De nouvelles études montrent que même une activité physique tout à fait limitée a un impact positif sur la santé<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Santé
De nouvelles études montrent que même une activité physique tout à fait limitée a un impact positif sur la santé
©Reuters

Compter ses pas

Deux études des universités d'Harvard et Karolinska indiquent qu'une faible activité physique aurait des effets encore plus positifs que ce qu'on le pensait jusque-là.

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet

Stéphane Gayet est médecin des hôpitaux au CHU (Hôpitaux universitaires) de Strasbourg, chargé d'enseignement à l'Université de Strasbourg et conférencier.

 

Voir la bio »

Atlantico : Deux nouvelles études, conduites par des chercheurs de Harvard et de l'institut Karolinska (Stockholm) ont tendu à prouver que l'activité physique "légère" est encore meilleure pour la santé que ce que l'on quantifiait jusqu'alors. Quels sont les grands enseignements de ces études et comment expliquer les écarts de résultats avec les précédentes études ?

Stéphane Gayet : Les grands enseignements de ces études sont que le corps humain vieillit plus mal et plus vite quand il est statique. C’est un peu comme si notre corps s’usait davantage quand il bougeait peu. Des activités banales et peu coûteuses en efforts, comme le fait de passer l’aspirateur ou celui de promener son chien, apportent, selon ces deux études complémentaires, un réel bénéfice sur le plan de la santé en général et notamment celui de la prévention des maladies chroniques, des cancers et de la mort prématurée. On savait déjà depuis plusieurs décennies que l’activité physique régulière était bénéfique à l’état de santé et avait de ce fait un effet protecteur vis-à-vis des risques de maladies chroniques dégénératives, notamment cardio-vasculaires et métaboliques. C’est lié au fait que le travail musculaire et articulaire a des effets favorables sur le métabolisme général et même sur le psychisme. On en connaît de mieux en mieux les mécanismes, mais bien des processus biochimiques restent à préciser. Depuis l’âge de 25 ans, un très lent phénomène de vieillissement commence pour chaque individu. C’est inéluctable et l’on peut dire qu’un compte à rebours vers la mort s’initie à cette époque de la vie. Or, ces études nous apprennent que toute activité physique même modérée contribue à ralentir ce vieillissement : les sujets les plus actifs ont une baisse de 50 à 70 % de la mortalité par rapport aux sujets les moins actifs et les plus sédentaires.

Cette prévention concerne également les maladies cancéreuses. C’est l’occasion de préciser qu’il a été montré que l’allaitement diminuait le risque de cancer du sein et que l’activité sexuelle diminuait le risque de cancer de la prostate. Il faut encore rappeler que les efforts psychiques réduisent le risque de maladie dégénérative du cerveau, de type démence ou autre. Tous les organes de notre corps sont conçus pour fonctionner et leur sous-utilisation les fait vieillir. Le fait de rester inactif entraîne une diminution du volume et donc de la force des muscles, ainsi que des capacités de l’appareil pulmonaire. Du reste, c’est également le cas de certaines machines qui s’abiment plus quand elles ne servent pas : les mécaniciens d’automobile disent qu’une voiture qui ne sort pas de son garage s’use plus que si elle était utilisée modérément. Cet adverbe modérément est là pour redire qu’il ne faut pas tomber dans l’excès inverse. Une machine utilisée de façon intensive s’use beaucoup et le sport de compétition use également le corps d’une façon accélérée.

Les écarts avec les précédentes études s’expliquent ainsi : elles reposaient essentiellement sur des déclarations d’activité physique. Or, il est difficile d’exprimer objectivement ce que nous faisons sur ce plan. Certaines personnes surestiment cette activité, d’autres la sous-estiment. Au contraire, ces deux études récentes reposent sur des enregistrements, donc des données objectives. En effet, I-Min Lee et ses collègues de Harvard ont envoyé des bracelets enregistreurs d’activité à plus de 16 000 femmes américaines, qui les portaient 15 heures par jour pendant quatre jours ou plus. Les chercheurs ont ensuite suivi ces femmes pendant une moyenne de 2,3 ans pour recueillir leurs données de mortalité. Les Suédois ont donné des dispositifs similaires à 851 sujets, dont près de 400 hommes, qui les ont portés pendant 14 heures ou plus sur quatre jours ou plus par semaine. Ces sujets ont été suivis pendant 14,2 ans. En d'autres termes, une étude a observé un nombre impressionnant de sujets, tandis que l'autre étude a surveillé des sujets pendant un nombre impressionnant d'années. Bien que différant un peu sur le plan de la méthode et des résultats, les deux études se sont avérées concordantes pour l’essentiel. Les deux ont conclu au fait que les sujets qui ont beaucoup bougé ont bénéficié d'un avantage de longévité substantielle par rapport à ceux qui ont peu bougé. C’est encore un apport considérable des nouvelles technologies numériques.

Pour autant est-ce qu'avoir une activité physique "modérée" permet de s'exempter d'une pratique plus intensive ?

Ces études ont montré qu’il était important et même vital de bouger. Le fait de bouger beaucoup contribue à se maintenir en bonne santé et à prévenir bien des maladies chroniques. Ce qui compte, c’est de lutter contre la sédentarité, au pire l’oisiveté et la quasi immobilité. Les enfants, préadolescents et adolescents américains qui passent des heures dans leur chambre devant leur écran en mangeant à longueur de journée sont très menacés. Ils finissent par avoir beaucoup plus de matière grasse que de muscles et ont un risque élevé de développer un diabète de type 2, porte ouverte à de nombreuses maladies dégénératives et cancers. Ils représentent une situation extrême qui est plus qu’inquiétante. Une activité physique modérée leur serait pourtant déjà très bénéfique. Mais leur confort de vie les conduit à une forme de paresse qui est donc très néfaste pour leur santé.

Le gros apport de ces deux études est de déculpabiliser celles et ceux qui ne parviennent pas à inscrire dans leur agenda des séances d’activité physique plus poussée, comme la pratique de la natation, du vélo, de l’équitation, du jogging ou encore de la marche rapide. Car ces activités d’un niveau supérieur par rapport à la simple marche à vitesse normale apportent davantage sur le plan du bien-être, de la santé et de la prévention des maladies notamment cardio-vasculaires mais aussi psychiques. Avec ces activités physiques plus poussées que le simple fait de bouger, il y a un effet appréciable sur l’humeur et la vitalité, que l’on explique en particulier par une stimulation de la production de substances appelées endorphines. La pratique régulière d’un sport de niveau amateur est bonne pour le moral comme pour le tonus général et musculaire. Ce qui revient à dire que, grâce à ces deux études, on sait qu’il existe à présent deux niveaux d’activité physique régulière bénéfique : un niveau de base qui consiste à bouger tout au long de la journée et qui a déjà un effet préventif avéré ; un niveau plus élevé qui consiste à avoir une activité physique demandant plus d’efforts et qui a de plus un effet sur le bien-être et le tonus général.

A partir de quel degré d'intensité une activité physique devient bénéfique pour la santé selon vous ?

Les spécialistes en médecine physique nous apprennent que, pour qu’une activité physique régulière apporte un réel bénéfice sur le bien-être et le tonus général, il faut qu’elle soit pratiquée régulièrement, au minimum une fois par semaine, et qu’elle s’accompagne, soit d’une sudation, soit d’un essoufflement, bien sûr modérés. Il ne s’agit pas de s’épuiser à l’effort, ou alors les effets risquent d’être au contraire défavorables. En d’autres termes, il est important de faire des efforts supérieurs à ceux que l’on fait dans la vie quotidienne.

Mais l’intérêt de ces deux études est de montrer qu’une activité physique modérée dans le cadre d’une vie active et donc non sédentaire est déjà bénéfique pour la santé, et c’est là une très bonne nouvelle. Le confort de vie que nous apporte notre société industrielle et consumériste nous pousse à éviter les efforts dans la vie courante. Le fait d’aller faire ses courses en marchant plus de 250 mètres, de monter les escaliers à pied, sont deux exemples de possibilités d’activité physique modérée dans la vie de tous les jours. Si l’on peut et si l’on veut en faire plus, la pratique de la bicyclette ou de la natation sont deux excellentes activités. Elles font travailler beaucoup de muscles, surtout la seconde et elles se pratiquent dans de grands espaces largement aérés. C’est l’occasion de dire qu’il est également important de sortir de chez soi pour se trouver au grand air et au soleil, ce qui est favorable à l’état de santé. Le jogging est une autre bonne activité, mais il fatigue plus les articulations et il est à proscrire en présence de certaines maladies articulaires, tout particulièrement celles de la colonne vertébrale, dont la hernie discale lombaire.

Pour conclure, on peut retenir qu’il est vital de bouger beaucoup tous les jours, car cela contribue à nous maintenir en bonne santé, à prévenir bon nombre de maladies chroniques et de cancers, à augmenter notre espérance de vie. La sédentarité et qui plus est l’oisiveté et la quasi immobilité sont des situations morbides et pathogènes. À un niveau plus élevé, la pratique régulière d’une activité sportive de niveau amateur, telle que la bicyclette ou la natation, est encore meilleure à condition de s’accompagner d’efforts inhabituels, mais tout en restant raisonnable.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !