Edito
Le cadeau empoisonné de François Hollande à Emmanuel Macron
François Hollande a multiplié au cours des derniers mois qui ont précédé la fin de son mandat les artifices comptables.
Tout va mieux sous le ciel de l’économie française clament les experts, comme si les indices de la conjoncture voulaient saluer à leur manière la victoire d’Emmanuel Macron. La construction va connaitre un niveau record cette année avec 400 000 nouveaux logements sortis de terre. La production automobile monte en flèche. Les Français se remettent à consommer, les entreprises à investir, la croissance pourrait se montrer moins timide. Pas étonnant dans ce contexte que le moral de la population se redresse, d’autant que l’approche des grandes vacances d’été pousse à l’optimisme.
Pourtant, derrière cette avalanche de bonnes nouvelles pourraient surgir quelques bombes à retardement. Le nouveau chef de l’Etat, qui connait bien la maison, a commandé un audit qui sera communiqué à la mi-juillet pour connaître la situation exacte du pays. La Cour des Comptes a déjà indiqué que tout ne serait pas aussi rose que le manifestent certaines statistiques. Car, fidèle à un comportement classique lorsqu’approche une période électorale, François Hollande a multiplié au cours des derniers mois qui ont précédé la fin de son mandat les artifices comptables , de manière à présenter le tableau le plus favorable, auquel il faudra désormais donner son véritable visage en supprimant tout ce qui relève du trompe l’œil.
Le premier constat est celui de la persistance lancinante du déficit qui a atteint l’an dernier un niveau supérieur en termes réels à celui de 2013 et se situe très au-dessus du niveau auquel il avait été ramené il y a dix ans, à la veille de la grande crise financière de 2008. Car, selon la vieille méthode qui persiste, on esquive toujours les réformes de fond, dont on ne cesse pourtant de proclamer l’urgence, en faveur de la politique du rabot, qui finit par coûter cher car elle se révèle paralysante. Autres techniques classiques : la sous-budgétisation de certaines missions qui permet de reporter à plus tard certains déficits, ou encore la sortie du périmètre de l’Etat des dépenses qu’il faudra bien réintégrer un jour pour avoir la vérité des comptes. Mais il y a pire : les promesses annoncées qui aggraveront dans les années futures les dépenses publiques, comme la hausse du point d’indice pour les fonctionnaires, où les mesures financières qui découleront de l’accord passé par François Hollande sur l’évolution des carrières dans la fonction publique dont le poids se fera sentir plus lourdement au fil des ans.
L’une des bombes à retardement les plus dangereuses concerne aussi le niveau de la dette. Celle-ci s’est accrue de 23% depuis 2011, ce qui est considérable : mais l’aggravation a été masquée en partie par la diminution de la charge annuelle qu’elle impose au budget, en raison de la baisse considérable des taux d’intérêt, qui sont même devenus négatifs pendant quelques mois, ainsi que par des recettes exceptionnelles du es aux amendes infligées à certains contribuables ayant omis de déclarer des capitaux transférés à l’étranger et qui sont aujourd’hui en diminution, tout comme l’ensemble des recettes provenant de la lutte contre la fraude fiscale. Cette période de facilité artificielle est aujourd’hui révolue. Le danger le plus proche est désormais celui de la remontée des taux d’intérêt qui s’est amorcée, tandis que la politique laxiste de la banque centrale européenne commence à connaître ses limites. C’est dire que les annuités de la dette pourraient s’alourdir très rapidement de plusieurs milliards par an, sous l’effet des besoins de financement qui atteindront des niveaux record, avec une conséquence irrémédiable : la quasi inexistence des marges de manœuvre à la disposition du gouvernement pour établir la prochaine loi de finances. Autrement dit, l’ amélioration de la conjoncture économique ne va pas faire naître une cagnotte que l’on serait tenté de distribuer avant même qu’elle ait pris consistance, alors que la priorité devrait consister à réduire la dépense publique face aux demandes d’amélioration du pouvoir d’achat qui risquent de se multiplier.
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