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Michel, 51 ans, "trop vieux" et "trop cher" : ces chômeurs longue durée jugés "pas rentable" par Pôle empoi
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Bonnes feuilles

L'autopsie d'un système kafkaïen qui génère de la souffrance de chaque côté du guichet. Comme de nombreux Français, Cécile Hautefeuille a connu les affres du chômage. Pour mener à bien son enquête journalistique, l'auteur mêle à son expérience personnelle des témoignages poignants de chômeurs mais également de salariés de Pôle emploi. Extrait de "La machine infernale" de Cécile Hautefeuille, aux Editions du Rocher (1/2).

Cécile Hautefeuille

Cécile Hautefeuille

Après six années à RMC, Cécile Hautefeuille a lancé le blog Minisphère du Chômage et donne des cours de radio à l'ESJPRO de Montpellier.

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Michel, 51 ans, chômeur longue durée "pas rentable"

Michel est inscrit depuis six ans à Pôle emploi, après un licenciement. Il touche entre 488 et 500 € par mois grâce à l’ASS, Allocation de solidarité spécifique attribuée aux personnes qui ont épuisé leurs droits à l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE).

En six ans, il raconte n’avoir eu qu’une quinzaine de rendez-vous à Pôle emploi ainsi qu’une période de deux ans, "sans rien, sans aucun rendez-vous".

Michel se sent invisible. "Pour Pôle emploi, je n’existe pas. “Vous n’êtes pas rentable”, m’a dit un jour une conseillère. Pour les employeurs, je suis trop vieux, je coûte trop cher."

Michel tente d’être visible. En six ans, il dit avoir envoyé au moins 7  000 candidatures, soigneusement archivées. Il a d’ailleurs tenu à m’envoyer une photo de ces piles de lettres, rangées dans des boîtes en métal. La plupart sont restées sans réponse, " ou alors des réponses-type, merci mais non merci".

En 2010, Michel a accroché une remorque à son vélo, l’a chargée de matériel de camping et de CV. Il a parcouru 3  000 kilomètres, traversé  35 villes et distribué, en personne, 2 000 CV.

Bilan: " Seulement une dizaine de réponses, toutes négatives." Mais il ne regrette pas, il a fait de belles rencontres, du camping sauvage ou des étapes chez l’habitant. "Ça fait du bien, psychologiquement. Quand on est au chômage et que ça dure, on perd tout: sa famille, ses amis, son logement. Aujourd’hui je suis un sans-abri en sursis, logé par des connaissances."

Michel compte reprendre la route, à vélo, d’ici quelques mois. Grand et robuste, il a des ressources physiques. Et une force mentale bluffante. "Oui, je suis fort mais des fois j’en ai ras le bol." Dans sa voix rocailleuse et assurée, pas de pathos, pas une once de complainte. Il le dit et passe à autre chose, point.

Michel a travaillé 30 ans dans le commerce. Il est également dessinateur de métier et a fait les beaux-arts. Ces six dernières années, en complément de ses allocations-chômage, il a été tour à tour gardien de nuit, agent en espaces verts, saisonnier l’été. Il s’est aussi lancé dans l’auto-entrepreneuriat, mais ça s’est mal terminé (aux prud’hommes). En parallèle, Michel a fait du bénévolat: Secours populaire et maraudes de nuit avec le Samu social de la Croix-Rouge. Il est fier de montrer des clichés de lui, vêtu de sa combinaison rouge, bonnet vissé sur la tête, en pleine distribution de cafés avec d’autres bénévoles.

Ces six dernières années, Michel n’est pas resté inactif et, pourtant, l’image que la société lui renvoie c’est celle "d’un chômeur longue durée, parasite et fainéant".

Lui se définit plutôt comme un chômeur "indigné mais pas résigné".

Extrait de "La machine infernale" de Cécile Hautefeuille, aux Editions du Rocher

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