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"Balade Nationale" : Pas toujours facile pour une BD d'avoir des objectifs très ambitieux...
©Bouffesdunord.com

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Dominique  Clausse pour Culture Tops

Dominique Clausse pour Culture Tops

Dominique Clausse est chroniqueur pour Culture Tops

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BD
Balade Nationale, tome 1, les Origines
de Sylvain Venayre, Etienne Davodeau
Ed. La Revue Dessinée, la Découverte
165 p, dont 112 pour la BD.
22 €

RECOMMANDATION : BON

THEME

L’historien Jules Michelet, Jeanne d’Arc, Molière, Marie Curie et Dumas Père volent le cercueil de Pétain à l’île d’Yeu, pour l’enterrer quelque part en France et en faire un symbole. Un symbole de quoi ? Cela reste assez mystérieux.

Ce point de départ étrange traduit bien l’esprit de cette bande dessinée, qui s’inscrit dans un projet ambitieux de l’historien grenoblois Sylvain Venayre, d’une histoire de France en Bandes Dessinées, en 20 volumes, chaque volume devant être réalisé par un couple « historien-auteur de BD » différent.

Ce premier tome tente de répondre à une question complexe : quelles sont les origines de notre pays ?

POINTS FORTS

Le graphisme de Davodeau et la science historique de Venayre.

Le point fort essentiel est que l'on sort de cette lecture plus intelligent qu’on y est entré. Et je devrais dire « de ces lectures », car l’ouvrage gagne à être relu plusieurs fois, pour laisser le texte de Venayre nous imprégner. Le trait de Davodeau est sans surprise, ce qui, au regard du talent de cet auteur, est un vrai gage de qualité. Au fil de ces 112 pages, il manie avec bonheur une fausse simplicité du coup de crayon et une vraie finesse d’exécution.

Les personnages historiques sont bien campés, tels qu’on les imagine avant même d’avoir ouvert cette Bande Dessinée. Michelet, meneur de cette revue improbable, nous distille ses commentaires d’historien, dont on imagine qu’ils sont en résonnance avec ceux qu’aurait pu faire Venayre lui-même.

A travers quelques endroits symboliques visités au cours de cette balade nationale (Carnac, Paris, Reims, Strasbourg ou encore Gergovie), Venayre pose très joliment le débat sur les origines de notre pays. Et son double virtuel, Michelet, donne du corps aux différentes hypothèses et controverses évoquées. Ainsi, tous deux nous permettent d’enrichir notre culture aussi bien d’idées profondes que d’anecdotes savoureuses. 

POINTS FAIBLES

Problème: la lecture de ces 112 pages est un peu ennuyeuse, car on passe de saynètes en saynètes, sans ce qui fait le sel d’une bonne BD, c'est à dire une bonne histoire. Dans celle-ci, la grande Histoire mange la petite, celle qui donne envie au lecteur de tourner la page pour savoir ce qui va se passer.

La bande dessinée était-elle le bon support pour cette ambition ? Concilier l’intelligence historique et l’attrait scénaristique conduit presque obligatoirement à privilégier par rapport à l’un à l’autre. Et Davodeau donne l’impression de courir en permanence après l’histoire, en essayant de donner du rythme à un enchaînement d’anecdotes qui se succèdent, sans obtenir au final l’enthousiasme du lecteur.

Cette série qui commence est un peu le miroir inversé d’une autre célèbre collection, qui allumera peut-être une étincelle de nostalgie dans l’œil des lecteurs les plus âgés de cette chronique : l’histoire de France en Bandes Dessinées des éditions Larousse. Truffée d’erreurs historiques, cette série a pourtant fait rêver toute une génération d’enfants, car elle privilégiait la flamboyance et le cliché.

EN DEUX MOTS

Crève-cœur ! voilà les deux mots de conclusion. Deux ingrédients savoureux ne font hélas pas une bonne recette. On a envie d’aimer cette BD, tellement belle en intention et en érudition, mais on reste sur sa faim. Attendons tout de même la suite, car la série, malgré ces quelques réserves, reste prometteuse, et les prochains tomes devraient être plus narratifs et donc plus faciles d’accès.

UN EXTRAIT

Un dialogue pour évoquer la naissance des romans graphiques …:

- MICHELET : « Et tout le monde était bien convaincu que les images permettaient d’apprendre quelque chose aux enfants.

- JEANNE D’ARC : - Pas qu’aux enfants ! A tous ceux qui ne savaient pas lire. A mon époque ils étaient très nombreux.

- MICHELET : - Oui, au Moyen-Age, les images des églises, les vitraux, les sculptures servaient notamment à apprendre l’histoire sainte aux fidèles analphabètes."

LES AUTEURS

- Auteur talentueux, Etienne Davodeau  a réussi à faire exister le social en bandes dessinées sans jamais ennuyer. Il faut lire, au moins, « Les Mauvaises Gens » et les « Ignorants ». 

Les Mauvaises Gens, ce sont les habitants des Mauges, cette région de l’ouest de la France, dont il est originaire. Et l’histoire est celle de ses parents. Non racontable ici, mais enthousiasmant. 

« Les Ignorants » raconte la rencontre improbable entre un Vigneron et un auteur de Bandes Dessinées. Si vous aimez le vin et les bulles, précipitez-vous chez votre libraire pour acheter cet ouvrage, vous ne pourrez pas le regretter.

- Sylvain VENAYRE est agrégé d’histoire à l’université de Grenoble, et fondateur du LUHCIE, Laboratoire Universitaire Histoire Cultures Italie Europe. Un des passages de la Balade Nationale, un détour par la ville de Bourg Saint Maurice, très intéressant d’ailleurs, semble attester de cette couleur alpine.

Parmi ses nombreuses publications, il faut retenir son ouvrage paru au Seuil, "Les Origines de la France" : en dix brefs chapitres, suivis d’une petite anthologie, cet essai examine les théories qui tentèrent d’élucider le mystère des origines de la France.

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