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En renonçant à la baisse des dépenses publiques, Emmanuel Macron va  se mettre en contradiction avec la logique d’offre qu’il a toujours défendue
©POOL / AFP

Atlantico Business

Renoncer à baisser les dépenses publiques va être contradictoire avec l‘objectif de compétitivité. Les dépenses publiques ont besoin d’impôts pour se financer. Or, cette logique d’offre a besoin de baisse d’impôts

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Emmanuel Macron n’a pas seulement infléchi le ton et la forme de son discours pour essayer d’enrayer la grogne et la rogne sociale, on sait maintenant qu’il va renoncer à son objectif premier de réduire les dépenses publiques qui était de parvenir à l’équilibre budgétaire et même à excèdent à la fin de son quinquennat. 
Lors de son discours au Congrès, le président de la République a laissé entendre qu’il allait veiller à l'évolution des dépenses publiques. Quelques heures plus tard, on apprenait que l’Assemblée nationale devra accepter la baisse, non pas des dépenses publiques, mais la baisse de leur augmentation. En bref, on va baisser la hausse. Quelques heures plus tard, Edouard Philippe le Premier ministre confirmait l'abandon de parvenir à l’excédent. Rien de plus logique si on veut reconstruire l’Etat Providence sans faire de mal à personne.
Alors, on peut comprendre qu’un gouvernement menacé par la colère sociale et le mécontentement renonce à ses engagements de rigueur, on comprendrait éventuellement qu‘en période de conjoncture difficile, un gouvernement relâche les manettes budgétaires, mais on n’est, ni dans l’un, ni dans l'autre de ces deux cas. 
Plus grave, en inversant la priorité budgétaire, en renonçant à son projet de revenir dans les clous de Maastricht, Emmanuel Macron se met en contradiction avec la politique de compétitivité qu‘il défend avec ferveur depuis le début de son mandat. 
Dès son arrivée au pouvoir, le président de la République a opté sans l’ombre d’une hésitation pour mettre en place une politique de d’offre.
Partant du constat partagé par beaucoup que l’économie française souffrait d’un déficit de compétitivité coût et hors coût, il a déployé tous les outils de l’économie d’offre. Il a réformé le code du travail pour faciliter la mobilité et la flexibilité, il a abaissé l’imposition du capital pour attirer les investisseurs et amélioré l‘attractivité du site France en semant toutes les graines d’une politique pro-business, ce qui lui a permis de changer d’abord l'image de la France à l’étranger et de conforter sa propre image auprès de ses électeurs, cadres moyens et cadres supérieurs. 
Le problème, c’est qu’une politique de réformes structurelles capables de booster l’offre ne produit pas des effets très rapidement parce que ça ne passe que par de l’investissement. L’opinion s’est donc impatientée. Et pour répondre à cette impatience, il s’engage à redonner un peu de grain à moudre via le budget.
Et bien ce renoncement est contradictoire avec la politique de l’offre. Le budget et la montagne de dépenses publiques et sociales sont évidemment utiles au moral de ceux qui sont en difficulté, mais ces dépenses publiques et sociales, ce sont aussi des impôts et cotisations. Or, les impôts et les cotisations sont des freins à la compétitivité. 
Les amortisseurs sociaux ne tombent pas du ciel. Il faut bien les financer. 
Si on veut que le système économique gagne en compétitivité, il lui faut supporter moins d’impôts, moins de cotisations obligatoires et moins de frais généraux. 
C’est vrai pour les entreprises qui ont besoin de souplesse pour gagner des marchés mais c’est vrai aussi de l’Etat, des collectivités locales et même des organismes sociaux qui doivent prouver l'attractivité du système auprès des investisseurs. Sinon, ils partiront à l’étranger et les étrangers ne viendront pas chez nous.
Le gouvernement peut toujours nous expliquer qu’à l’avenir, il comptera sur un élargissement du gâteau pour faire tomber la part relative des charges fiscales et sociales, mais comment élargir le gâteau si ceux qui le produisent (salariés, actionnaires et clients) sont empêchés de le faire. 
Le gouvernement peut aussi reprendre à son compte l’argument des Keynésiens pur sucre qui nous expliquent que la dépense sociale permet de soutenir la demande et qu‘à ce titre, elle est utile au fonctionnement du système, sauf que le gouvernement nous a démontré à longueur de campagne que l’argent social n’avait pas l’efficacité qu’on lui prêtait. Si non, il y a des années que la pauvreté dans ce pays aurait disparu, que nous serions au plein emploi et que les inégalités ne seraient pas un problème ni social, ni politique. 
Si le débat actuel préfigure un changement de stratégie, ça signifie que le gouvernement va aussi progressivement changer cette logique d’offre. Emmanuel Macron ne s’est pas fait élire sur une promesse mais sur une analyse courageuse qui soulignait la corrélation entre le social et l’économie. « On ne peut faire du bon social que si et seulement si on avait une bonne économie. Restaurons la force de l’économie et nous aurons des créations de richesses et des emplois ». D’où moins d’inégalité, moins d’allocation chômage etc.
Cette mécanique vertueuse avait pour corolaire la baisse des dépenses publiques. Si on ne baisse pas les dépenses publiques, on va continuer à plomber durablement le système économique qui bénéficiera d’un modèle social des plus généreux (et couteux) mais évidemment de moins en moins efficace. 
La logique d’offre produit des rendements croissants. Si on n’y prend pas garde, l’Etat providence en risque d’obésité génère des rendements décroissants.

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