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"Je l'ai fait", "Comment as-tu osé ?" : entre hystérie, dépression et culpabilité, le traumatisme de l'infidélité
©Reuters

Bonnes feuilles

Une rencontre, une aventure, une liaison…Souvent, beaucoup de souffrances à la clé. Et beaucoup de questions : pourquoi commet-on une infidélité ? Comment traverser cette crise ? Face à la tourmente et à la douleur de la crise conjugale, ce livre permet de mieux comprendre ce qui se joue dans l’infidélité, et de décider lucidement que faire. Extrait de "Infidélités et crises conjugales" de Marie-Aude Binet, aux Editions Odile Jacob (2/2).

La découverte de l’infidélité entraîne le traumatisme. Le mot traumatisme vient du grec trauma, signifiant une blessure qui peut se définir comme « l’ensemble des perturbations résultant d’un violent choc émotionnel ». Tout ressenti a deux composantes. La première est émotionnelle, ce qu’on ressent spontanément : la colère, l’angoisse, l’humiliation, la honte, le dégoût, la tristesse, la peur, la surprise. La seconde concerne les pensées négatives accompagnant ces réactions, avec l’imagination qui peut aggraver l’état du conjoint trompé et son impression de ne rien maîtriser. La colère prend souvent le dessus sur les sentiments de tristesse, de honte et de culpabilité. Plusieurs attitudes sont possibles : rage destructrice, mise en place d’une distance de sécurité pour se protéger, repli sur soi avec risque de décompensation physique, psychologique. Un cercle vicieux peut être enclenché qui va de la colère contre soi, contre l’autre devenant distant, au chantage ou à la tentative de suicide.

Quand Alain a appris l’infidélité de sa femme, il a désespéré, il avait déjà vécu cela lors de son premier mariage. Il a eu peur à nouveau de perdre sa femme et a décidé de mettre fin à ses jours. Il a donné quelques signes compris par sa femme qui est arrivée juste à temps pour le sauver, il venait de se pendre. Cet acte a ajouté au traumatisme de l’adultère, elle a eu peur et n’a plus fait confiance à son mari.

Quand Alexandre apprend l’infidélité de sa femme avec un ami, il part crever les pneus de cet ami. Ensuite, il entame la discussion avec elle afin de comprendre ce passage à l’acte.

La personne trompée est perturbée sur trois points : le monde n’est plus bienveillant, il n’a plus de sens, elle perd sa dignité. Chaque moment de la journée semble dominé par des pensées obsédantes autour de cette blessure qui souvent perturbent le sommeil. La personne ne peut plus compter sur la stabilité de son couple, la confiance est brisée vis-à-vis du conjoint comme de l’entourage. L’estime de soi est atteinte et l’avenir ne semble plus exister ni offrir d’intérêt. La vie à deux peut devenir une vraie douleur : comment cohabiter avec son ennemi ? Des manifestations somatiques et émotionnelles peuvent apparaître : troubles du sommeil, perte de poids, irritabilité ou accès de colère, problèmes de concentration, méfiance excessive, tendance à sursauter facilement, nausées, perte de poids, crises de larmes, d’hystérie, violence vers l’autre ou vers soi, repli sur soi, envie de fuir ou d’en finir, dépression…

La découverte d’une infidélité conjugale ouvre une crise pour tous les intéressés. L’infidélité va fréquemment raviver une blessure d’amour initiale, vécue avec l’un ou l’autre parent, quelquefois les deux, touchant souvent à l’abandon et/ou à la peur de perdre. Cette crise est une occasion d’évolution, mais cela dépendra de la manière dont est saisie, favorablement ou non, l’opportunité de faire un travail sur soi. La personne déçue est en grande difficulté pour se raisonner et prendre du recul. Comme toute crise, celle-ci comporte des dangers mais aussi un espoir. Son issue suscitera des changements chez toutes les personnes. Cela veut dire qu’il faut progresser dans le sens d’une vie de couple meilleure ou d’un divorce humanisé. Il s’agit d’une expérience de maturation et peut-être d’une espérance nouvelle. Bien sûr, au moment de l’aveu cela est impossible à percevoir. Tout s’écroule et devient sombre.

Au début voir les choses en noir, être déprimé(e) ou agité(e) est naturel et empêche de voir clair et de prendre de la hauteur. L’avenir étant perçu dans sa part d’inconnu, l’angoisse peut produire une sorte de paralysie pour entreprendre quoi que ce soit de positif pour soi ou pour le couple. Il s’agit de parvenir à dépasser cet état émotionnel afin que les partenaires trouvent en eux les solutions et les moyens utiles pour améliorer leur situation. Chaque personne aura ce travail personnel à faire, car l’infidélité peut avoir pour toile de fond les problèmes non résolus au sein du couple ou chez l’un des deux conjoints. L’occasion se présente comme une nécessité de corriger les croyances, comportements, habitudes, idéaux ou perceptions mutuels, en collaboration avec l’autre.

Tant que les pensées rageuses, le sentiment de vengeance ou les colères sont présents, le couple est dans l’impossibilité de résoudre la crise et d’envisager des moyens de la surmonter. Ainsi, lorsqu’on découvre l’infidélité, est-il important de ne pas se précipiter. Une des premières conséquences de la nouvelle reçue en plein cœur serait de demander immédiatement une séparation. Mais il est important de prendre un peu de temps et de recul afin de s’interroger sur le sens de l’infidélité plutôt que de se concentrer uniquement sur la souffrance occasionnée.

Les deux partenaires vont immanquablement être dans une grande souffrance s’ils se sont véritablement aimés. La vérité une fois révélée, au soulagement de la connaître succède la souffrance de la vivre comme une brisure. Cela peut être aussi d’autant plus douloureux lorsqu’il s’agit d’une liaison homosexuelle.

La personne qui a découvert l’infidélité en état de choc se sent trahie. Elle doit adopter des mesures pour garder son équilibre et amorcer la reconstruction. Une plus grande clarté dans la communication conjugale soulage considérablement, surtout la personne trompée qui soupçonnait l’infidélité de son conjoint sans jamais arriver à en avoir les preuves. Une fois apprise, la nouvelle lui confirme qu’« elle n’est pas folle ».

Alexandre et sa femme discutent ouvertement et s’aperçoivent des malentendus et non-dits dans leur communication qui ont induit en erreur madame sur l’amour de son conjoint pour elle.

 À partir de ce moment, la réaction normale à une expérience traumatisante sera la méfiance et, si elle peut revenir, la confiance ne pourra être restaurée qu’après un temps certain. Tant que le fidèle n’a pas « accepté et compris » (il faudra revenir sur le sens de cette acceptation et de cette compréhension en thérapie) le sentiment de son conjoint, un changement n’est pas encore possible. L’infidélité générera-t-elle une première constatation sur la dégradation de l’amour ? Les dégâts infligés pourront être irréparables. Une réflexion plus profonde aidera à donner un autre sens à cette souffrance et à redécouvrir un attachement réciproque. D’où l’importance de laisser le temps aux premières émotions de retomber et de réfléchir avec sérénité : mon couple a-t-il un avenir après la fin de la liaison extraconjugale ? 

Extrait de "Infidélités et crises conjugales - Comprendre et sortir de la crise" de Marie-Aude Binet, aux Editions Odile Jacob

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