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Symbolique de la revanche :  pourquoi le Plus long pont du monde est aussi un pied de nez des Chinois auquel les Occidentaux devraient prendre garde
©Anthony WALLACE / AFP

55km !

Ce mercredi, le pont le plus long du monde (55 km) est inauguré par Xi Jingping. Au-delà de l'aspect pratique de l'infrastructure qui relie sur le delta de la rivière des Perles (Zhu Jiang) Hong Kong, Macao et la Chine continentale, cette construction peut prendre une importance symbolique en ce qu'il rattache spectaculairement ces deux anciennes concessions occidentales à la Chine

Emmanuel Lincot

Emmanuel Lincot

Professeur à l'Institut Catholique de Paris, sinologue, Emmanuel Lincot est Chercheur-associé à l'Iris. Son dernier ouvrage « Le Très Grand Jeu : l’Asie centrale face à Pékin » est publié aux éditions du Cerf.

 

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Atlantico : Quelle est l'importance, au-delà de la volonté de rattachement de ces territoires par Pékin, d'une forme d'esprit de revanche de la Chine sur la domination des Occidentaux sur elle pendant le XVIIIe et XIXe siècle ?

Emmanuel Lincot : cette construction répond avant tout à un besoin: développer les infrastructures pour permettre à la région de se développer davantage. Le savoir-faire français a été sollicité en la matière; Bouygues tout particulièrement. Des Zones Économiques Spéciales telles que Zhuhai et Shenzhen vont en bénéficier. Symboliquement parlant, la construction d'un pont de cette envergure illustre la volonté pour Xi Jinping de développer sur les marges du territoire national le projet OBOR ("One Belt, One Road") même si la décision de le construire (2009) est antérieure à l'élection de Xi Jinping. De là à dire qu'il illustrerait un esprit de revanche sur les Occidentaux, cela me paraît devoir extrapoler la chose. La rétrocession de ces anciennes possessions européennes remonte déjà au siècle dernier...Toutefois, que Xi Jinping veuille en faire un symbole d'exaltation de la grandeur nationale ne fait évidemment pas l'ombre d'un doute. 

Comment la Chine présente-t-elle cette période de domination de l'Occident dans son histoire ? Quelle place tient-elle dans son récit national ?

C'est une période douloureuse qui permet, en s'y référant pour le pouvoir chinois, d'éluder la période la plus sombre des années Mao. La société chinoise et son régime se construisent dans la haine de l'autre et la recherche de boucs émissaires. Ceci n'est évidemment pas sain et dommageable pour nos relations avec la Chine. 

Les exactions et erreurs commises par les Occidentaux (guerres de l'opium, saccage du Palais d'été etc.) sont reconnues aujourd'hui par les historiens. Comment l'Occident peut-il résoudre ce différend historique avec la Chine sans s'affaiblir aujourd'hui ou demain ?

C'est un passé qui ne passe pas. La repentance n'est certainement pas l'attitude à adopter. Le dialogue, peut-être. Mais sommes nous responsables des erreurs commises par nos aïeux ? L'instrumentalisation des mémoires, comme l'a montré Todorov, est une tentation dangereuse. Elle fait le lit de toutes les revendications nationalistes. Or, le nationalisme c'est la guerre. 

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