"Le Marchand de Venise" - Texte, mise en scène, scénographie, interprétation : Shakespeare au top <!-- --> | Atlantico.fr
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"Le Marchand de Venise" - Texte, mise en scène, scénographie, interprétation : Shakespeare au top
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Philippe Jousserand pour Culture-Tops

Philippe Jousserand pour Culture-Tops

Est chroniqueur pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).  Culture-Tops a été créé en novembre 2013 par Jacques Paugam , journaliste et écrivain, et son fils, Gabriel Lecarpentier-Paugam, 23 ans, en Master d'école de commerce, et grand amateur de One Man Shows.
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THEATRE
Le Marchand de Venise
De William Shakespeare
Adaptation et mise en scène de Ned Grujic
Avec Thomas Marceul ou Cédric Revollon, Julia Picquet ou Léa Dubreucq, Rémy Rutovic, Antoine Théry
INFOS & RÉSERVATIONS
Théâtre du Lucernaire
53, rue Notre-Dame-des-Champs
75006 Paris
Tél. : 01 45 44 57 34
         http://www.lucernaire.fr
Du mardi au samedi à 20h
Le dimanche à 17h
Jusqu’au 1er avril
RECOMMANDATION : EN PRIORITE
THÈME                                                                                                            
À Venise en 1596, l’armateur Antonio emprunte de l’argent pour le compte de son jeune ami Bassanio, amoureux de la belle et riche Portia. Bien qu’il déteste Antonio, Shylock, un vieil usurier juif, accepte de lui prêter 3000 ducats à la condition que si la dette n’est pas remboursée dans les trois mois, il sera autorisé à prélever une livre de sa chair ! Sûr de ses biens, Antonio signe le contrat, mais ses bateaux pris dans de fortes tempêtes ne reviennent pas. Shylock exige alors son dû.
POINTS FORTS
1) « Le Marchand de Venise » est l’une des pièces les plus riches, les plus palpitantes de Shakespeare ; c’est dire ! Elle mêle le tragique et la comédie, le drame et la romance. Elle brasse des sentiments violents et exacerbés : l’amitié, l’amour, la tendresse, la reconnaissance, le mépris, la haine, l’exclusion, la rancune… Savamment construite, elle tient par certains côtés du conte et ménage un suspens haletant jusqu’au rideau final. Est-ce pour souligner ce malstrom d’émotions que le metteur en scène Ned Grujic a choisi pour les quelques éléments de décor et les costumes, le noir et un camaïeu de rouge ? Rouge, la couleur des passions, du pouvoir et de l’honneur…
2) Mais la pièce est complexe, ambiguë même, et aujourd’hui délicate à manier. Au centre, la figure de cet usurier juif, Shylock. Il est le méchant de l’histoire, le scélérat, le rapace, celui que tous les personnages combattent, mais il est aussi le plus méprisé, le plus molesté, le plus outragé. Qu’il aspire à se venger n’est pas incompréhensible : il n’est que douleur et souffrance. Alors, pièce antisémite ou dénonciation du racisme à l’égard de tout un peuple ? Difficile de trancher. Bien sûr, Shakespeare offre à Shylock une superbe tribune dans le célèbre tirade de l’acte III où il rappelle que les Juifs sont des hommes comme les autres, mais alors pourquoi à la toute fin, pour le punir, Antonio l’oblige-t-il à se faire baptiser, comme si devenir chrétien consistait à rentrer dans le droit chemin ? Ned Grujic s’en sort avec doigté en disant dans le programme que la pièce donne à réfléchir sur « le vivre ensemble ». Oui, on peut la voir ainsi.
3) En resserrant la pièce et en se focalisant sur les quatre personnages principaux, Antonio, Bassanio, Shylock et Portia, Ned Grujic a fait des coupes sévères dans le texte, mais il a su garder l’essentiel, la moelle de l’argument. Outre son rôle, chacun des comédiens jouent tour à tour des personnages secondaires quand ceux-ci sont dispensables à l’action. Tous les quatre sont formidables ! Un véritable carré d’as.
4) Belle idée que la scénographie, une file de parallélépipèdes de verre (certainement des aquariums), enjambés par des maquettes de ponts vénitiens et remplis d’eau. Cette eau, omniprésente dans la pièce, figure les canaux de Venise, la mer qu’emprunte Bassanio pour rejoindre l’Île de sa bien-aimée Portia, les océans où se perdent les bateaux d’Antonio, mais aussi le hammam qui purifie et le baptistère qui clôt la pièce.
POINTS FAIBLES
Très (trop ?) sophistiquées, les lumières ne sont pas toujours au service des comédiens, et c’est dommage.
EN DEUX MOTS
Serrée et intense comme un expresso, la version raccourcie du « Marchand de Venise », signée Ned Grujic, est une vraie réussite. D’autant que ce noyau dur d’un des chefs-d’œuvre de Shakespeare est porté par quatre comédiens magnifiques.
UN EXTRAIT
Le mélancolique Antonio à son jeune protégé : « Je tiens cette vie pour ce qu’elle est, Bassanio, un théâtre où chacun doit jouer son rôle et où le mien est triste. »
L’AUTEUR
Le plus grand dramaturge anglais de tous les temps, William Shakespeare (1564-1616) a très certainement écrit « Le Marchand de Venise » entre 1596 et 1597. Pour cette comédie, il a dû s’inspirer de plusieurs contes et de la pièce de Christopher Marlowe « Le Juif de Malte » (1589). Il a situé l’action à Venise car la Sérénissime représentait à l’époque un exemple de démocratie cosmopolite et d’impartialité. Shakespeare a sûrement été aussi marqué par une sinistre affaire de son temps. Le Comte d’Essex avait en effet accusé le médecin de la reine Elisabeth 1ère, un Juif nommé Lopez, d’être un espion espagnol. Il fut pendu et écartelé. Le peuple, prenant fait et cause pour sa souveraine, multiplia alors les exactions contre les Juifs de Londres. Lopez pourrait bien avoir servi de modèle au personnage de Shylock.

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