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Rentabilité en berne : entreprises françaises cherchent pouvoir d’achat désespérément
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Appel d'air

Le taux de marge des PME et TPE françaises est tombé fin 2011 à son niveau le plus bas depuis 1985. Une rentabilité en berne qui témoigne de la faiblesse de l'économie française, asphyxiée par une pression fiscale et administrative qui n'a cessé d'augmenter depuis trente ans.

Hervé Lambel

Hervé Lambel

Hervé Lambel est candidat à la présidence du Medef et co-fondateur du CERF (Créateurs d'emplois et de richesse en France).

D’une lignée d’entrepreneurs, il est diplômé de l’EPSCI (Essec). Il entre en 2000 à la CGPME, puis fonde en 2003 le CERF, dont il devient Président et porte-parole en 2004. Il fait notamment partie des premiers lanceurs d'alerte sur la crise économique et les problèmes de trésorerie des entreprises. Il est également le créateur d’HLDC, société de service et d’investissement.

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L’Insee annonce la chute du taux de marge des entreprises à son plus bas niveau depuis 1985, alors que les entreprises du CAC 40 annoncent de très bons résultats. Et certains de s’en alarmer. A juste titre, parce que ce sont dans ces autres entreprises, les TPE et les PME, que se créent traditionnellement les emplois, témoignant de leur dynamisme. Normalement.

Mais avec des finances publiques au plus mal, cette annonce, si elle n’est en rien étonnante pour qui accompagne les TPE au quotidien, est une mauvaise nouvelle, car elle permet de comprendre à quel point les marges de manœuvre sont quasiment inexistantes. Et elle justifierait à elle seule plus de responsabilité dans la course à la présidence qui se déroule sous nos yeux en oubliant de mettre au cœur de la campagne les entreprises qui créent la richesse et rendent la solidarité possible. Par pour faire plaisir à leur dirigeants, ni à leurs salariés, mais bien parce que c’est là, et nulle part ailleurs que se jouera la sortie de crise ou la plongée dans les abîmes.

A titre d’exemple, cette faiblesse des marges des entreprises interdit toute proposition d’augmentation obligatoire des salaires et en particulier du SMIC, sous peine de dégrader mécaniquement encore plus la situation, c’est-à-dire mettre en péril, quand elle ne les détruira pas directement, l’appareil de production et les emplois qui y sont liés. Toute promesse de politique économique ou toute stratégie politicienne qui passerait par une telle mesure serait parfaitement irresponsable et suicidaire parce qu’elle conduirait moins de six mois après sa mise en œuvre à l’augmentation des défaillances d’entreprises et du chômage. Avis aux électeurs et aux candidats…

En juin 2007, le Cerf lançait un cri d’alerte sur "le pouvoir d’achat asphyxié des TPE", repris quelques mois plus tard par Jean-Paul Betbèze dans un article des Echos, insuffisamment relayé mais qui s’alarmait déjà de la rentabilité des entreprises au regard du niveau de leurs taux de marge, d’épargne et d’autofinancement.

Ainsi, le revenu d’activité des patrons a stagné de 2000 à 2005 et, après une légère hausse au milieu de la décennie, on attend la confirmation de son recul au cours des dernières années. On sait déjà que 13% des patrons (hors auto-entrepreneurs) déclarent un revenu négatif ou nul, soit près de 400 000 sur une population de 3 millions. Leur revenu moyen est modeste : 1890 € par mois. Une économie dont les patrons gagnent si peu témoigne de la faiblesse de ses entreprises et de son économie. Nul doute qu’elle a des soucis à se faire pour son avenir et sa croissance. Malheureusement, cette réalité est masquée par le déni des organisations patronales et les discours démagogiques véhiculés par des syndicats qui préfèrent agiter les rémunérations de managers qui n’ont jamais été patrons.

Au regard de cet état de fait, le débat sur la compétitivité des entreprises françaises semble dépassé, tant c’est leur survie même qui est posée dans un environnement qui leur est hostile. La France souffre plus de ses faillites que de ses délocalisations : ne détient-elle pas le taux de défaillances le plus élevé de tous les pays comparables ? Dans ces conditions, on comprend plus aisément la nécessité pour certain d’aller chercher les conditions de leur survie ailleurs. Car la faiblesse des marges, résultant d’une pression fiscale et sociale accru due à une dépense publique inconsidérée et irresponsable, empêche les entreprises de s’adapter, d’investir, d’évoluer pour répondre aux exigences du monde dans lequel elles évoluent. En France, ce n’est pas le marché qui tue les entreprises, et c’est ce qui rend la chose particulièrement insupportable et révoltante.

Depuis 30 ans, la pression fiscale et administrative s’est accrue sur les entreprises, en même temps que d’autres acteurs économiques sont venus accaparer la marge des plus petits. L’exemple des banques est le plus frappant, dont la mutation d’agent financeur de l’économie à celui de commerçant, les a conduites à devenir un des principaux capteurs de cette marge par des produits inadaptés pour les entreprises, mais générateurs de frais profitables pour elles, fragilisant au passage la trésorerie des entreprises, celle-là même qui finance l’activité au quotidien. C’est bien cette mécanique infernale à l’œuvre en 2008 qui a conduit notre économie à une crise sans précédent malgré des entreprises aux carnets de commandes plein ! Pire, les frais bancaires, dans un environnement économique dégradé, ont joué un rôle d’amplificateur et d’accélérateur de la diffusion de la crise.

En Allemagne, dont on vante la réussite des entreprises, ces dernières sont dans une situation différente des nôtres : leur marge a progressé de presque 30% sur la période 2000-2008, quand elle stagnait en France… et reculait pendant les années de crise.

Déjà en 2007, la solution s’imposait comme une évidence, comme le soulignait Jean-Paul Betbèze : "Il faut donc que la marge brute augmente, que la pression fiscale baisse et que des formes nouvelles de financement de la croissance soient trouvées."Aujourd’hui, il faut poursuivre les chantiers de simplifications et de rationalisation qui doivent permettre de baisser les prélèvements sur les entreprises sans peser sur les comptes de l’Etat, il faut induire un changement profond dans la politique commercial des banques en matière de frais bancaires, il faut conserver des épargnants et des investisseurs en France et orienter leurs placements vers l’économie réelle et donc les entreprises. Avec un préalable : la baisse de la dépense publique. Des volontaires ?

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