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D’un président transgressif à l’autre : pourquoi la transformation à la Macron n’a pourtant pas grand chose à voir avec la rupture à la Sarkozy
©JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP

Même combat ?

Malgré l'utilisation d'un langage familier, les deux présidents sont difficilement comparables.

Samuel Pruvot

Samuel Pruvot

Diplômé de l’IEP Paris, rédacteur en chef au magazine Famille Chrétienne, Samuel Pruvot a publié "2017, Les candidats à confesse", aux éditions du Rocher. 

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Atlantico : Pourquoi dire que Emmanuel Macron fait du Sarkozy, c'est s'arrêter à l'outrance verbale et non aux causes de celles-ci ? Qu'est-ce qui fait que Nicolas Sarkozy et Emmanuel Macron ne prononcent pas ces "dérapages" pour les mêmes raisons ?

Samuel PruvotPartons du commencement et au commencement était le verbe… On attend du président de la République une certaine tenue. Y compris verbale. Il y a dans cette fonction suprême un aspect quasi sacré. Dans le régime conçu par le général de Gaulle,  le monarque républicain ne peut s’exprimer comme le commun des mortels. Faute de quoi, il prend risque de briser son aura magique acquise au prix du suffrage universel. Quand Nicolas Sarkozy lance « Casse-toi, pauv' con ! » en réponse à une personne refusant sa poignée de main au Salon de l'agriculture, il transgresse. Sur le fond et sur la forme. C’est un coutumier du fait. Déjà ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy aime chahuter ses interlocuteurs. Voire les insulter s’ils lui résistent. En 2007 Azouz Begag rapporte par exemple une conversation surréaliste au téléphone : « Tu te fous de mon nom... Tu te fous de mon physique aussi, je vais te casser ta gueule !" 
Mais il va de soi que les outrances verbales d’Emmanuel Macron ne sont pas exactement les mêmes que celles de son prédécesseur. Tous les deux parlent « vrai » mais pour des raisons différentes. Nicolas Sarkozy est par nature un volcan qui laisse échapper régulièrement le magma qui l’habite. La moindre résistance peut réveiller en lui une nouvelle éruption. Quand il négocie avec les responsables musulmans pour la création du conseil français du culte musulman, il sort vite du diplomatiquement correct. A un moment, il promet carrément à ses interlocuteurs de les enfermer jusqu’à temps qu’ils tombent d’accord. Il avance en force. Physiquement et verbalement. Tel n’est pas le profil d’Emmanuel Macron qui est un homme tout en contrôle. Chaque transgression fait partie d’une stratégie politique préméditée et anticipée.

En quoi la rupture à la Sarkozy n'a-t-elle rien à voir avec la rupture à la Macron ?

Ils sont jumeaux mais en apparence seulement. Pourquoi ? Le premier n’a pas à se faire violence pour bousculer les règles de bienséance. C’est un voyou chez les élites, un génial bandit qui s’est introduit dans la haute bourgeoisie. Chez Emmanuel Macron, c’est différent. Il incarne justement la réussite  des élites à la française. Il va de hauteur en hauteur en séduisant ceux qui peuvent lui ouvrir les portes du pouvoir économique ou politique. C’est un séducteur, un diplomate, un beau parleur charismatique. Quand il parle vrai, il s’encanaille. Quand Nicolas Sarkozy dérape, il est lui-même, jubilant et fier de bousculer les petites grandeurs républicaines. Le premier est un catcheur des mots, le second plutôt un escrimeur.

Qu'est-ce qui malgré tout rapproche les deux hommes ?

Nicolas Sarkozy et Emmanuel macron sont de faux jumeaux. Tous les deux sont des météores de la vie politique française. Ils sont arrivés au sommet à la force de leur poignet. Ils ne sont pas des héritiers mais bien des conquérants. Ils vouent l’un et l’autre un culte à la liberté comprise dans le sens d’une autodétermination. Ils forgent leur destin et prétendent forcer les portes de l’Histoire.
L’un et l’autre sont des non conformistes. A plusieurs titres. Ils partagent entre eux une transgression commune concernant la laïcité à la française. Sarkozy et Macron ne croient pas à une séparation stricte et étanche entre le religieux et le politique. Ils croient au contraire que la loi 1905 est une tolérance religieuse qui place les religions au cœur de la cité et de la vie politique. On dira qu’ils sont américains et cela n’est pas entièrement faux. Le discours de Nicolas Sarkozy au Latran a fait couler beaucoup d’encre. Mais celui d’Emmanuel macron à l’occasion des 500 ans de la Réforme est du même bois. Tous les deux estiment que le religieux ne peut être enfermé dans le domaine privé, dans la seule conscience, loin de la vie publique.

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