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Construire une vraie armée européenne, l’illusion qui pourrait coûter cher à la France
©FREDERICK FLORIN / AFP

Pavé de bonnes intentions

Macron dévoilait dans son interview pour Europe 1 mardi matin sa volonté de création d'une "vraie armée européenne" pour se défendre contre les menaces venues notamment de la Russie. Il a également souligné la nécessité de ne pas "dépendre seulement des Etats-Unis" et de pouvoir se défendre de manière plus "souveraine". Un vieux fantasme qui se heurte aux divergences des différents pays européens.

Pierre Conesa

Pierre Conesa

Pierre Conesa est agrégé d’Histoire, énarque. Il a longtemps été haut fonctionnaire au ministère de la Défense. Il est l’auteur de nombreux articles dans le Monde diplomatique et de livres.

Parmi ses ouvrages publiés récemment, Docteur Saoud et Mister Djihad : la diplomatie religieuse de l'Arabie saoudite, Robert Laffont, 2016, Le lobby saoudien en France : Comment vendre un pays invendable, Denoël, Vendre la guerre : Le complexe militaro-intellectuel, Editions de l'Aube, 2022.

 

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Atlantico : Le concept d'armée européenne est un vieux fantasme. La forme et le rôle d'un tel projet est-il clairement établi ?

Pierre Conesa : Non le format n'est pas défini parce qu'il n'y a pas de concept stratégique commun entre les différents pays européens. Est-ce que cela doit être une armée pour des interventions extérieures ? C'est un concept que nous partagions avec la Grande-Bretagne mais on ne sait pas si elle restera dans les projets de défense européen. Est-ce une armée de défense territoriale défendant les frontières des pays de l'UE avec toutes les incertitudes sur les frontières (Malte, Chypre...)? Est-ce au contraire une collaboration sur des moyens logistiques mutualisés (avions de transport, renseignements...) . le débat n'est pas tranché.

Parler d'armée européenne alors que la seule armée d'envergure en Europe est l'armée française a-t-il un sens ? La France ne serait-elle pas perdante dans un tel contexte ? 

Si c'est la France qui propose une mise à disposition de moyens, on ne voit pas où elle les trouverait. L'Allemagne est engagée dans une réflexion sur ses concepts de défense mais avec de grandes réticences intérieures. Les autres pays ne souhaitent pas distendre le lien avec les Etats-Unis et la Grande Bretagne avait toujours dit que l'Europe de la défense ne pouvait être confondue avec la défense de l'Europe qui est assurée par l'OTAN. L'Europe de la Défense doit être un complément de l'OTAN pour le moment.

On projette une armée européenne alors que les membres de l'UE comme la Pologne préfèrent acheter américain et accueillir des bases américaines. N'y a t il pas de marché de dupes ? 

Emmanuel Macron a raison d'insister sur les incertitudes stratégiques tenant à la fois aux aléas américains encore accrus avec la présidence Trump; sur l'architecture de sécurité patiemment construite après 1991; sur l'embargo contre l'Iran et le pouvoir extraterritorial que s'est donné la justice américaine; sur le rapport avec la Russie qui est une puissance européenne comme le rappelle le président.

La question en filigrane est : avons nous les mêmes ennemis que Washington ? L'Europe doit exister mais c'est encore un voeu pieux pour nombre de pays qui considèrent, non sans raison, que l'UE n'est pas une alliance militaire significative et que l'OTAN sans les Etats-Unis non plus. Les Américains constituent un allié et un risque en même temps comme on l'a vu avec le déclenchement de la guerre en Irak de George W.Bush.

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