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Florence Berthout : "Avec un milliard d’euros de recettes supplémentaires pour Paris, Anne Hidalgo pourrait quand même enfin dimensionner le service de la propreté en conséquence des besoins"
©ludovic MARIN / AFP / POOL

Propreté de la capitale

Jack Lang au retour d'un voyage au Japon a taclé Anne Hidalgo en lui conseillant d'aller passer quelques jours à Tokyo pour prendre conscience du problème de la saleté des rues de Paris.

Florence Berthout

Florence Berthout

Florence Berthout est maire divers droite du 5e arrondissement de Paris.

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Jack Lang au retour d'un voyage au Japon a taclé Anne Hidalgo en lui conseillant d'aller passer quelques jours à Tokyo pour prendre conscience du problème de la saleté des rues de Paris. Y a-t-il un déni de la question de la propreté au sein de la majorité socialiste à l'Hôtel de Ville et si oui, à quoi l'attribuez-vous ? Problème de moyens, de priorité, d'aveuglement idéologique... ?

Sur ce sujet, comme bien d’autres, Anne Hidalgo et sa majorité apparaissent en totale déconnexion avec le ressenti des Parisiens. La Maire de Paris a commandé une étude de 14 pages remise en février dernier pour savoir si Paris était sale, le tout pour 225.000 € ! Il suffit d’arpenter les rues de la capitale.

Ce déni exaspère les Parisiens pour qui les problèmes du quotidien ne sont absolument pas traités. C’est autant une question de moyens que d’absence de priorité politique. Depuis 2013, les recettes fiscales se sont envolées de 20 % et les tarifs municipaux ont augmenté de 6,4 %. Avec un milliard d’eurosde recettes supplémentaires, on pourrait s’attendre à ce que le service de la propreté soit dimensionné en conséquence des besoins.

Les ressources sont donc là, mais la gabegie est présente à tous les étages. Les dépenses courantes augmentent plus vite que l’inflation, 85 millions d’euros ont été perdus après l’annulation par le tribunal de la concession mal ficelée des panneaux publicitaires JCDecaux, le service Autolib’ annonce un déficit de 293 M€ à l’horizon 2023. On comprend à quoi sont occupés les 417 postes affectés à la communication. Les rats sont symptomatiques de ce laisser-aller. Aujourd’hui Paris ne consacre que 1,5 M€ par anpour lutter contre les rats ;rapporté au nombre d’habitants,New York y alloue 4 fois plus de moyens.

Vous avez présidé la mission d'information et d'évaluation (MIE) consacrée à la politique parisienne en matière de propreté qui a rendu un rapport en décembre dernier : quels sont les éléments concrets qui permettent de mesurer l'ampleur du défi au-delà du simple ressenti ? 

La mission d’information et d’évaluation que j’ai présidée pendant 7 mois, avec 15 élus de tous bords politiques, a permis de dresser un bilan incontestable de la politique de propreté. Depuis 2001, au fil des réaménagements de voirie, l’espace public a progressé de 30 % : cela fait donc plus de surface à nettoyer. Par ailleurs, 100 000 personnes supplémentaires viennent chaque jour travailler à Paris.

L’espace public est donc plus grand et plus utilisé, mais les moyens n’ont pas suivi. Le budget de la propreté a baissé de 11 % entre 2001 et 2017 alors que le budget général de la Ville a augmenté de 25%. Les effectifs de la direction en charge de la propreté ont été réduits et, aujourd’hui, un engin de nettoyage sur quatre est en panne.

Votre rapport préconisait 45 propositions assez consensuelles et qui ont été validées à l'unanimité par l'ensemble des groupes politiques municipaux. Vous êtes ensuite allée plus loin avec une proposition de délibérations en 3 axes prioritaires : quels sont-ils ? 

C’est effectivement inédit dans l’histoire des MIE parisiennes d’être parvenus à un accord global sur 45 préconisations pour moins salir d’une part et mieux nettoyer d’autre part. J’ai veillé à ce qu’on ne se perde pas dans les questions idéologiques qui n’apportent pas de réponse, commetel que l’éternel débat relatif à la privatisation ou non de la propreté.

Au final nous avons abouti à 45 mesures, partagées par l’ensemble des groupes politiques. Nous avons ainsi proposé que chaque arrondissement soit doté d’une brigade spécifique chargée de traiter les rues qui ne sont pas nettoyées tous les jours par les services de propreté, ou celles qui ont été salies entretemps. Nous avons demandé à compléter les corbeilles de rue existantespar des modèles plus efficaces ;l’actuelle a coûté la bagatelle de 3 M€ mais permet aux rats de se nourrir facilement. Il faut également déployer des sanisettes dans les lieux très fréquentés et installer des cendriers de rue.

La Maire de Paris s’est dite favorable aux 45 propositions. Mais aucune d’entre elles, je dis bien aucune, n’a trouvé de traduction concrète à ce jour.

Avec mes collègues du groupe LR et Indépendants quejepréside, nous avons proposé d’aller encore plus loin : accroître le nombre d’agents sur le terrain en renforçant les effectifs et en luttant contre l’absentéisme, louer des engins de nettoiement supplémentaires pour rompre au plus vite avec un parc d’engins totalement vétustes. Nous souhaitons à titre expérimental que les services de propreté soient placés sous l’autorité des maires d’arrondissement volontaires.

Vous réclamez un choc de propreté, mais la réponse d'Anne Hidalgo à Jack Lang ne donne pas fondamentalement l'impression que ce sujet fait partie de ses priorités. Qui ou quoi pourrait la faire plier sur le sujet ?

Madame la Maire de Paris a préféré demander à ses adjoints de répondre à Jack Lang, il est vrai que le Président de l’Institut du Monde Arabe ne fut que Ministre d’Etat. En dehors de propos franchement déplacés comme « ce doit être l’âge », je note qu’aucune réponse n’a hélas été apportée sur le fond. Tout est dit. Les électeurs seront juges en 2020.

Les dysfonctionnements s'accumulent sur le bureau de la maire de Paris avec notamment le fiasco de la dette AutoLib, pensez-vous que la droite ait une chance de reprendre la mairie de Paris ? Et quels seraient vos axes de bataille pour ne pas vous faire damer le pion par un candidat LREM ?

Les bévues s’accumulent : rapports de la CRC sur la mauvaise gestion de la ville, information judiciaire pour Paris-Plage, mise en examen de la Mairie de Paris pour la Grande Roue, annulation du contrat des panneaux publicitaires par la justice...Tout ceci coûte très cher aux contribuables parisiens et dessert considérablement l’intérêt général.

Je ne me réjouis pas du fiasco de Vélib ou d’Autolib car, au bout du compte, ce sont deux modes de transports alternatifs à la voiture polluante qui sont fragilisés. Au lieu de lancer une votation onéreuse sur un plan climat, dont les détails sont inconnus des Parisiens et qui a été votée par tous les élus parisiens, la ville ferait mieux d’utiliser son énergie pour que Vélib’ fonctionne.

Les grands dossiers qui intéressent le quotidien des Parisiens doivent être traités avec hauteur et pragmatisme : logement, mobilité, propreté, accès aux services publics, sécurité, attractivité économique et vitalité culturelle. Nous ne nous contentons pas de nous opposer et de dénoncer cequinefonctionne pas, nous travaillons à des solutions et proposons en permanence. Sur Vélib, nous avons imaginé un hackathon pour fiabiliser l’application mobile et nous avons également demandé la mise en place d’un guichet physique du service client par arrondissement.

Les élus du groupe LR et Indépendants sont pragmatiques et ouverts, à l’image de nos 9 maires d’arrondissement qui se battent pour défendre l’intérêt des Parisiens. C’est ce collectif qui fera la différence en 2020.

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