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Sarkozy, le pickpocket et la Rolex qui n'en était pas une
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A la bonne heure

Un badaud a tenté de voler la montre de Nicolas Sarkozy (une Patek Philippe) lors de son bain de foule ce dimanche à la Concorde. S'il voulait une Rolex peut-être aurait-il dû se rendre à Vincennes où un musicien du groupe Kassav en portait une alors qu'il jouait... en ouverture du meeting de François Hollande.

Grégory Pons

Grégory Pons

Journaliste, éditeur français de Business Montres et Joaillerie, « médiafacture d’informations horlogères depuis 2004 » (site d’informations basé à Genève : 0 % publicité-100 % liberté), spécialiste du marketing horloger et de l’analyse des marchés de la montre.

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Atlantico : Un individu, dans le bain de foule place de la Concorde de dimanche, aurait tenté de voler la montre de Nicolas Sarkozy. Est-ce inédit ?

Grégory Pons : Pour qu’un président se fasse voler sa montre, il faut qu’il participe à un bain de foule. Ce n’est pas à Jacques Cheminade que cela arriverait ! Je ne sais pas si c’est fréquent mais j’avais remarqué en 2007 que Georges Bush s’était fait voler la sienne par un Albanais pendant un bain de foule à Tirana.

Pour moi, il n’y a aucun doute : c’est bien un pickpocket qui cherche à voler la montre de Nicolas Sarkozy, une Patek Philippe. En agrandissant l’image, on voit bien qu’il appuie sur le cadran avec son pouce pour chercher à décrocher avec ses autres doigts le bracelet. Il s’agit d’une boucle déployante, plus facile à détacher qu’une boucle à ardillon classique.

En général, lorsque la victime d’un tel vol sent que sa montre se détache, il retire sa main … trop tard car elle reste dans la main du voleur. Là, Nicolas Sarkozy a réussi à garder la sienne et la glisse dans sa poche, comme si de rien n’était. Reste qu’il est intéressant de voir qu’un pickpocket peut tenter de braquer la montre de Nicolas Sarkozy sans qu’aucun de ses gardes du corps de remarque rien. La technique est d’ailleurs typique de pickpocket albanais, comme dans le cas de la montre de l’ancien Président américain : les services de police connaissent parfaitement cette méthode.

Vous dites que la montre de Nicolas Sarkozy n’est pas une Rolex mais une Patek Philippe...

Tout à fait. C’est doublement intéressant : toute la propagande des socialistes sur "Sarkozy, l’homme à la Rolex", ne tient pas la route puisqu’il n’en porte plus depuis cinq ans. Cette Patek Philippe, c’est un cadeau de Carla Bruni qui lui a offert dès la première année où ils se sont connus. Elle lui a également offert une Girard-Perregaux pour son anniversaire, deux ans plus tard. C’est une très belle montre qui vaut entre 30 000 et 50 000 euros là où la Rolex valait 6000 à 7000 euros.

D’ailleurs, l’un des musiciens du groupe Kassav’ qui animait le meeting de Vincennes de François Hollande, portait une Rolex au poignet. On pouvait aussi remarquer un magnifique drapeau cubain lors de ce meeting. Or qui étaient les plus fameux porteurs de Rolex de Cuba ? Fidel Castro et Che Guevara. Il y a une multitude de photos des grands leaders cubains avec des Rolex au poignet.

François Hollande, lui, n’a pas une belle montre, il n’y connaît rien et ne s’y intéresse pas. Il y a quelques temps, j’ai mené une enquête sur les parlementaires : tous me répondaient avoir une Swatch. Lorsque je me suis rendu sur place, on trouvait tout sauf des Swatch. Il y a un tabou social sur les montres. Les députés n’assument pas celles qu’ils ont au poignet qui sont plus facilement des Omega ou des Rolex. Parmi les socialistes, on trouve d’ailleurs des connaisseurs : Pierre Moscovici, le directeur de campagne de François Hollande, doit avoir pour 100 000 à 150 000 euros de montres de collections dans ses tiroirs. Jean-Christophe Cambadélis aussi. Et je ne parle pas de Julien Dray qui est connu pour ses montres à 30 000 à 40 000 euros.

La Rolex est d’ailleurs loin d’être une montre de luxe. C’est le bas de gamme dans cette catégorie. On considère en France que le segment luxe commence à 1000 euros. Mais dans le milieu des connaisseurs, on estime que c’est plutôt vers 10 000 euros. Les Rolex sont un cran au-dessous, entre 5000 et 7000 euros. Nicolas Sarkozy en portait une en 2007. Carla Bruni, qui est une vraie connaisseuse de montres, lui a appris ce que sont les belles montres.

La Rolex est devenue hautement symbolique, tout le monde s’y attache, pourtant c’est une belle connerie. Aujourd’hui, dans un dîner, l’idiot de base qui reconnait une Rolex s’enflamme en reprenant l’affaire Séguéla sans rien y connaître. La marque a d’ailleurs très mal réagi, elle n’a pas compris ce qui arrivait et n’a jamais tenté de corriger le tir en matière d’image.

Ce tabou sur les montres est-il propre à la France ?

C’était propre à la France mais cela commence à être une préoccupation dans tous les pays. Récemment, il y a eu une affaire en Russie. Le patriarche Kirill, qui est le père supérieur des orthodoxes russes, s’est fait prendre sur Internet avec une photo retouchée. Une photo a été publiée sur le site de l’Eglise orthodoxe … sans sa montre. Malheureusement, ils ont oublié d’effacer le reflet de celle-ci sur la table et un internaute l’a vu. Forcément, une Breguet a 30 000 euros sur un pope, ça fait tâche. Des émissions à la télévision russe avaient déjà repéré des bureaucrates censés être payés 1000 euros par mois qui avaient des montres à plusieurs dizaines de milliers d’euros.

Même chose en Chine, il y a plusieurs mois, où un blogueur a repéré les montres de tous les hiérarques du Parti communiste chinois. Curieusement, des personnes officiellement payées 500 euros par mois avaient des montres à 500 000 euros. Les photos ont rapidement disparu mais l’affaire a fait parler.

Cela montre qu’il y a une interrogation dans tous les pays sur les signes extérieurs de richesse des dirigeants. Autrefois, les grands de ce monde, dès qu’ils s’intéressaient aux montres, achetaient des modèles moyens de gamme comme des Rolex. Progressivement, les goûts se sont affinés pour des montres beaucoup moins connues mais beaucoup plus chères. Aujourd’hui, on demande d’avoir un minimum de vertu dans leurs choix horlogers.

Propos recueillis par Romain Mielcarek

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