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Dernier débat avant le 1er tour : "L'absence des principaux candidats? Un vent de mépris
sur la démocratie"
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Maux croisés

Les candidats débattaient ce lundi soir sur le plateau de "Mots croisés". L’absence des cinq "principaux candidats" -remplacés par leurs porte-paroles- a été remarquée. L'illustration d'un vent de mépris sur la démocratie ?

Christophe Prochasson

Christophe Prochasson

Christophe Prochasson est historien et directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS).

Derniers ouvrages parus : L’empire des émotions. Les historiens dans la mêlée (Demopolis, 2008), 14-18. Retours d’ expérience  (Tallandier, 2008) et La gauche est-elle morale ? (Flammarion, 2010).

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Atlantico : Les dix candidats à la présidentielle ou certains de leurs représentants se sont livrés à un débat lundi soir dans l'émission télévisuelle Mots Croisés animée par Yves Calvi. S'agissait d'un débat de qualité et pourquoi ?

Christophe Prochasson : C’était le débat de trop. Les règles étaient cette fois-ci beaucoup trop rigides et corsetaient les candidats dans des discours stéréotypés. L’obsession de l’horloge s’est faite envahissante au point d’ailleurs d’atteindre un sommet comique quand le toujours réjouissant Philippe Poutou, plus que jamais enfermé dans son rôle de « ravi de la crèche », s’est penché au-dessus de son pupitre pour tenter de voir le temps qu’il lui restait.

A quoi s’ajoutait le statut assigné à ce débat par le dispositif que lui avait donné ses organisateurs : un débat en fin de soirée, s’achevant à une heure tardive, « rabaissé » au temps des émissions culturelles, et l’absence des cinq « gros candidats », ayant laissé la place à des doublures, aussi talentueuses puissent-elles être comme Madame Kosciuzko-Morizet. On peut même dire qu’un vent de mépris soufflait un peu sur la démocratie puisqu’on sentait bien qu’il y avait dès lors deux catégories de candidats: les importants, seuls légitimes, et les autres, gentils participants chargés de valoriser les meilleurs de la classe. C’est un peu gênant. Mieux vaudrait dès lors durcir les conditions de présentation dès le départ.

Quels candidats ont opéré la meilleure prestation et pourquoi ?

Il était vraiment difficile de percer dans ces conditions déplorables. Chacun était figé dans son rôle. Dès lors les plus « crédibles » ont été les plus pondérés, les autres étant renvoyés dans l’ordre de la caricature qu’accentuait la brièveté des interventions voulue par les organisateurs du débat. Bref ceux qui ne disaient rien ou pas grand-chose ont mieux passé l’épreuve car on cessait vite de les écouter sur le fond, emportés qu’on était par la douce musique de l’insignifiance. Il faut cependant reconnaître à Marielle de Sarnez une certaine pugnacité que ne contredisait pas une clairvoyance convaincante et sympathique. Dans un genre un peu décalé, un peu « oncle Cheminade », le candidat de nulle part a fait preuve d’une pédagogie assez efficace.

Quel a été selon vous le moment clé de cette émission ?

Du point de vue de l’intérêt propre des contenus, aucun pour les raisons que je viens d’évoquer : format et qualité des intervenants. En revanche, il y eut un moment de grande tension assez intéressant à suivre concernant les relations entre extrême droite et extrême gauche. On a pu constater que face aux règles médiatiques la dissidence révolutionnaire de l’extrême gauche rencontre toutes ces limites. Ni M. Poutou, ni Mme Arthaud, ni M. Delapierre, ce dernier pourtant représentant d’un candidat qui se fait fort de contrer les thèses du Front national, n’ont fait preuve d’une vive indignation face aux thèses intolérables de Florian Philippot sur l’immigration. Delapierre préférait égratigner Hollande. On aurait pu s’attendre à une grande colère voire à un geste plus radical, poussant peut-être à un départ du plateau. Mais, non, rien. Ces grandes consciences morales sont restées presque de marbre ; préférant éructer contre les marchés et les lois du Capital, en accord d’ailleurs avec le Front national sur ce point.

Ce dernier grand rendez-vous télévisuel est-il en mesure de bouleverser les résultats du premier tour ?

Certainement pas. Nulle découverte, nulle révélation ! Un cortège de poncifs qui n’ont rien apporté à une meilleure connaissance des candidats ou de leur programme.  C’était un spectacle triste et désolant qui invitait l’électeur à aller se coucher. Si surprise il y a au premier tour, ce débat n’y sera vraiment pas pour grand-chose. N’en parlons plus.

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