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Nette baisse du moral des ménages en France. Merci qui (ou quoi) ?
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En berne

Selon les chiffres publiés par l’INSEE, « les ménages sont plus pessimistes qu’en janvier sur leur situation financière future : le solde correspondant perd 6 points et revient à son niveau de janvier 2015, bien au-dessous de sa moyenne de longue période ». Merci la hausse de la CSG ?

Michel Ruimy

Michel Ruimy

Michel Ruimy est professeur affilié à l’ESCP, où il enseigne les principes de l’économie monétaire et les caractéristiques fondamentales des marchés de capitaux.

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Selon les chiffres publiés par l’INSEE, « les ménages sont plus pessimistes qu’en janvier sur leur situation financière future : le solde correspondant perd 6 points et revient à son niveau de janvier 2015, bien au-dessous de sa moyenne de longue période ». Assiste-t-on à un effet CSG sur le moral des ménages ?

Le moral des ménages français est établi au travers d’un indice synthétique résumant l’évolution concomitante de plusieurs variables dont les mouvements sont très corrélés. L’INSEE établit cet indicateur à partir de 8 questions divisées en deux grandes catégories : l’une portant sur la situation personnelle des ménages, l’autre sur leur perception de l’évolution économique en général.
Les items abordés concernent les niveaux de vie passé et futur en France, la situation financière personnelle passée et future, le chômage, l’opportunité de faire des achats importants, les capacités d’épargne actuelle et future. Pour chaque question posée, un solde d’opinion est calculé par différence entre les pourcentages de réponses positives et négatives. 
Le niveau de ces soldes n’est pas directement interprétable. C’est pourquoi, les commentaires s’appuient sur leurs seules évolutions et écarts à la moyenne de long terme. Plus la valeur globale est élevée, plus le jugement des ménages sur la situation économique est favorable. Cet indice est, en quelque sorte, un indicateur avancé pour évaluer le niveau à venir de la consommation et, partant de là, celui de la croissance puisqu’en France, la consommation des ménages contribue pour près de 2/3 à la croissance. 
Alors que depuis la fin de l’automne dernier, le moral des ménages s’était fortement redressé, il a chuté, en ce mois de février, de 4 points pour retrouver sa tendance de long terme (100). Cet indice de moral a perdu ainsi tout le terrain gagné depuis quatre mois. 
Pour revenir à votre question, non seulement les ménages estiment que leur situation financière s’est dégradée dans un passé récent, mais ils sont aussi plus pessimistes qu’en janvier sur leur aisance monétaire future. Si le fait de signaler que cette baisse du moral intervient dans le contexte d’une hausse de la CSG et de la fiscalité sur le carburant et le tabac, le chiffre publié indique néanmoins que les Français semblent être déçus par les récentes réformes engagées par le gouvernement qui affectent, pour l’instant, leur pouvoir d’achat. Mais cela était attendu du fait d’un « effet de calendrier » des réformes fiscales engagées. 

Dans quelle mesure, cet effet pourrait-il avoir un impact sur l’optimisme actuel relativement à la conjoncture économique ? 

La conséquence directe de ce regain de pessimisme est que les Français risquent bien de serrer un peu plus les cordons de leur bourse en ce début d’année. En effet, la part des répondants estimant pouvoir épargner dans le futur chute également. 
Pour autant, il n’y a pas péril en la demeure, puisque, selon l’INSEE, la proportion de ménages jugeant qu’il est opportun de faire des achats importants est quasi-stable en février. De plus, le solde correspondant reste largement au-dessus de sa moyenne de longue période. 
Le gouvernement pourra aussi se rassurer en constatant que les ménages restent relativement optimistes sur l’évolution du chômage au cours des douze prochains mois puisque le solde correspondant est au plus bas depuis six mois.
Au final, le résultat publié par l’INSEE vient corroborer une étude réalisée par l’OFCE sur le budget 2018 d’Emmanuel Macron. Elle estime que les mesures fiscales auront un effet négatif sur le pouvoir d’achat en début d’année, puis positif en fin d’année. Elle confirme, ce que l’on sait déjà : les ménages les plus aisés seront les grands gagnants, cette année, des réformes en termes de niveau de vie et que les réformes devraient porter le pouvoir d’achat en 2019. En effet, les mesures qui devraient favoriser la consommation des Français devraient intervenir plus tard dans l’année. 

Le gouvernement a-t-il ainsi sous-estimé l'impact psychologique des mesures différées qu'il a pu mettre en place ?

Je ne le pense pas. Revenons à l’effet de calendrier dont j’ai parlé.
Il est certain que le transfert des cotisations maladie et chômage des salariés vers la CSG va impacter le pouvoir d’achat de ce début d’année. Le gouvernement a fait le choix d’une hausse de la CSG en une fois (le 1er janvier) alors que les baisses de cotisations auront lieu en deux temps (en janvier, puis à l’automne). En conséquence, l’État engrangera des recettes supplémentaires pendant quelques mois. A cela, s’ajoute un alourdissement de la fiscalité écologique, notamment via l’augmentation des prix de l’essence. Enfin, l’augmentation du prix de paquet de cigarettes pèsera aussi sur le porte-monnaie. L’empilement de ces mesures se traduira par un net recul du revenu disponible brut au premier trimestre 2018, avec un impact négatif sur le pouvoir d’achat.
Il y a donc, pour le gouvernement, une mauvaise période à gérer en termes de mécontentement.  Pour contrebalancer, cet effet, il se doit toutefois d’obtenir des résultats significatifs en termes de croissance économique et d’emplois. D’autant que les différentes mesures lancées par Emmanuel Macron s’annuleront entre elles et conduiront, sur l’ensemble de l’année 2018, à un impact quasi nul sur le pouvoir d’achat. En revanche, en 2019, les nombreuses réformes (revalorisation de la prime d’activité, « flat-tax » sur les revenus du capital…) devraient porter leur fruit et avoir un effet bénéfique sur le portefeuille des Français.

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