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"Play" : un enchantement
©Théâtre des Abbesses

Atlanti Culture

Dominique Poncet pour Culture-Tops

Dominique Poncet pour Culture-Tops

Dominique Poncet est chroniqueuse pour Culture-Tops.

Culture-Tops est un site de chroniques couvrant l'ensemble de l'activité culturelle (théâtre, One Man Shows, opéras, ballets, spectacles divers, cinéma, expos, livres, etc.).
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BALLET

« PLAY »

d’ALEXANDER EKMAN

 PAR LE BALLET DE L’OPERA DE PARIS

INFORMATIONS

OPERA DE PARIS – GARNIER

Place de l’Opéra

75009 PARIS

Réservations: 0892289090

www.operadeparis.fr

En alternance

Jusqu’au 31 décembre

RECOMMANDATION

EN PRIORITÉ

THEME

- Alexander Ekman avait annoncé qu’il allait surprendre…Il a tenu  parole ! Conçu comme un processus expérimental, Play est une aventure de groupe menée tambours battants, pour une petite quarantaine de danseurs. La fantaisie y côtoie la grâce, qui elle même se déploie à travers  une gestuelle d’une  folle énergie, qui, elle même, semble se rire de la pesanteur, qui… On l’a compris, Play a été conçu comme une ronde joyeuse  pour susciter chez le spectateur mille et une sensations, qui vont s’enchaîner, se superposer, ou se mélanger.

- La première partie est vouée au blanc immaculé. Après un  réjouissant trio de cuivres en guise d’ouverture, quand le rideau se lève, tout, en scène, est immaculé : costumes, éléments de décors,  tenues, aussi, des musiciens sortis de la fosse et juchés  sur une estrade placée au fond  du plateau.  Tout  est blanc donc, exceptés  le pull orange vif d’un danseur et les   balles vertes qui viendront, par milliers, inonder le plateau et avec lesquels les interprètes « joueront » comme s’il s’agissait d’un « élément » . Jouer, oui le mot est juste  ici, tant la chorégraphie est ludique. Que ce soit dans les scènes de groupes, les solos ou les duos, il y a beaucoup d’innocence, de naïveté, de cocasserie et d’humour dans cette partie, qui fait irrésistiblement penser à l’enfance, son innocence et  son espièglerie.

 - Après l’entracte, la seconde partie est l’exact contraire de la première. Tout est sombre, gris et noir.  Cette fois, sans  aucun doute, ce sont les adultes  qui ont pris possession du plateau. Ou plus exactement, les travailleurs de notre société industrielle.  La gestuelle évoque la soumission à l’autorité, la répétitivité des gestes dans le travail,  l’obsession des horaires et du calendrier, l’enfermement et l’individualisme. On pense aux Temps Modernes de Chaplin, ou à Play Time de Jacques Tati. C’est  percutant, virtuose, drôle aussi par moments, mais plus incisif, plus raide, plus mécanique que dans la première partie. A la fin, restera un seul danseur, qui se dévêtira (pas complètement). Image splendide de la solitude de l’homme face à l’éternité.

POINTS FORTS

- Quelle bonne idée que celle d’Aurélie Dupond d’avoir commandé une pièce à Alexander Ekman. Le  nouvel enfant terrible de la danse a joué le jeu en choisissant de créer, sur mesure, pour le Ballet de l’Opéra  de Paris. Trois mois d’improvisations et de propositions avec  trente-sept des  cent cinquante danseurs  de la troupe, mélangés sans distinction de leur grade, pour aboutir à ce Play, interprété à la perfection, et qui mêle mouvements d’ensemble, duos et solos. Cette pièce, qui s’étend sur toute la soirée et emprunte à tous les vocabulaires chorégraphiques, foisonne d’idées.  Elle est spectaculaire, acrobatique, cocasse, aérienne par moments, à d’autres, très ancrée, mais de bout en bout, énergique. Elle  fait exulter les corps. La joie des danseurs contamine la salle.

- C’est fou, aussi,  les trouvailles  visuelles de ce Play. Une forêt de cubes blancs qui montent  et descendent des cintres  jusqu’à servir de mini estrades aux danseurs  pour des solos très spectaculaires; la fosse d’orchestre transformée en piscine  qu’on remplit presque à ras bord de 60.000 balles de plastique vert ; d’énormes ballons blancs lancés sur le public, et pour sa plus grande joie, à la fin du spectacle… Tout flatte l’œil et l’égaie…

- L’oreille  aussi est enchantée, grâce  à la partition du Suédois Mikael Karlsson.  Pour ce Play, le compositeur désormais  attitré d’Alexander Ekman, a concocté  une étonnante  musique électro-jazz, sur laquelle vient par moments s’ajouter la voix envoûtante de la chanteuse de gospel Calesta « Callie » Day.

POINTS FAIBLES

Quel bonheur  de dire qu’on n’a détecté aucune faute dans ce spectacle, ni de goût, ni d’interprétation. Tant pis pour les grincheux, qui trouveront  peut-être qu’il manque un peu d’inventivité dans l’écriture. Ici, ce qui prime, c’est le jeu, l’élan et le travail de troupe.

EN DEUX MOTS

Le moins qu’on puisse dire c’est qu’Alexander Ekman n’a pas raté son entrée au répertoire de l’Opéra de Paris. Il n’est qu’à entendre les ovations et les cris de joies des spectateurs à l’issue de chaque représentation. Play porte la troupe à son meilleur, soulève, par sa beauté, son inventivité, son humour aussi, perceptible jusque dans sa noirceur.

On n’attend qu’une chose : le retour de Ekman à Garnier.

UN EXTRAIT

 « Alexander nous demande beaucoup d’improviser, de travailler sur la spontanéité. Il nous donne une idée, une sensation, un rythme, un début de mouvement et nous le développons ensemble…Cette façon de travailler implique de ne pas être dans la répétition, mais dans le moment présent. C’est assez intimidant. Si Alexander fait preuve d’une grande auto-dérision, il est extrêmement respectueux des danseurs ». ( Stéphane Bullion, Etoile du Ballet de l’Opéra).

LE CHOREGRAPHE

Né le 12 janvier 1984 à Stockholm,  Alexander Ekman est l’une des personnalités les plus bouillonnantes de la scène chorégraphique contemporaine, l’une des plus créatives aussi. Ce qui n’est pas surprenant de la part  de ce danseur-chorégraphe  suédois qui s’est réapproprié  le «  Etonne moi » lancé par Jean Cocteau à Serge Diaghilev lorsque  ce dernier créa sa compagnie.

Alexander Ekman, qui a dansé au Nederlands Dans Theater puis chez Cullberg, est un petit surdoué, derrière lequel se dissimule un travailleur infatigable.

En 2005, il avait reçu le Premier prix au Concours chorégraphique international d’Hanovre. En 2011 il était parti travailler comme professeur et chorégraphe à la Julliard School de New York.

Créée en 2010, sa pièce  Cacti a été reprise par quinze compagnies. Quant à son Lac des Cygnes, écrit en 2014, il a fait le tour du monde.

Connu pour son sens du rythme et son humour décalé, Alexander Ekman a déjà collaboré avec plus de quarante-cinq compagnies dans le monde, dont La Compañia Nacional de Danza à Madrid, le Ballet de l’Opéra de Vienne ou encore le Ballet national de Norvège. Un record pour un créateur qui n’a que 33 ans !

Play est sa première création pour l’Opéra de Paris.

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