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Finances et cadres au bord de la crise de la nerf : le FN pourrait-il disparaître ?
©Reuters

Front National

Le Front national semble accumuler les déconvenues. Pour autant, il serait audacieux de croire que le parti a dit son dernier mot.

Jean-Philippe Moinet

Jean-Philippe Moinet

Jean-Philippe Moinet, ancien Président de l’Observatoire de l’extrémisme, est chroniqueur, directeur de la Revue Civique et initiateur de l’Observatoire de la démocratie (avec l’institut Viavoice) et, depuis début 2020, président de l’institut Marc Sangnier (think tank sur les enjeux de la démocratie). Son compte Twitter : @JP_Moinet.

 

 

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Atlantico : Le Front national semble accumuler les déconvenues en ce moment : mise en examen pour abus de confiance de Marine Le Pen, difficultés financières du parti, retrait de Marion Maréchal Le Pen, défaite qui divise les lignes politique au sein du parti : ce mois de juin est-il celui de la défaite intégrale du FN ?

Jean-Philippe Moinet : Après la flagrante contre-performance de l'entre-deux tours de la présidentielle, le manque de crédibilité n'ayant  pas échappé aux Français, le FN est entré dans une spirale de l'échec. L'ampleur de la victoire d'Emmanuel Macron au second tour (66% des suffrages) a montré qu'une dynamique portait, contredisant toutes les thèses rabâchées sur l'inexorable progression des nationaux-populismes, les idées et les thèmes situés aux antipodes de celles du mouvement d'extrême droite.

Un effet de souffle s'est produit. Les oppositions se sont fragmentées, en quatre pôles rétrécis et mis en déroute : FN, LR, PS et France Insoumise, tous ont subi en un mois le choc de la déflagration macronnienne. Et le FN en premier lieu: du premier tour de la présidentielle au premier tour des législatives, en un mois, il a chuté de 8 points, perdant sa place de premier parti d'opposition, place reprise par LR en pourcentage de suffrages exprimés. 

Bien sûr, le FN a davantage de députés qu'en 2012, Marine Le Pen est entrée pour la première fois au Palais Bourbon, mais cela ne saurait masquer une profonde déstabilisation du parti lepéniste, la déprime qui traverse ses rangs, les divisions et les départs (de Marion Marechal Le Pen) n'étant que le reflet de cette situation : au fond, au-delà des protestations qu'il récupère, le parti lepeniste a échoué dans sa stratégie de "dédiabolisation" qui était sensé lui ouvrir les portes du pouvoir. Il a gardé sa marque de fabrique agressive, violente et, malgré le vernis Marine Le Pen-Florian Philippot, ce parti n'a pas fait la preuve de sa crédibilité pour gouverner, bien au contraire. Toute la génération qui succédait à celle de Jean-Marie Le Pen se voit ainsi renvoyée dans les cordes d'une opposition radicales mais stériles. L'horizon de l'accession au pouvoir, pour le FN, apparaît bien lointain et plus qu'incertain : en interne, beaucoup se disent que, même avec Marine Le Pen, ce sera impossible. Du coup, le FN est menacé de l'intérieur par le cycle vicieux de la démobilisation, de la démoralisation et peut-être de la déstructuration.  

La mise en examen de Marine Le Pen et les difficultés financières du parti ne font qu'accentuer cet état de crise.

On compte une trentaine de députés d'extrême-gauche et seulement 8 du FN à l'Assemblée. Le Front National n'a-t-il pas perdu son leadership en terme de populisme médiatique au profit de la France Insoumise ?

C'est en effet la bataille des nationaux-populistes qui est engagée, sur la scène parlementaire, où Jean-Luc Melenchon  et quelques uns des siens, savent faire le spectacle et sur-jouer le rôle protestataire, notamment sur le terrain social, que Marine Le Pen aurait rêver incarner seule. 

L'effondrement du PS laisse un espace à une gauche radicale, qui peut profiter de la situation pour prospérer et, en effet, médiatiquement, supplanter le FN sur le terrain de l'anti-capitalisme, l'anti-mondialisation, l'anti-europeisme primaires. 

En outre, France Insoumise, qui a été avec la présidentielle dans une dynamique de croissance, même si Mélenchon a été touché par le syndrome d'une déprime post-défaite, ne connaît pas les incohérences, les divisions et les affaires judiciaires qui affaiblissent le FN. Cela rend FI d'autant plus audible. 

Quels sont les éléments qui pourraient faire dire que malgré tout, le Front national n'est pas mort ?

Aucun courant de pensée ne meurt. Il faut se méfier des effets d'optique et de conjoncture. Le mouvement d'extrême droite, même affaibli, a obtenu en 2017 de meilleurs résultats qu'en 2012. Pour l'avenir, tout dépendra des résultats des choix politiques et des mesures que prendront Emmanuel Macron et le gouvernement d'Edouard Philippe. Si l'économie repart, si le chômage recule, si la confiance dans les gouvernants remonte, si la France redevient un pays qui entraîne en Europe, alors une grande part de la protestation, dont se nourrissent les extrêmes, disparaîtra. 

Par ailleurs, si le mouvement LR arrive à dépasser sa crise de leadership et ses divisions idéologiques, ce sera aussi autant d'espace en moins laissé au FN.

Mais je ne crois pas que ce parti soit mort. Il est blessé, affaibli, peut-être assez durablement relégué aux marges de la vie politique française. Mais les tendances aux crispations nationalistes et identitaires resteront présentes.

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