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La neige, c’est beau, c’est blanc, c’est tentant... mais voilà pourquoi la manger est une très mauvaise idée
©Pixabay

A déguster avec les yeux

Avec se belle robe blanche, la neige qui tombe en ce moment à gros flocons sur la France aiguise les appétits. Mais en faire votre apéritif n'est pas franchement conseillé...

Emmanuel Adler

Emmanuel Adler

Emmanuel Adler est un expert environnement dans le cabinet qu'il a créé Aconsult. Il s'occupe de trouver des solutions pour des projets de traitement des eaux. 

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Atlantico : D’après une étude de l’université McGill, la neige agirait comme une éponge absorbant les toxines présentes dans l’air. Quelles sont ces toxines présentes dans la neige ? Comment s’incrustent-elles ?

Emmanuel Adler : La neige, qui est formée d’eau cristallisée à l’origine sous forme de vapeur, tombe des nuages où elle se forme jusqu’au sol où elle s’accumule plus ou moins en fonction de l’évolution des températures ambiantes. Parce que l’eau du flocon de neige provient d’une volatilisation de l’eau, sitôt après sa formation, sa teneur en éléments minéraux est très réduite. C’est en effet lors de son parcours au travers de l’atmosphère que le flocon va se charger en substances exogènes. Parmi les substances susceptibles d’être absorbées par les flocons de neige lors de leur descente sur le sol, peuvent être mentionnées les poussières et aérosols qui sont émis par les activités humaines (industries, transport…) et naturelles (volcans, feu de forêt…). 

Ainsi, les flocons de neige sont-ils potentiellement concentrés en éléments d’origine chimique comme en particulier les gaz de combustion. Cependant, sont également accumulables dans les flocons des micro-organismes de nature biologique (pollens, spores de champignons, bactéries, microalgues…).

Sur le plan de la santé, après avoir rappelé la leçon du savant Paracelse qui déclarait au 16ème siècle déjà que "tout est poison et que c’est la dose qui fait le poison", il est ainsi possible de détecter dans la neige des composés pathogènes qui, après ingestion et dans des conditions particulières, sont susceptibles d’engendrer des problèmes de toxicité en termes de santé humaine. Dans cette perspective, un récent article novateur sur la qualité de la neige à Montréal (Role of snow and cold environment in the fate and effects of nanoparticles and select organic pollutants from gasoline engine exhaust - DOI: 10.1039/c5em00616c) a ainsi démontré la présence de composés particulièrement nocifs produits par les activités de combustion (transport automobile et émission industrielles), comme par exemple le benzène à des concentrations de 52 µg/kg ou le toluène dosé à 380 µg/kg !

En résumé, il apparait donc que l’eau de pluie, comme la neige, agit lors de sa descente comme une éponge qui absorbe les polluants présents dans l’air. Une fois tombés au sol, les flocons qui s’accumulent vont progressivement fondre avec l’élévation des températures et ainsi libérer dans une solution aqueuse les divers polluants présents. La neige ainsi fondue va alors alimenter les cours d’eau et autres masses d’eau (lacs, mers…) qui constituent les milieux récepteurs, avec un risque possible d’accumulation, soit au niveau des organismes, soit des sédiments.


Pourquoi devons-nous éviter de consommer de la neige ? Quels sont les risques sur le corps humain ?

Puisque la neige présente une très faible minéralité, il n’est en général pas recommandé de boire l’eau issue de neige fondue, car l’organisme risquerait alors de se déminéraliser par excrétion des sels au niveau des urines. Mais néanmoins, compte tenu de la très faible pollution atmosphérique généralement observée en montagne, l’absorption par un skieur d’un peu de neige pour s’abreuver sur les pistes ne présente pas de risque. En revanche, au niveau des villes, caractérisées par des environnements gazeux le plus souvent contaminés, il n’est pas conseillé de manger la neige accumulée sur les trottoirs ou sur les voitures. 

En termes d’impacts sur la santé de la consommation alimentaire de neige en ville, il n’existe pas d’étude épidémiologique et les éventuelles pathologies susceptibles d’être engendrées n’ont fait l’objet d’aucune investigation.

A l’exception de possibles gastroentérites engendrées par des microorganismes, il est donc très délicat de poser la question des risques sur la santé humaine de l’ingestion de neige. Dans tous les cas, considérant les volume susceptibles d’être ingérés, on peut considérer ce risque comme très réduit.

Pouvons-nous constater une différence entre la consommation de la neige en ville et à la montagne ?

Comme indiqué plus haut, compte tenu de la grande différence de qualité entre les atmosphères urbaines et celles présentes en zone de montagne, il ne fait aucun doute que la neige des villes est bien plus sale que celle qui tapisse les sommets en hiver.

Dernier point à signaler : la neige, mémoire de la qualité de l’air, est un marqueur extraordinaire puisque des carottages réalisés au niveau des pôles, où la neige qui tombe s'accumule et ne fond pas, ont permis de retracer l’évolution du climat et des concentrations en divers polluants depuis plus de 500 000 ans !

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