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Pourquoi n’a-t-on pas encore vu d’extraterrestres : le paradoxe de Fermi d’hier et d’aujourd’hui
©Reuters

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Cinq scientifiques nous entraînent bien au-delà des sciences, vers une réflexion sur la place de l’Homme dans l’Univers et une prise de conscience des enjeux qui entourent la question de l’épuisement de nos ressources. Alexandre Delaigue, coauteur du livre "Où sont-ils ? Les extraterrestres et le paradoxe de Fermi" se confie à Atlantico

Alexandre Delaigue

Alexandre Delaigue

Alexandre Delaigue est professeur d'économie à l'université de Lille. Il est le co-auteur avec Stéphane Ménia des livres Nos phobies économiques et Sexe, drogue... et économie : pas de sujet tabou pour les économistes (parus chez Pearson). Son site : econoclaste.net

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Atlantico : Vous avez participé à l'écriture d'un livre :"Où sont-ils ? Les extraterrestres et le paradoxe de Fermi". Pourquoi se poser aujourd'hui la question de la vie extraterrestre ?

Alexandre Delaigue : La question de l’existence d’extraterrestres est très ancienne, à la fois dans la littérature et parmi les scientifiques. C’est à la fois une vraie question scientifique, matérialisée dans le « paradoxe » exprimé par le physicien Enrico Fermi : si l’on essaie d’estimer le nombre potentiel de civilisations extraterrestres, on trouve qu’il devrait y en avoir, or nous n’en avons jamais rencontré. Résoudre ce paradoxe a donné lieu à de multiples hypothèses, évoluant au rythme des découvertes scientifiques et de tentatives pour entrer en contact avec d’éventuelles autres civilisations, comme le programme SETI ou la sonde Voyager. Ce livre est l’occasion de faire le point sur ces progrès scientifiques.

Dans le même temps, la question des extraterrestres a toujours été l’occasion de réflechir à notre propre civilisation, notre place dans l’univers, notre avenir. La science-fiction a souvent été un artifice littéraire pour évoquer des questions très concrètes sur l’humanité. Et le paradoxe de Fermi pose deux questions qui nous concernent : peut-être que l’apparition de civilisations est très rare, beaucoup plus rare que nous ne le pensions, ce qui ferait de l’humanité moderne une exception remarquable à l’échelle de la galaxie. Ou alors, peut-être que la civilisation technologique n’est pas soutenable, qu’elle apparaît brièvement mais disparaît très rapidement, épuisant ses ressources ou sombrant dans des conflits destructeurs à peine des armes suffisamment destructrices découvertes. Ces deux questions sont au cœur de l’actualité, que ce soit la soutenabilité de notre modèle de développement à un âge de réchauffement climatique et d’effondrement de la biodiversité, ou des conflits avec la dissémination nucléaire et le terrorisme.

Vous dites : "l’état général et presque permanent de l’humanité a été la stagnation économique et technique, et que notre époque et notre niveau technologique, relèvent d’une situation réellement exceptionnelle". Quelles sont les facteurs ayant permis, ces dernières décennies, cette croissance technologique ?

Le développement économique est à l’échelle de l’existence de l’humanité une exception. Notre espèce existe depuis 300 000 ans, pendant lesquels elle est restée au stade de chasseurs-cueilleurs. L’agriculture n’existe que depuis environ 10 000 ans, et la révolution industrielle depuis 200 ans environ. Le temps du progrès technologique et de la croissance économique a été, à l’échelle de l’existence de l’humanité, très court.

Qu’est-ce qui a changé et créé la situation actuelle ? C’est l’une des plus importantes questions de l’histoire économique et nous n’en avons pas la réponse complète. Après tout de nombreux pays sont encore aujourd’hui très pauvres, ce qui montre que le développement économique est loin d’être compris et maitrisé ! On connaît les caractéristiques de la révolution industrielle : le développement à un rythme de plus en plus rapide d’innovations technologiques, tandis que la population augmentait, mais moins vite que le progrès économique, ce qui nous a permis d’éviter la trappe malthusienne dans laquelle nous avions été pris pendant si longtemps auparavant. Les facteurs qui ont permis ces innovations très rapides sont à rechercher dans les institutions particulières des pays riches, mais aussi dans des circonstances historiques très particulières. En tout cas l’idée que le progrès était « écrit », que le développement économique n’était qu’une question de temps, est fausse.

Vous concluez votre chapitre par la phrase : "Nous ne devons pas exclure que les civilisations technologiques soient insoutenables"? Que voulez-vous dire exactement par là ? 

Notre progrès économique a pour caractéristique de transformer massivement notre planète, ce qui a des conséquences importantes sur la biodiversité, et fait apparaître de nombreux risques globaux, en particulier environnementaux. Notre technologie repose également sur la consommation de ressources qui ne sont pas infinies. Cela pose donc la question de la perenité de notre modèle économique, de notre civilisation. De ce point de vue, l’analyse de l’histoire et de l’économie tend à nous montrer un verre à moitié vide (ou à moitié plein si l’on veut être optimiste). Nous pouvons constater que l’épuisement des ressources naturelles a toujours, jusqu’à présent, pu être contourné par des solutions technologiques. L’électricité a remplacé la graisse de baleine pour l’éclairage avant la disparition de cette espèce, surchassée au 19ième siècle. Mais l’expérience des multiples civilisations qui se sont effondrées dans l’histoire montre que les mécanismes qui permettent aux sociétés de résoudre leurs problèmes peuvent se gripper, et conduire de manière très brutale à des effondrements caractérisés par une perte de capacités technologiques. Rien ne permet d’affirmer que notre société assise sur la révolution industrielle échappera à ce destin.

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