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Les banquiers ne sont pas stupides, ils sont simplement humains (et cupides)
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Oncle Picsou

Alors que certaines banques américaines se remettent déjà à prêter de l'argent à des citoyens encore insolvables, la question de leur bon sens peut-elle se poser ?

Jean-Marc Daniel

Jean-Marc Daniel

Jean-Marc Daniel est professeur à l'ESCP-Europe, et responsable de l’enseignement de l'économie aux élèves-ingénieurs du Corps des mines. Il est également directeur de la revue Sociétal, la revue de l’Institut de l’entreprise, et auteur de plusieurs ouvrages sur l'économie, en particulier américaine.

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Les banquiers sont-ils cupides ou stupides ? A lire la presse on serait tenté de répondre à cette question comme dans les films de comique troupier : les deux mon colonel !

Ainsi le banquier serait d’une espèce humaine rare, celle qui cherche à maximiser son intérêt ! Et il aurait en face de lui une population naïve et angélique, se dévouant pour le bonheur commun et des Etats animés par le seul souci du bien public. Cette fable est évidemment grotesque. Les hommes sont les hommes et, banquiers ou non, ils agissent par intérêt. Dans Les Caves du Vatican, André Gide dont l’oncle était un économiste en vue, s’interrogeait sur « l’acte gratuit » (en l’occurrence dans le livre de Gide, il s’agit d’un acte criminel). Et il arrivait à la conclusion que l’acte gratuit est une illusion. Les banquiers ne sont donc pas particulièrement cupides, ils sont simplement humains.

Sont-ils alors stupides au point d’avoir fait n’importe quoi en prêtant à n’importe qui ? On pourrait là encore le croire vu qu’on leur reproche d’avoir prêté sous forme de subprimes à des ménages américains insolvables ou d’avoir prêter à des Etats comme la Grèce dont il était évident qu’ils étaient incapables de rembourser. Sauf que dans l’affaire des subprimes, les banques américaines ont prêté parce que les dettes étaient garanties par des organismes publics. Quant à la Grèce, le compromis financier né avec la généralisation des banques centrales au XIXe siècle en faisait un actif sûr. La règle du jeu qui s’est instaurée après la loi de 1844 sur la Bank of England était que, quoi qu’il arrive, la banque centrale reprenait en refinancement sans condition particulière la dette publique. Si manifestement, notamment en zone euro, la règle a changé, ce ne sont pas du fait des banquiers.

Le plus grave dans ce discours démagogique en fait aussi vieux que la banque est qu’il conduit (sous le nom de Bâle 1, 2 ou 3) à la multiplication de contraintes artificielles sur les banques. Or en les bridant, on bride le crédit et donc la croissance.

La croissance économique suppose que les banques prêtent à des entrepreneurs qui prennent des risques sur la base d’une analyse de l’avenir de l’économie et de leurs débouchés. Le porteur de risque, c’est l’entrepreneur et il l’assume au travers de son apport en fonds propres. Quand il se trompe et la banque qui lui a prêté avec lui, les fonds propres disparaissent, la banque se remboursant par la récupération de ses actifs. Si malgré les actifs en question, la banque ne boucle pas ses comptes, elle-même finit par faire faillite. C’est là la vie même de l’économie qui veut que celui qui agit est libre et responsable : quand tout se passe bien, il fait fortune ; sinon, il fait faillite.

Pour la population, le problème à traiter n’est pas celui de la morale soi disant douteuse des banquiers, ni leur garantie de survie coûte que coûte. Il est celui du destin des dépôts. Carter Glass, que l’on remet à l’honneur avec les débats sur le « Glass Steagall act » s’était montré très réservé sur la loi qu’on lui attribue. Car pour lui, il fallait laisser les banquiers libres de faire leur métier. La seule chose sur laquelle il insistait auprès de l’administration Roosevelt était qu’il fallait éviter la ruine des déposants et donc simplement créer un système d’assurance les concernant. Il avait raison...

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