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Pourquoi la défense française n’a rien à attendre de l’Europe
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On se débrouille

La semaine qui vient de s’écouler a été riche d’informations sur l’état de nos armées. Dans la continuité du rapport de la Cour des Comptes du 29 septembre 2014 sur l’état de disponibilité de nos équipements militaires, le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire (HCECM) a rendu public le 6 octobre un rapport préoccupant sur les limites de nos moyens et la faible volonté de renouveler leurs contrats pour nombre de nos personnels engagés.

Les Arvernes

Les Arvernes

Les Arvernes sont un groupe de hauts fonctionnaires, de professeurs, d’essayistes et d’entrepreneurs. Ils ont vocation à intervenir régulièrement, désormais, dans le débat public.

Composé de personnalités préférant rester anonymes, ce groupe se veut l'équivalent de droite aux Gracques qui s'étaient lancés lors de la campagne présidentielle de 2007 en signant un appel à une alliance PS-UDF. Les Arvernes, eux, souhaitent agir contre le déni de réalité dans lequel s'enferment trop souvent les élites françaises.

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Au même moment, la Belgique a claqué la porte au nez de la France qui proposait d’étudier la candidature du Rafale pour remplacer leurs avions F-16 ; preuve de notre incapacité à pénétrer les marchés de la zone OTAN.

Soyons clair, notre défense est en grande difficulté et nos autorités ne veulent pas le voir. Le 27 septembre dernier, le président de la République s’est prononcé pour la création d’une force européenne d’intervention, avec doctrine et budget communs. De fait, la défense européenne est devenue le pont aux ânes de tous ceux qui, à Paris ou à Bruxelles, croient encore que nos insuffisances stratégiques vont être compensées par un appel à une politique européenne de défense, mais ces incantations ne débouchent sur aucune réalisation pratique autre que la création d’un service supplémentaire de fonctionnaires bruxellois.

En réalité, et c’est une première limite à la crédibilité de l’Europe de la défense, les Etats de l’Union ne peuvent pas compter sur elle en cas de crise stratégique.

Dans les faits, la défense européenne n’avance pas d’un pouce et les Etats membres de l’Union en proie à des menaces internes ou externes ne trouvent aucun soutien de Bruxelles lors de crises stratégiques majeures, de l’Espagne laissée seule face au Maroc lors de la crise de l’île du Persil de juillet 2002 jusqu’à Chypre menacé d’intervention militaire par la Turquie en septembre 2011 du fait de son rapprochement avec Israël et de ses projets gaziers offshore.

A l’exemple des pays d’Europe centrale ayant rejoint l’Union en 2004, nombre d’Etats membres ont pris conscience de leur solitude en cas d’action militaire et la faiblesse des soutiens enregistrée par la France au Mali et en Centrafrique tendrait à accréditer la thèse selon laquelle la défense européenne n’existe décidemment pas.

Or, ce n’est pas exact, l’Europe de la défense a un nom, elle s’appelle l’OTAN ; elle a même un chef, ce sont les Etats-Unis. Pire, depuis l’échec de la création de la Communauté européenne de Défense en août 1954, jamais les Etats qui constituent l’Union européenne n’ont été aussi loin de réaliser ce qu’ils ne cessent d’appeler de leurs vœux, c’est-à-dire la création d’une véritable Europe de la défense dotée d’un commandement unique, sans recourir à un grand frère extérieur.

Deuxième limite, des Etats européens comme la France ou l’Allemagne ont battu des records de vente d’équipements militaires, mais les Etats européens restent les champions de l’achat sur étagère, si possible « made in America ».

Les Européens ont un véritable talent pour se tirer une balle dans le pied et n’ont nul besoin des Russes ou des Américains pour rendre le concept de l’Europe de la défense ridicule ; ils le font très bien par eux-mêmes. Nos dirigeants considèrent que la défense européenne doit être un palliatif à notre faiblesse collective en matière de stratégie, d’armement et de doctrine, mais ils oublient que pour exister et être forte, la défense européenne doit éviter de construire sur du sable et des budgets de défense qui, dans la majorité des Etats européens, ne sont même pas capables de s’aligner sur les normes minimales proposées par l’OTAN.

La liste est longue des programmes de coopération échoués et des marchés nationaux de défense remportés par des industriels américains peu désireux de laisser une place à leurs concurrents de l’ancien monde, loin de l’idée d’Europe de l’armement.

Airbus a perdu le marché imperdable des hélicoptères polonais ? C’est bien sûr la seule faute des Américains, en oubliant que, d’une part, les Polonais sont incapables de tourner la page du 1er septembre 1939, et que, d’autre part, les revendications sécuritaires des uns et des autres, face à la menace de l’est ou de celles du Sud, sont parfaitement incompatibles avec les moyens qui peuvent être mis en ligne par les Etats européens d’un bout à l’autre du continent, faisant donc naître incompréhensions et rancœurs de tous les côtés.

Face à une telle impuissance, affaiblir notre défense comme cela vient d’être fait en 2017 met durablement en péril notre sécurité. Dans le projet de loi de finances discuté par le Parlement, le gouvernement d’Edouard Philippe annonce pour 2018 une hausse du budget de défense de 1,6 milliard d’euros. Bluff ou réalité ? 2018 sera bien l’année où ces ambiguïtés seront levées. Si rien ne vient modifier la tendance à la baisse des budgets de défense, les Français devront en tirer toutes les conséquences, car, pour ne citer que celle-là, la menace islamiste est tout sauf en recul aujourd’hui en Europe.

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