Chute libre : Edouard Philippe tente de sauver la place de la France au Vietnam<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
International
Chute libre : Edouard Philippe tente de sauver la place de la France au Vietnam
©Jewel SAMAD / AFP

Ultime tentative

Benoît  De Tréglodé

Benoît De Tréglodé

 Benoît de Tréglodé est directeur de recherche à l'IRSEM, spécialiste du Vietnam.

Voir la bio »

Atlantico : Au Vietnam jusqu'à ce dimanche, Edouard Philippe compte muscler les liens franco-vietnamiens. Quels sont ces liens exactement, d'un point de vue historique ? D'un point de vue économique ? Le Premier ministre a déjà signé pour près de 10 milliards d'euros de contrats durant cette visite, que peut espérer d'autre ?

Benoît de Tréglodé : Le retour de la France au Vietnam date de la visite du président socialiste Mitterrand en 93. C'était le premier chef d'État à se rendre dans ce pays et à l'époque la volonté de la France était de faire du Vietnam la plateforme pour un retour économique de la France en Asie.A l'époque les parts de marché françaises au Vietnam étaient de près de 6% alors qu'aujourd'hui elles sont de 0.6%. La spirale est donc très descendante.


La France a donc aujourd'hui une position marginalisée auprès du Vietnam. Le pays s'étant ouvert au marché récemment s'est d'abord tourné vers ses voisins d'Asie du Sud-Est, mais également auprès des grandes puissances asiatiques (Chine Japon Corée du Sud Taiwan) et, de facto, la France s'est retrouvée perdante. Une position française qui était celle de penser le Vietnam comme étant un partenaire historique traditionnel avec une histoire partagée culturellement et linguistiquement qui était éternelle. Les chefs d'entreprise qui ont remis pied au Vietnam dans les années 90 ont découvert un pays complètement différent sur lequel il n'y a pas véritablement de "priorité France". Il y a clairement eu un phénomène de gueule de bois dans la communauté économique française dans les années 90 qui a rebroussé chemin avec la crise asiatique de 97 et qui n'est pas revenue complètement au Vietnam depuis.


Concernant les contrats, il faut distinguer les contrats aéronautiques et les contrats purement bilatéraux entre la France et le Vietnam. C'est ce qui permet de montrer vraiment la nature des relations bilatérales en matière économique. De ce point de vue-là la France aujourd'hui est le troisième partenaire commercial européen du Vietnam(derrière l'Italie et l'Allemagne). Le signal donné aujourd'hui avec des contrats importants signés entre les deux pays est une façon d'essayer de renforcer ces relations bilatérales. On peut se féliciter de signer pour plusieurs milliards d'euro de contrats, mais il ne faut pas se contenter de ceux passés par les entreprises du CAC40 et penser à nouer un tissu de PME/PMI dans le pays qui alimente véritablement cette relation économique bilatérale, ce que font les Allemands, les Italiens et ce que ne faut pas aujourd'hui la France. Ce déplacement de Philippe est une "opération séduction" importante et un moyen d'affirmer haut et fort que la France est un partenaire du Vietnam.

Au-delà du Vietnam en lui-même, que représentent ces liens pour la diplomatie française en Asie du Sud-Est ?

Il faut se poser la question de l'articulation aujourd'hui dans la politique étrangère française entre diplomatie économique et diplomatie traditionnel. L'agenda est aujourd'hui clairement tourné vers la diplomatie économique.


Il y a aujourd'hui une marge de progression particulièrement importante en Asie du Sud-Est pour les entreprises françaises, car il n'y a que deux pays dans la région où la France est "excédentaire" : Singapour et la Malaisie. D'où une vraie marge de manœuvre dans des marchés qui sont émergeants, des pays où une vraie classe moyenne qui consomme (mais pas français) a s'est développé. D'où la nécessité d'avoir un positionnement agressif sur ces marchés qui sont potentiellement de gros partenaires pour la France.

La diaspora vietnamienne en France représente quelque 350 000 personnes. Quelles retombées politiques le gouvernement peut-il espérer d'une telle visite ?

C'est une question compliquée, car l'immigration est ancienne. Une partie est arrivée dans les années 50, une autre dans les années 70… C'est une communauté qui est déjà sérieusement intégrée dans la communauté française et oui c'est une communauté que les politiques aiment courtiser. Mais dans le cadre de cette visite et dans ce contexte, il est bien difficile de se prononcer sur de potentiels résultats sur la scène intérieure. 

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !