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L’Europe face à une épidémie de solitude : et voilà pourquoi c’est un enjeu qui nous concerne tous
©DR

Des ministres dédiés pour changer la donne ?

En France, 1,5 million de personnes de plus de 75 ans seraient en situation d'isolement et 300 000 en situation de mort sociale.

Armelle de Guibert

Armelle de Guibert

Armelle de Guibert est déléguée générale des petits frères des Pauvres.

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Atlantico : Ce 17 janvier, Theresa May a nommé une secrétaire d'Etat chargée des personnes isolées ce qui a ouvert un débat dans tous les pays occidentaux chaque pays se demandant s'il fallait suivre l'exemple anglais. Combien de personnes sont touchées par l'isolement en France, l'exemple anglais est-il un bon exemple et comment expliquez-vous que cette question soit si peu traitée par les pouvoirs publics en France ?

Armelle de Guibert : Je ne sais pas si c'est ou non une très bonne initiative mais le simple fait d'en faire un ministère nous paraît positif. Qu'un Etat s'empare de la question de la solitude est forcément positif. La France avait déjà fait de la cause de l'isolement une cause nationale il y a quatre ans. Cela avait permis la démarche MONALISA (Mobilisation Nationale contre l'Isolement des Agés). Mais depuis, cette question est progressivement sortie du débat public et des préoccupations. Pour rappeler les chiffres, nous estimons qu'1,5 million de personnes de plus de 75 ans sont frappées par la solitude. Il y a 300 000 personnes âgées qui sont littéralement en situation de mort sociale, c’est-à-dire sans lien avec les réseaux habituels que sont les voisins la famille ou les associations. Il y a une vraie problématique mais il est difficile de donner un chiffre global sur l'isolement car les chiffres n'existent tout simplement pas et les méthodologies divergent entre les enquêtes, ce qui empêche le calcul.

 Nous avons laissé du temps au gouvernement pour s'installer et on aurait pu croire que c'était dans le projet de ce dernier de s'accaparer ce problème, cela aurait pu être fait par Mme Buzyn par exemple mais on s'est aperçu que la question de l'isolement n'est prise par personne. Et même en allant plus loin, la pauvreté (qui mène à l'isolement) est uniquement traitée sous l'angle des jeunes. 

Pourquoi cette question n'est pas traitée par les politiques ? Car ce ne sont pas des gens qui vont manifester. La solitude et l'isolement se vivent discrètement et sont généralement vécues comme une honte et les politiques n'en voient pas les conséquences sociétales.. Dans notre association nous voyons ces conséquences mais elles n'ont jamais été formellement mesurées.  Nous pensions que la médiatisation forte qu'il y avait eu grâce à notre rapport aurait entraîné une action des pouvoirs publics mais il n'en a rien été.

N'est-ce pas étrange dans nos sociétés avides de technologies qui visent à créer du lien social que l'on se retrouve incapables de lutter contre l'isolement ? Est-ce qu'il n'y a pas un problème de prise de conscience sur cette question de la part de la population ? 

Il y a un vrai problème de prise de conscience alors que des outils permettent de lutter contre l'isolement. 

On voit pour les personnes âgées que de ne pas disposer d'outils ou de ne pas utiliser les outils modernes comme internet ou les réseaux sociaux accroissent l'isolement. On lit beaucoup d'articles sur les jeunes déconnectés du lien social avec les écrans mais nous, dans notre étude commandée au CSA, nous nous sommes aperçus que les personnes âgées qui savaient utiliser Internet étaient celles qui étaient le moins isolées. Ces outils produisent du vrai lien social. 

Qu'on ne pense pas à proposer aux gens de nos familles qui sont plus âgées de nous rejoindre sur les réseaux sociaux alors que ces mêmes outils nous permettent de rester informé de tout ce qu'il se passe dans la famille est une faute. Alors que les réseaux sociaux et services de messagerie instantanée nous permettent d'avoir du lien social nous en excluons les plus anciens. Les plus pauvre n'ont pas accès non plus à ces outils et évidemment ne se manifestent pas.

Selon vous quelles seraient les grandes mesures que devraient porter les pouvoirs publics?

Si cette question doit de nouveau être portée auprès des pouvoirs publics il faut comprendre qu'il ne faut pas des moyens financiers nouveaux. De notre point de vue ce n'est pas en payant des gens que l'on va lutter contre l'isolement mais en rendant possible et en favorisant les initiatives des associations des voisins…

Il existe des initiatives pour lutter contre l'isolement mais qui sont le plus souvent isolées, le maillage entre ces démarches n'existe pas. Il y a des territoires qui échappent à la surveillance et peut-être d'autres où les initiatives sont trop nombreuses. L'Etat devrait soutenir ces coordinations, favoriser les conditions de l'engagement citoyen. 

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