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Voilà comment, moi aussi, je me suis radicalisé !
©Reuters

Benoît akhbar…

J'ai mis du temps. Même que parfois ça a été besogneux. Mais enfin c'est fait.

Benoît Rayski

Benoît Rayski

Benoît Rayski est historien, écrivain et journaliste. Il vient de publier Le gauchisme, maladie sénile du communisme avec Atlantico Editions et Eyrolles E-books.

Il est également l'auteur de Là où vont les cigognes (Ramsay), L'affiche rouge (Denoël), ou encore de L'homme que vous aimez haïr (Grasset) qui dénonce l' "anti-sarkozysme primaire" ambiant.

Il a travaillé comme journaliste pour France Soir, L'Événement du jeudi, Le Matin de Paris ou Globe.

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La tribu des radicalisés est riche de plusieurs sous-espèces. Il y a le radicalisé qui part pour la Syrie ou l'Irak. Il y a le radicalisé qui en revient pour jouir en France d'un repos bien nécessaire. Il y a le radicalisé qui refuse de toucher un volant après qu'une main de femme se soit posée dessus. Il y a le radicalisé fiché. Le pas fiché. Le radicalisé modéré. Le radicalisé connu. Le radicalisé inconnu qui mérite un tombeau. Mais pas sous l'Arc de Triomphe où la place est déjà prise…

Tous autant qu'ils sont, ils ne devraient pas la ramener. Ils n'ont fait aucun effort pour devenir ce qu'ils sont devenus! Ils ont été aidés. Soutenus. Financés. Cajolés. Qui en allant sur des sites spécialisés. Qui en écoutant ses copains de la cité. Qui en buvant la parole de certains imams. Moi, au contraire, j'ai consenti un gigantesque et solitaire effort. Car je me suis radicalisé tout seul. Grâce à une profonde et difficile introspection. Sans avoir besoin des béquilles du tout-venant des radicalisés.

J'ai commencé à me radicaliser au moment de l'affaire Merah. Avant qu'on ne découvre la véritable identité du tueur, un journal - Libération -  se réjouissait bruyamment en relayant une rumeur comme quoi les assassinats étaient l'œuvre de militaires d'extrême droite. Et quand le nom de Mohamed Merah éclata dans sa sanglante lumière, il y a eu un cri dans cette réaction : "Merde c'est un Arabe!". Ca m'a énervé. Et un peu radicalisé.

Quand après la tuerie de Charlie Hebdo, nous fûmes inondés d'eau bénite, j'ai mis un imperméable. Des grosses gouttes tombaient sur moi. Elles faisaient un bruit insupportable : "tous unis", "tous frères", "tous ensemble, musulmans, chrétiens, juifs". Je me suis encore énervé. Et je me suis radicalisé un peu plus.

Puis est arrivé le Bataclan. Le sang des assassinés n'était pas encore sec que j'ai entendu une clameur: "tous en terrasse", "vous n'aurez pas notre haine". L'énervement a cédé sa place à la colère. Et j'ai franchi une étape supplémentaire dans ma radicalisation.

Au moment de l'abominable tuerie de Nice, des journaux bienveillants m'ont fait savoir avec insistance que parmi les victimes il y avait des musulmans. L'auteur du crime, un islamiste fanatisé, les avait-il tués parce que musulmans? Les journaux en question n'ont pas éprouvé le besoin de se le demander. Mon énervement est allé croissant. Ma radicalisation aussi.

Quand j'ai lu sur les réseaux sociaux que l’assassin des deux femmes à Marseille était un "martyr" je me suis étonné. Un texte signé par Sonia Nour, militante communiste et conseillère municipale dans le 93. Elle a ajouté qu'elle ne comprenait pas pourquoi on faisait tout un plat de ces deux femmes alors qu'il y en avait tant qui mourraient sous les coups de leur conjoint ou de leur compagnon. Alors ma colère a cédé sa place à la rage. Et ma radicalisation est devenue brûlante.

Depuis, d'égorgement en égorgements, de couteaux en kalashnikov, de sabres en ceintures d'explosifs, j'entends après chaque tuerie : "pas d'amalgame". C'est répétitif, oppressant et insupportable. Ainsi je me suis définitivement radicalisé. Maintenant, je suis un bon petit soldat du califat. Un fiché F. Mon califat c'est la France. Même si je n'ai pas prêté allégeance au calife actuel…

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