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Un mythe qui s'effrite... ? Bob Woodward aurait-t-il embelli son enquête sur le Watergate ?
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Maquillage

Un livre à paraître prochainement aux Etats-Unis sur le scandale du Watergate à propos des écoutes ordonnées par la Maison Blanche de Richard Nixon exprime pour la première fois les doutes du rédacteur en chef du Washington Post de l'époque sur l'histoire racontée par ses journalistes.

Un pot de fleur, un drapeau rouge, le tout sur un balcon devant une fenêtre. A priori, rien de bien étrange. C'est pourtant le signal qu'avait choisi le journaliste d'investigation américain Bob Woodward pour fixer les fameux rendez-vous dans un garage à Gorge Profonde, sa source dans l'enquête du Watergate. Mais est-ce vraiment arrivé ?Dans un livre à paraître ces jours-ci, Ben Bradlee, rédacteur en chef du Washington Post au moment du plus gros scandale de ces dernières décennies, exprimerait des doutes sérieux sur la façon dont se seraient déroulés les événements.

Le Watergate, c'est ce scandale ayant mené à la démission du Président des Etats-Unis de l'époque Richard Nixon en 1974 après deux ans de tourbillon politico-médiatique déclenché par un cambriolage dans l'immeuble du parti démocrate (immeuble qui s'appelait le Watergate). Les hommes arrêtés lors du cambriolage étaient en possession de matériel d'écoute et il apparaîtra bientôt qu'ils étaient liés à la Maison Blanche.

Bien que Nixon ait dans un premier temps été réélu en novembre 1972, pendant les mois suivants, les révélations sur les liens entre l'administration Nixon et les cambrioleurs ainsi que sur des financements politiques se succèdent dans la presse américaine et principalement dans le Washington Post sous la plume de deux jeunes journalistes Bob Woodward et Carl Bernstein qui obtenaient la plupart de leurs informations d'un mystérieux informateur surnommé Deep Throat ("Gorge Profonde").

Dès janvier 1973, le Sénat s'en mêle et tout s'enchaîne. Une commission d'enquête sur les abus commis par les républicains lors de la campagne de 1972 est mise en place. Rapidement, un témoin clef révèle que le Watergate n'était qu'une petite partie d'une vaste opération d'espionnage politique menée par le Maison Blanche. Les révélations se suivent, les démissions aussi, jusqu'à celle du président. Et l'enquête des deux journalistes, qui remportent le prix Pulitzer en 1973, de devenir un modèle de journalisme d'investigation. Petit à petit, d'autres secrets refont surface, notamment l'identité de Gorge Profonde qui avait alors fait couler beaucoup d'encre. En mai 2005, le magazine américain Vanity Fair dévoile qu'il s'agissait en fait de W. Mark Felt, directeur adjoint du FBI sous Nixon. Terminées les révélations sur le Watergate et la fameuse source ? Pas vraiment puisqu'il semblerait que cette affaire recèle encore aujourd'hui des secrets, des incohérences.

"J'ai un petit problème avec Gorge Profonde. L'histoire de la plante est-elle vraiment arrivée ? Et y a-t-il eu une rencontre dans un garage ? Cinquante rencontres dans le garage ? Je ne sais vraiment pas en fait combien il y en a eu. Je continue d'entendre une cette petite voix qui me dit que toute cette histoire n'est pas exacte", aurait expliqué Ben Bradlee, le rédacteur en chef qui avait confié l'enquête à Woodward et Bernstein.

Ces déclarations refont surface aujourd'hui alors qu'une biographie de l'ancien rédacteur-en-chef du Washington Post, Yours in Truth, écrite par l'écrivain Jeff Himmelman, sera publiée prochainement. Or Jeff Himmelman se trouve avoir été assistant de recherches pour Woodward et Bernstein. C'est bien là que le bât blesse. Si le journaliste Bob Woodward  a déjà été maintes fois critiqué, sur le scoop du Watergate mais aussi d'autres affaires,  cette fois, les critiques viennent de proches.

Dans un article publié fin avril dans le New York Magazine, Jeff Himmelman ne s'arrête pas à ces simples allégations. Il ajoute qu'après être tombé sur ces révélations, il a interviewé Bob Woodward pour le confronter aux déclarations de Ben Bradlee. Bob Woodward aurait paru "visiblement secoué", ce qui confirmerait l'hypothèse que son livre Les Hommes du président écrit juste après le Watergate aurait été largement embelli.

Et la partie de ping-pong peut débuter. Le journaliste accusé a bien évidemment très vite réfuté toutes ces déclarations dans une interview donnée au site Politico. Jeff Himmelman aurait oublié de mentionner certains éléments recueillis lors d'interviews pour son livre.

"Il existe la transcription d'une interview qu'Himmelman a fait de Bradlee il y a dix-huit mois qui contredit ce qui est écrit dans l'article du NY Magazine. C'est incroyable que Jeff ne l'ait pas intégrée", explique Bob Woodward qui ajoute qu'il a la transcription d'une interview datant d'octobre 2010 dans laquelle Bradlee explique qu'il ne doute pas une seconde de l'investigation de Woodward sur le Watergate.

Le doute persiste, et chacun se renvoie la balle. Himmelman assure même que toutes les interviews faîtes avec Bradlee seront présentes dans le livre.  Et un troisième joueur entre dans la danse. Ben Bradlee, enfin, s'exprime. Suspens insoutenable. Les révélations tant attendues n'auront pas lieu puisqu'il donne finalement raison à Woodward par l'intermédiaire de sa femme, la journaliste Sally Quinn. Elle assure que Ben Bradlee a toujours cru à ce qu'a écrit Bob Woodward, et que ça ne changerait jamais.

Une révélation de plus concernant le Watergate qui fait pschitt, en attendant des prochaines qui ne tarderont pas à venir, assurément.

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