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Fiat perd son puissant patron : une page se tourne... pour le meilleur
©Piero CRUCIATTI / AFP

La fin d'un monde ?

Mike Manley a pris la succession du patron emblématique de Fiat, Sergio Marchionne, un des dirigeants les plus respectés de l'industrie automobile dont l'état de santé s'est dégradé à la suite d'une opération en Suisse. Il est décédé ce mercredi 25 juillet 2018. Après 14 ans à la tête de Fiat, quel est le bilan de Marchionne ? Que manque-t-il à Fiat pour redevenir un groupe conquérant, d'envergure mondiale, avec une vraie capacité d'innovation ?

Bernard Jullien

Bernard Jullien

Bernard Jullien est économiste.
 
Il est directeur général du réseau international Gerpisa (Groupe d’étude et de recherche permanent sur l’industrie et les salariés de l’Automobile).
 
 
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Atlantico.fr : Après 14 ans à la tête de Fiat, comment qualifieriez-vous le bilan de Marchionne ?

Bernard Jullien : Marchionne a indéniablement marqué le paysage de ces dernières années en réussissant, au bénéfice de son actionnariat, un certain nombre de coups. Il a commencé par réussir une sortie de l'accord de Fiat avec GM qui s'est effectuée, grâce à lui, dans des conditions extrêmement favorables à Fiat. Il a ensuite surfé sur les opportunités de délocalisations à l'Est en baissant la production en Italie au profit de la Pologne puis de la Serbie pour revenir en Italie finalement. Il a profité du succès de la 500. Il a réformé la structure quasi-conglomérale de Fiat ce qui permet aujourd'hui de se séparer de la partie poids lourd ou de la partie équipementière.
Pendant tout son règne, les analystes se sont demandés si il était missionné par les actionnaires pour relancer Fiat dans la course mondiale ou si il cherchait pour eux des solutions de sortie favorable. 
En 2018, le doute n'est pas, de mon point de vue, complètement dissipé.

Le rachat de Chrysler pendant la crise financière a particulièrement contribué à instaurer une légende dorée autour de Marchionne. Cette réputation de patron visionnaire et audacieux est-elle justifiée ?

La reprise de Chrysler a été un de ses coups : l'administration américaine avait déjà du nationaliser GM et cherchait une solution pour que Chrysler ne disparaisse pas corps et bien. A l'époque, souvenons-nous, l'administration Obama pensait que la sortie de crise ne pourrait se faire qu'en développant des véhicules plus raisonnables et moins émetteurs. Marchionne a convaincu que Fiat pouvait amener des solutions à Chrysler dans cette perspective. Avec la reprise, une fois les surcapacités éliminées, Chrysler a profité à plein du marché américain en vendant essentiellement des SUV et des light-trucks très gros et polluants comme les RAM. Jeep a été utilisée comme une marque mondiale et les carences de la gamme Fiat et/ou de son portefeuille de marques ont pu ainsi être en partie masquées.
Dans cette affaire, Marchionne a été audacieux certainement. Si être visionnaire signifie imaginer un ensemble industriel, commercial et technologique cohérent et apte à se développer mondialement de manière autonome alors on peut être un peu plus circonspect sur le second qualificatif.

Que manque-t-il aujourd'hui à Fiat pour redevenir un groupe conquérant, d'envergure mondiale, avec une vraie capacité d'innovation ? Quel profil faut-il pour succéder à Marchionne ?

Quand on regarde FCA aujourd'hui, on a une partie européenne qui vivote avec une marque Fiat qui a énormément perdu et dont le portefeuille produit est tout de même très pauvre. On a une partie brésilienne qui est presque le seul développement convaincant de Fiat dans les émergents mais date d'avant Marchionne. On a Chrysler qui n'existe hors des Etats-Unis qu'avec Jeep et qui, aux Etats-Unis, est peu positionné sur les "cars" et a par conséquent assez peu besoin de faire jouer des synergies avec Fiat.
Sur les deux grands dossiers qui continuent de focaliser l'attention de l'automobile mondiale que sont le développement global d'une part et les nouvelles technologies d'autre part, l'essentiel reste à faire aujourd'hui pour FCA et, en partant si tard, on voit mal comment, malgré sa profitabilité, le groupe pourrait y parvenir seul.

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