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Quand le cancer frappe une deuxième fois
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Récidives

Une étude menée par l'université de médecine du Texas pointe du doigt le risque accru pour les patients ayant déjà survécu à un cancer d'en développer un deuxième.

Louis Dubertret

Louis Dubertret

Louis Dubertret est dermatologue-cancérologue. Chef de service émérite en dermatologie à l'hôpital Saint-Louis, il fut également président de la Société française de photobiologie. 

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Atlantico : Une étude menée par l'université de médecine du Texas pointe du doigt le risque accru pour les patients ayant déjà survécu à un cancer d'en développer un deuxième. Comment expliquer ce phénomène ?

Louis Dubertret : Un cancer c'est la rencontre entre un facteur environnemental et une éventuelle fragilité génétique. Lorsque l'on est exposé au tabac toute sorte d'organes sont agressés et opèrent des mutations. Autre exemple, lorsque l'on est agressé par le soleil la peau subi des mutations. Et de temps en temps, ces dites mutations sont mal réparées et cela peut donner lieu à un cancer.

A partir du moment où l'on a eu un cancer cela veut dire que l'agression subie a été tellement forte que l'on n'a pas été capables de tout réparer et cela veut dire que peut se développer, dans un autre organe un autre cancer, qui n'a rien à voir avec le premier mais qui a un lien d'une part avec le capital génétique mais aussi avec l'intensité de l'agression subie.

Il y a  eu aussi pendant très longtemps, il y en a encore mais de moins en moins, des traitements qui, pour tuer les cellules malignes créent des lésions sur les cellules saines. Il s'agit là d'une agression également de notre patrimoine génétique capable de favoriser également la venue d'un nouveau cancer. C'est le cas très connu en dermatologie de l'Hydréa. Les gens traités par hydréa ont un risque plus important de développer un cancer de la peau. Certains traitements afin de sauver la vie des gens peuvent entraîner une fragilité qui peut à son tour éventuellement favoriser l'apparition d'un autre cancer. Les traitements immunosuppresseurs lors des greffes d'organes également.  C'est bien pour cela qu'il y a des protocoles de surveillance extrêmement précis mis en place pour chacun de ces traitements.

Aux Etats-Unis seulement un tiers des patients qui sont en rémission totale depuis plus de cinq ans sont encore suivis par des spécialistes. Qu'en est-il du suivi en France ?

Je ne connais pas les chiffres exacts mais il me semble que l'on se situe plutôt en dessous qu'au-dessus de cela. Ce qu'il faut bien comprendre c'est que lorsque vous avez eu un cancer c'est quelque chose de très angoissant et que la surveillance que vous faites est elle aussi très anxiogène. Chaque fois que vous retournez en consultation, tous les six mois, tous les ans ou tous les trois mois au départ vous vous demandez si les médecins ne vont pas retrouver quelque chose. C'est une agression très importante qui est très mal vécue et au bout d'un moment lorsque tout va bien les gens aspirent à laisser tout cela derrière eux. Le problème c'est que la meilleure prévention reste la surveillance. Non seulement pour les cancers mais aussi pour tous les troubles métaboliques.

Le cancer vous donne le sentiment que la vie est fragile et que tout peut s'arrêter du jour au lendemain. La surveillance est très angoissante à cause de la peur de rechuter. Mais il faut comprendre que la surveillance permet de détecter au plus tôt d'éventuels problèmes et permet de les traiter beaucoup plus facilement.

Il faut insister sur le fait que la surveillance est efficace importante et doit être prolongée même si elle est angoissante. Le rôle du médecin est de faire en sorte que la surveillance ne doit pas être un poison dans la vie quotidienne. C'est de la responsabilité du médecin d'aider les patients à supporter une surveillance qui doit être sans angoisse excessive.

Comment les médecins peuvent justement rendre ce suivi moins angoissant ?

Lorsqu'il y a  un vrai dialogue médecin-malade qui prend beaucoup de temps, (ce qui  est déjà un vrai problème technique) et que les choses sont bien expliquées en prévenant le malade que la surveillance va être pénible pour lui tout en lui disant que l'on va faire en sorte que ça le soit le moins possible et qu'il peut parler de cette angoisse librement, à ce moment-là ça se passe beaucoup mieux.

Mais il faut du temps, de l'attention, connaître le caractère de son patient également. Le triptyque du médecin interrogation explication et négociation à appliquer avec le patient est indispensable et ne sera jamais remplacé par aucune médecine numérique qui se développe actuellement.

Aujourd'hui ce dialogue est de plus en plus développé et de gros efforts sont faits dans ce sens. La prise de conscience des praticiens est faite depuis longtemps déjà. L'attention s'est recentrée sur le patient comme étant l'acteur principal plus que la maladie contrairement à ce qu'il se faisait pendant la plus grande partie du XXe siècle.

Le fait de s'occuper mieux des patients est aussi une économie. Si vous prenez plus de temps pour vous en occuper cela va faire que les malades vont beaucoup mieux suivre le traitement, le suivi, l'observance sera meilleure, il y aura moins de complications et in fine les coûts de santé vont diminuer.

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