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Centre commerciaux : le gouvernement veut donner aux maires la possibilité d’en refuser l’installation en périphérie mais ils continueront d’accepter
©Reuters

Coup d’épée dans l’eau

Face à la multiplication de projets de constructions de grands centres commerciaux en périphérie, l'exécutif songe à donner un veto aux maires pour stopper leur création.

Arnaud Gasnier

Arnaud Gasnier

Arnaud Gasnier est Maître de Conférences en géographie et aménagement à l'université du Mans.

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Atlatico : Face à la multiplication de projets de constructions de grands centres commerciaux en périphérie, l'exécutif songe à donner un veto aux maires pour stopper leur création. Qu'apporterait la mise en place d'une telle mesure ? Est-elle vraiment utile? 

Arnaud Gasnier : Si on arrivait à freiner l'urbanisme commercial, ce serait déjà une grande avancée car depuis 10 ans on n'arrive pas à l'arrêter. Il y a une forte création de surfaces commerciales depuis 10 ans qui, il faut bien le dire, profite à tout un tas d'acteur à commencer par les acteurs politiques. Les maires sont les premiers à déplorer cette envolée déraisonnable des surfaces commerciales mais en même temps ce sont les premiers à en céder assez, à donner les autorisations d'installation aux distributeurs ou aux investisseurs. Du côté des collectivités territoriales, il y a toujours des attentes de retombées, que ce soit en taxe foncière, création d'emplois ou même en gain d'image pour les communes avec l'arrivée de telle ou telle marque internationale qui viendrait renforcer l'animation de l'espace public ou transformer les communes périphériques en pôle de centralité. Il y a beaucoup d'enjeux politiques dans les AEC (Autorisation d'Exploitation Commerciale). De ce constat, je ne crois pas vraiment à ce pouvoir des maires qui diraient non à des implantations surtout en période de crise économique où l'on recherche toujours la création d'entreprises, l'augmentation des emplois…

Il y a une certaine hypocrisie des maires qui est liée aussi a une position territoriale toujours très concurrentielle. Même si aujourd'hui les lois de la réforme territoriale élargit de plus en plus le pouvoir du politique nous sommes toujours en France confronté à une sorte de concurrence territoriale. Vous êtes maire d'une commune vous avez peur que le maire voisin signe avec Ikea et que vous perdiez un possible pôle d'attractivité.

Très concrètement quel est le problème avec la création de centres en périphérie de la ville ? N'est-ce pas un moyen de dynamiser des périphéries longtemps privées d'attractivité ?

Le premier problème intervient au niveau de la conception de la ville : on est toujours dans l'urbanisme moderne. On ne créé que des zones monofonctionnelles au lieu de créer des quartiers, des quartiers connectés aux flux physiques de circulation mais aussi aux flux numériques. Il serait temps de commencer à penser ce qu'on va faire de nos entrées de ville. Est-ce qu'on va continuer de les laisser se monofonctionaliser et voir se développer de la friche commerciale et artisanale comme on le voit depuis 10 ans ou est-il temps de penser à des opérations de requalification urbaine, des opérations de renouvellement urbain où on réfléchirait à des zones beaucoup plus multifonctionnelles connectées.

Autre problème de ces centres commerciaux, le problème économique qui est un problème d'équilibre. Il faut savoir que 80% des créations de surface commerciale se font en périphérie. Se pose un problème d'équilibre entre les centres des agglomérations et les périphéries. Il ne faut pas s'étonner des lors de voir se développer la vacance commerciale dans les centres villes et les quartiers centraux.

Les commerçants indépendants non franchisés seraient d'accord de voir arriver un centre commercial mais plutôt en centre-ville ou en péricentrale mais pas forcément en périphérie car il y aura une attractivité de clientèle qui se fera aux dépens de ces petits commerçants. Le centre commercial peut être un levier d'attractivité pour les centres villes à condition de disposer de disponibilités foncières.

Ces dernières années, les projets de "mall" à l'américaine se multiplient dans des zones périphériques mais tous peines à être rentable. Pourquoi cette frénésie persiste? A qui cela profite-t-il?

Cela profite essentiellement aux investisseurs. Ils savent très bien que les collectivités territoriales donne=nt les autorisations de permis de construire; Les distributeurs sont prêts à louer de plus en plus cher des locaux commerciaux qui rapportent paradoxalement de moins en moins. Pourquoi ? Car il y a une très forte concurrence depuis 10 ans avec l'envolée des surfaces commerciales. Nos marchés sont saturés on le voit bien et les distributeurs n'ont pas d'autres choix pour palier le rendement au mètre carré que de multiplier les enseignes au niveau national voir international.

A long terme c'est dangereux car on s'aperçoit que la grande distribution est entrée dans une bulle financière depuis 10 ans qui est en train de se creuser depuis déjà trois, quatre ou cinq ans. La preuve, la vacance se développe aujourd'hui en périphérie également.

Cette bulle spéculative a fonctionné depuis une dizaine d'année car l'investissement était moindre dans le logement et dans le bureau que dans le commerce. Les investisseurs se sont lancés dans de grandes opérations à l'époque. Aujourd'hui la tendance s'inverse et on peut penser que la frénésie des Malls va freiner. Depuis deux-trois ans il y a un peu moins de projet. Aujourd'hui les investisseurs de l'immobilier commercial essayent de plus en plus de pérenniser leur projet plutôt que d'en créer des nouveaux.

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