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Le mécénat culturel se fait damer le pion par le mécénat sportif et environnemental
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Finie la Bohême

Selon le rapport Herbillon de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, en 2010 le mécénat culturel a subi une baisse de 20%. Une politique fiscale incitative ne suffit plus de convaincre les donateurs.

Antoine Chéron

Antoine Chéron

Antoine Chéron est avocat spécialisé en propriété intellectuelle et NTIC, fondateur du cabinet ACBM.

Son site : www.acbm-avocats.com

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Le 15 février 2012, un rapport d’information sur le mécénat a été présenté par le Député Michel Herbillon, membre de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, devant l’Assemblée nationale. Après avoir dressé le constat de la multiplication des demandes de mécénat dans des domaines variés (sportif, environnemental, etc.) et d’un certain effritement du mécénat consacré à la culture, la commission propose 13 recommandations ayant pour finalité de renforcer les sommes consacrées au mécénat culturel français.

Le mécénat se distingue du « parrainage » et du « sponsoring » en ce que le contributeur ne reçoit aucune contrepartie directe au don qu’il a versé pour l’exercice d’activités présentant un caractère d’intérêt général. En pratique, le mécénat se matérialise par un versement en numéraire mais il peut également prendre la forme d’un mécénat « en nature », lorsque le contributeur met à disposition des locaux ou du matériel à disposition du bénéficiaire. Le rapport souligne également le développement du « mécénat de compétence » qui consiste à apporter son savoir-faire au service de l’intérêt public. La réhabilitation des colonnes de Buren par la société Eiffage en est une parfaite illustration. En France le mécénat est encouragé par une politique fiscale particulièrement incitative. En effet,  la loi du 1er août 2003 (loi AILLAGON) repose non pas sur une simple déduction des sommes versées de la base imposable, mais sur une réduction des sommes versées du montant de l’impôt dû. Or cela constitue une originalité au regard des mesures fiscales mises en place à l’étranger.

A la faveur de cette particularité fiscale, le mécénat a connu un essor important au cours des années 2008-2009. Ainsi sur cette période, selon les résultats publiés par l’Association pour le développement du mécénat industriel et commercial (l’ADMICAL), les entreprises françaises auraient versé près de 975 millions d’euros sous forme de mécénat et de parrainage contre 350 millions pour les entreprises allemandes et 170 millions d’euros pour les anglaises. Cependant, en 2010, les sommes consacrées au mécénat en France ont baissées de 20%, ce qui s’explique en partie par la réticence des donateurs à investir dans des projets culturels en période de crise.

On observe par ailleurs une mutation des formes de mécénat. En ce qui concerne les dons venant de particuliers, on note l’émergence d’un « mécénat populaire » à savoir des opérations qui font appel au sentiment de responsabilité que chacun éprouve pour ce qui constitue un bien commun culturel national ou de proximité à l’image de la reconstruction du Château d’Angers après son incendie en 2009.

Le soutien des entreprises évolue également et on constate l’apparition d’un « mécénat d’initiative », à travers lequel les entreprises attendent un certain avantage en échange de leur don bien que le mécénat reste un acte désintéressé.

En conséquence, les musées en particulier, sont contraints de se montrer flexibles faces aux nouvelles exigences de leurs contributeurs. Néanmoins, la définition stricte du mécénat ne leur permet pas toujours de l’être. A titre d’exemple, le « nommage » des entreprises donatrices dans les salles d’exposition est un sujet sur lequel s’opposent les musées. Ci-derniers y consentent dans l’intérêt de l’enrichissement de leurs collections ou de la rénovation de leurs monuments alors que le ministère de la culture y est réfractaire.

Pour éviter les dérives du « mécénat d’initiative » qui pourraient se traduire par un « dumping éthique », le rapport souligne la nécessité de réaffirmer les valeurs du mécénat en réfléchissant à l’instauration de règles communes. Dans cette perspective, la commission encourage le recours à la rédaction de Chartes Ethiques, à l’image de ce qu’a entrepris le Musée du Louvre, pour fixer les termes de ses relations avec les donateurs. En outre le rapport suggère la création d’un bonus fiscal en faveur des mécènes qui s’y conformeront.

D’autres mesures fiscales sont envisagées par la Commission. Ainsi il est proposé de fixer le plafond des contreparties susceptibles d’être consenties aux particuliers à 200 euros au lieu de 60 actuellement. De même, le plafond des versements ouvrant droit aux réductions d’impôt pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 50 millions d’euros devrait être augmenté.

Néanmoins, il convient de noter que pour les particuliers comme pour les entreprises, l’incitation fiscale ne constitue pas le critère déterminant qui va déclencher l’initiative du mécène. En effet, comme l’a déclaré M. Néraud, directeur général de la Fondation du patrimoine, « le régime fiscal ne détermine pas la volonté de donner, mais l’intensité du don ». C’est pourquoi le rapport préconise également des mesures non fiscales, comme la création d’une Fondation consacrée au soutien des spectacles vivants et d’une « Fondation Européenne » pour encourager les dons en provenance de l’étranger.

L’adoption de ce rapport au caractère exhaustif a été votée à l’unanimité par la commission des affaires culturelles et peu de réserves ont été émises au regard de son contenu. Il conviendra dès lors d’observer si les recommandations préconisées feront l’objet de propositions de lois.

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