répète jamais assez, une taxe est toujours payée in fine par le consommateur qui la voit se répercuter sur les prix. Demain, ce seront les annonceurs européens qui paieront ce surcoût à Facebook et Google, et tous les clients de Spotify et Zalando.

S’attaquer à la dépense publique ? Si beaucoup salueront ce geste « en faveur de l’équité fiscale », les baisses d’impôts attendront une fois de plus. Ce que le Gouvernement donne aux Gilets Jaunes d’une main, il le reprendra de l’autre, en taxant leur consommation. L’urgence économique ne doit pas être traitée avec des mesurettes redistributives, mais avec une baisse massive des impôts de tous, parce que, parmi les Gilets Jaunes, nombreux sont issus d’une classe moyenne déclassée. Et chacun le sait, il n’y aura pas de baisses d’imposition sans que l’État réfléchisse à son périmètre d’action et à une réforme ambitieuse de son fonctionnement. Cet impératif n’est pas inconnu de la majorité. Quand il était à Bercy, Emmanuel Macron avait proposé de mettre fin au statut de la fonction publique dans les missions non-régaliennes, comme l’ont fait les suédois. Vendredi, Laurent Saint-Martin, Vice-Président de la Commission des finances de l'Assemblée nationale, estimait dans Le Monde qu’il était possible de réduire la dépense publique de 80 à 100 milliards d’ici 2022 pour la ramener sous les 50% du PIB (contre 56% aujourd’hui). Le Gouvernement devra proposer un projet de loi de finances rectificative au printemps pour entériner sa « taxe GAFA », soit 100 millions d’euros de recettes supplémentaires alors qu’il engage 10 milliards de dépenses supplémentaires pour faire face à la crise actuelle. Et s’il proposait plutôt une économie de 30 milliards d’euros dès le printemps 2019 sur le fonctionnement de l’État ?

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