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Mélenchon et le choc des mots : quelle est  la part de stratégie politique délibérée et celle de la “simple” hargne personnelle
©AFP

Roue libre

Jean-Luc Mélenchon ne mâche pas ses mots. La violence verbale du candidat dans la quatrième circonscription de Marseille ne devrait pourtant plus étonner et fait partie intégrante de sa stratégie politique.

Raul Magni-Berton

Raul Magni-Berton

Raul Magni-Berton est actuellement professeur à l'Université catholique de Lille. Il est également auteur de notes et rapports pour le think-tank GénérationLibre.

 

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Atlantico : Dans une interview donnée au magazine Society, Jean Luc Mélenchon a traité François Hollande de "pauvre type". A Marseille, il conseille aux jeunes de "taper dans le tas". Dans quelle mesure cette agressivité est-elle le fruit de la personnalité du leader de la France Insoumise, ou d'une réelle stratégie politique ?  

Raul Magni-Berton : Mélenchon n'a pas toujours été aussi agressif. Je ne dirais donc pas que sa personnalité est décisive. En revanche il y a d'excellentes raisons d'ordre stratégiques. Les politiciens ont de plus en plus mauvaise presse, et de manière générale, la crise a accentué la méfiance des gens vis-à-vis des élites en général. Ces dernières se retrouvent dans une situation économiquement confortable, tout en faisant la morale aux autres. Taper sur les élites, si possible avec des mots crus ou grossiers, produit une sensation de vengeance chez beaucoup de gens. 

En outre, cela fait parler la presse, comme le montre votre article. Pour obtenir des voix, il est plus utile qu'on parle beaucoup de nous, peu importe si c'est en bien ou en mal. 

Trump, aux Etats-Unis a été l'exemple le plus connu de cette stratégie. Plus il arrivait à choquer les élites, plus il obtenait de votes populaires. Et c'est avec ces votes qu'il a gagné, contrairement à ses prédécesseurs républicains. Dans d'autres pays européens, je pense à l'Italie ou la Pologne, ce style s'est imposé depuis de nombreux années maintenant, avec un succès certain. 

En France, Le Front National a capitalisé sur ce type de style, et c'est au moment où il a décidé de se donner un visage plus lisse que Mélenchon reprend le flambeau. 

Est-ce également un moyen pour Jean Luc Mélenchon, outre l'échéance électorale de dimanche, de s'affirmer lui et son parti comme la seule force d'opposition ?

Il est clair que le discours qui dit que les autres sont tous pareils vise à se poser comme seule opposition. Jusqu'ici, l'identité de Mélenchon a été surtout à gauche, en identifiant le parti socialiste comme un moindre mal. La spécificité de la nouvelle stratégie est de se débarrasser du label de "gauche" - les "insoumis" reste plus tentant pour ceux qui ne se voient pas de gauche - comme l'ont fait avec succès les mouvements émergents et anti-élites en Europe du sud. Cela passe également par une prise de distance vis à vis de la gauche de pouvoir qui est d'autant plus visible qu'elle s'exprime de façon colorée. 

Quelles peuvent être les précédents historiques d'une telle violence verbale, notamment dans la filiation politique dans laquelle Jean Luc Mélenchon cherche à se positionner ? 

A vrai dire, le niveau de violence verbale de Mélenchon reste assez faible s'il est comparé à des exemples du passé. Les campagnes électorales de la première moitié du vingtième siècle étaient autrement plus virulentes. Et même par rapport à ce qu'on pu dire Trump ou Berlusconi, cela reste gentil. Plus récemment et en France, Sarkozy avait un peu investi dans cette filière, en traitant Hollande de "ridicule" et Fillon de "loser". 

Mais, encore une fois, ce n'est pas tant le niveau de violence verbale qui caractérise le propos de Mélenchon - qui est en elle même assez courante en politique - mais plutôt sa volonté de se distinguer des partis traditionnels. 

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