France /Allemagne en Ligue des nations : pour être bien trempée, une amitié doit parfois l’être dans le sang de l’autre<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
International
France /Allemagne en Ligue des nations : pour être bien trempée, une amitié doit parfois l’être dans le sang de l’autre
©CHRISTOPHE SIMON / AFP

Sport

La fête est terminée et la Coupe du Monde est maintenant derrière nous. La victoire hier contre l'Allemagne 2 à 1 ne doit pas faire oublier les défis à venir.

Olivier Rodriguez

Olivier Rodriguez

Olivier Rodriguez est entraîneur de tennis et préparateur physique. Il a coaché des sportifs de haut niveau en tennis. 
 
Voir la bio »

France/Islande venait tout juste de nous faire comprendre que les confettis étaient retombés que déjà se présentait l'Allemagne, un de nos meilleurs ennemis. Enfin, ce qu'il en restait. Car la Mannschaft, victime de l'usure naturelle de ses cadres, d'un creux générationnel et des problèmes du Bayern (le socle traditionnel de l'équipe nationale), commençait à voir venir la malédiction. Inversion des tendances oblige, pour une fois, la France était favorite face à une Allemagne menacée de relégation en Ligue B de cette nouvelle bonne idée qu'est la Ligue des Nations. Ainsi, tandis que les Allemands luttent pour ne pas finir dans la voiture balai, les bleus caracolent en tête de leur groupe, Final Four de l'épreuve à l'horizon. Un équipe qui ne perd presque plus (une défaite en 22 matchs) contre une équipe qui ne gagne pas (5 défaites en 2018), voilà pour le tableau. Après avoir testé quelques non titulaires habituels pour le match précédent, (pour bien peu de satisfaction), Didier Deschamps avait décidé de débuter le match avec son équipe type, à l'exception de Samuel Umtiti, blessé. 

Le football est peut-être une drogue très puissante. En tous cas, il en a tous les effets, une extase aussi sidérante que fugace est très vite suivie par une descente particulièrement douloureuse. C'est l'évidence que nos amis Allemands se sont chargés de nous rappeler. Malins ces Allemands... Puisqu'ils ont pris les Français à leur propre piège: en alignant trois attaquants, ils procèdent par contres rapides. A la 12ème minute, une perte de balle de Pogba débouche sur une main involontaire de Kimpembe (sa série noire continue)... laquelle est sanctionnée d'un pénalty (très) sévère que Kroos transforme. Le ton est donné, la première période sera Allemande. Ils auront la possession et les meilleures occasions. Les Français, sauvés du pire par un bon Lloris mais manquant d'agressivité et de solidarité regagnent les vestiaires en pouvant s'estimer heureux de n'accuser qu'un but de retard. On imagine sans mal la causerie musclée de Deschamps. Manquant un peu de tout, son équipe avait surtout besoin d'être brusquée. Les Bleus reviennent aux affaires avec de meilleures intentions. Ils ne sont plus les uns à côté des autres, mais ensemble... et c'est par une action estampillée Atlético de Madrid que les français reviennent au score. A la 61ème, Griezmann coupe la trajectoire d'un centre hyper tendu d'Hernandez: Lucarne. Un beau but pour un grand soulagement. Le jeu devient plus vivant, l'intensité monte d'un cran et la domination devient enfin Française. A dix minutes de la fin, une nouvelle interprétation douteuse de l'arbitre accorde un pénalty au bleus. Griezmann, au four et moulin dans ce match, le met au fond sans trembler. Les Allemands, dos au mur et en cruel manque de confiance, ne s'en remettront pas.

 Une victoire donc mais des questions à la pelle. Rayon satisfactions, Deschamps est incontournable. Le coach au palmarès devenant invraisemblable a su changer le système (Mbappe passant à gauche, le bloc équipe pressant plus haut) et l'attitude de ses joueurs. On peut se demander s'il ne devient pas peu à peu le plus grand sélectionneur de l'histoire. Cette équipe lui ressemble, il en tire le meilleur. Elle refuse de perdre et affiche, en toutes circonstances, un niveau moyen le plus bas particulièrement élevé. Pour avoir autant foi en elle, cette équipe doit sacrément croire en lui. Deux autres mentions spéciales, pour Griezmann et Lloris. Le premier marquant un doublé, le second nous gardant la tête hors de l'eau quand l'équipe prenait le bouillon. Côté inquiétudes, c'est Pogba qui polarise l'attention. Trop joueur et pas suffisamment travailleur, il doit montrer bien davantage. L'autre problème concerne l'équipe dans son ensemble car le comportement à la perte du ballon en dit beaucoup sur un effectif. Pour certains joueurs, si les allers sont simples, les retours sont très compliqués.

 Il faut conclure en insistant sur la problématique de ce qui succède aux grandes victoires. La vérité d'un tournoi n'est pas celle d'un projet. LA temporalité joue: le tournoi est derrière, les nouveaux objectifs sont devant. Cette équipe, paradoxalement, gagne énormément avec une toute petite marge de manoeuvre. Dès qu'elle s'écarte de ses vertus premières (solidarité, intensité, sens du collectif) elle s'expose aux plus grandes désillusions. Elle n'a pas les moyens de se prendre pour ce qu'elle n'est pas. Régénérer, réorganiser, piquer les susceptibilités, faire bouger les lignes... tous ces principes sont nécessaires même après un triomphe. Car rester au sommet est plus difficile que d'y accéder. Maintenir le niveau d'exigence, la faim de succès et le niveau de performance, tels sont les enjeux. Deschamps le sait. Il le fera par petites touches. Rien ne doit être figé dans le sport de haut niveau, car toute stagnation est annonciatrice d'un prochain recul. Etre champions du monde (avec un effectif aussi jeune) confère une difficulté supplémentaire à un exercice déjà délicat. Sur ces deux derniers matchs, les bleus sont menés au score. Un hasard ? Nul compétiteur ne peut y croire. Nous aurons pour finir une pensée pour nos voisins Allemands. Ils sont certainement en fin de cycle et on ne voit pas très bien comment et avec qui ils vont enclencher le nouveau. Les têtes vont tomber au pays de Goethe. Une nouvelle fin du romantisme Allemand ? Ils apprendront ce soir, qu'une amitié, parfois, pour être bien trempée, doit l'être dans le sang de l'autre.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !