Présidentielle : le nombre d’indécis peut-il créer une surprise dans les urnes ce dimanche ?<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
France
Présidentielle : le nombre d’indécis 
peut-il créer une surprise 
dans les urnes ce dimanche ?
©

Volatilité

Selon les instituts de sondage, 30 à 37% des électeurs décidés à aller voter hésitent encore sur le bulletin qu'ils glisseront dans l'urne lors du premier tour, ce dimanche.

Atantico : L'UMP veut croire que les indécis constituent un réservoir de voix majeur pour Nicolas Sarkozy qui pourrait l'aider à remporter l'élection. Cette analyse est-elle crédible ?

Jérôme Fourquet : L’indécision touche à peu près toutes les formations politiques, avec néanmoins certaines spécificités. Les indécis sont les plus nombreux –proportionnellement parlant- dans l’électorat de François Bayrou et dans l’électorat de Jean-Luc Mélenchon. Ce ne sont donc pas des réserves plausibles pour Nicolas Sarkozy, dont l'électorat sera aussi très abstentionniste.

Eric Bonnet : Effectivement, des analystes, notamment Patrick Buisson, partent du postulat que la participation est toujours plus forte au deuxième tour qu’au premier. Alors que les sondages actuels prévoient l'inverse. Mais d'une part, ce n'est pas systématique – ce n'était pas le cas en 2007 – et d'autre pas, personne ne peut affirmer que les électeurs qui ne souhaitent pas donner leur intention de vote pour le second tour iront tous voter pour Nicolas Sarkozy.

Dans un récent sondage, on a demandé à ceux qui refusent de donner leur vote de second tour qui ils aimaient le moins entre François Hollande et Nicolas Sarkozy. Résultat, il y a plus de gens qui nous disaient moins aimer Hollande que Sarkozy. On peut donc imaginer que, s’il y a plus de participation au second tour, elle peut avantager un petit peu le candidat UMP. Mais pour le moment, le rapport de force et l’écart entre François Hollande et Nicolas Sarkozy montre que cela serait loin de suffire pour permettre à Nicolas Sarkozy de finalement l’emporter. Tout au plus réduirait-il l’écart mais ne pourrait lui faire rattraper son retard.

Jérôme Sainte-Marie : Je ne suis pas sûr que ce raisonnement sur le nombre d’indécis, plus élevé qu'auparavant, soit fondé. Quand j’observe les indécis ou les abstentionnistes, je n’ai pas spécialement un grand nombre parmi les sympathisants de droite. On observe chez ces électeurs un phénomène de démoralisation, qui a permis un transfert vers le FN.

Existe-t-il une volatilité particulière de l'électorat lors de cette présidentielle ?

Jérôme Fourquet  : Non. En 2007, Ifop avait établi que 22% des électeurs s’étaient décidés dans l’isoloir. Il ne faut pas raisonner en termes de clichés. Les 30% d’indécis ne sont pas un électorat totalement flottant et mobile qui, au gré des informations, va comme un seul homme choisir tel ou tel candidat.

Ce qu’on constate historiquement, c’est que les indécis qui hésitent entre deux candidats ne font jamais tous le même choix et le même arbitrage. Alors, évidemment, cela crée une ligne de partage des eaux imparfaite, car on n’a pas une moitié parfaite qui vote A et l’autre B. C’est cet écart qui peut expliquer les mouvements qu’on observe entre nos dernières photographies d’intentions de votes et ce qu’on relève lors du dépouillement du scrutin le dimanche soir.

Eric Bonnet : On estimait à 40% le taux d’indécis en juillet dernier. Aujourd’hui, chez BVA, on estime qu’ils sont à peu près à 25% à 30% - cette baisse est assez logique. Le taux d’indécis est à peu près comparable à celui qu’on observait en 2007.

Jérôme Sainte-Marie : La volatilité des indécis est limitée aux grands blocs politiques. Cela explique que la proportion d’indécis soit deux fois plus faible au second tour qu’au premier.

Comment expliquer les inversions de courbes dans les sondages lors de cette campagne ?

Jérôme Fourquet : Cela fait près d’un mois maintenant que Hollande et Sarkozy sont à un ou deux points d’écart. Selon les enquêtes, il peut y avoir une part d'indécis qui bougent et se prononcent pour Nicolas Sarkozy ou Marine Le Pen, François Hollande ou Jean-Luc Mélenchon, d'où des différences de score de 0,5 ou 1 point. Mais ce va et vient d'électeurs hésitants prend des proportions intéressantes dans la mesure où les deux candidats sont très proches en terme de niveau. Si Hollande avait cinq points d'avance et que son score variait d’un ou deux points, ça ne serait pas aussi commenté. Le problème c’est qu’ils sont très proches et que dès que l’un d’eux décroche un petit peu, on peut voir une inversion de courbe. Depuis un mois, les courbes se croisent et se décroisent – tout en restant toujours au même niveau- ce qui démontre la volatilité des voix.

Eric Bonnet : Au 1er tour on a effectivement François Hollande et Nicolas Sarkozy au coude à coude ; il faut donc prendre compte de la marge d’erreur (on peut être à 26 ou 28%). Cela pourrait faire passer l’un ou l’autre en tête. Depuis le début de la semaine, on observe que le Parti socialiste a communiqué en expliquant qu'il fallait casser la dynamique du candidat UMP, qui reprenait l'avantage dans les sondages. Cela a pu remobiliser les électeurs de gauche autour d’un vote utile et anti-Sarkozy. Et refaire passer François Hollande devant.

Jérôme Sainte-Marie : Ces changements de courbes sont dus au fait que les gens sont moins intéressés par la campagne – c’est paradoxal ! Et on ne voit pas la cristallisation logique de fin de campagne, comme en 2007. On est dans un cas qui ressemble beaucoup à celui de 2002 où l’on avait une progression des incertitudes qui aujourd’hui, en 2012, est une progression du désintérêt. En 2002, on se souvient encore de la surprise qui en avait résulté.

Peut-on craindre qu’un événement de dernières minutes secoue les électeurs et leurs votes, comme ce fut le cas avec l’affaire de « Papy Voise » à quelques heures du scrutin du 21 avril 2002 ?

Jérôme Fourquet : Quand on revient sur cet épisode-là, on se rend compte qu’il avait eu une influence limitée. Cela avait été assez fortement médiatisé car cela entrait en résonance avec le climat de la campagne. La thématique de l’insécurité était eu cœur de la campagne de 2002. Cette affaire n’était pas un coup de tonnerre mais plutôt quelque chose qui venait de plus loin.

Si on se replace dans la campagne de 2012, beaucoup ont glosé sur l’impact des événements de Toulouse et de Montauban, en nous disant qu’il y aurait un avant et un après dans la campagne. Mais finalement, cela n’a pas fait bouger les lignes… une campagne a des dynamiques électorales profondes et les événements comme celui de Toulouse n’ont pas réussi à la faire dérailler.

Eric Bonnet : Des événements peuvent toujours influer sur l’opinion. Si Israël attaque l’Iran ou qu’une crise brutale explose en Espagne ou en Grèce… Cela étant, l’affaire Merah, par exemple, n’a pas bouleversé les priorités des Français. En gros, la sécurité est une priorité qui arrive en 8e ou 9e rang. Les Français sont surtout intéressés par l’économie, le social, la crise. Un événement pourrait tout au plus modifier l’ordre d’arrivée, car certains candidats sont à égalité, mais il devrait être considérable pour que les deux premiers ne soient pas ceux qu’on observe aujourd’hui.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !