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Les Républicains : la séparation de corps est déclenchée mais personne ne sait quand le divorce sera officiellement prononcé
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Deux droites irréconciliables ?

A l'instar des couples qui restent ensemble à cause des gosses, les Républicains s'efforcent de continuer à partager le même toit jusqu'au 2ème tour des législatives, c'est à dire le 18 juin prochain.

Anita Hausser

Anita Hausser

Anita Hausser, journaliste, est éditorialiste à Atlantico, et offre à ses lecteurs un décryptage des coulisses de la politique française et internationale. Elle a notamment publié Sarkozy, itinéraire d'une ambition (Editions l'Archipel, 2003). Elle a également réalisé les documentaires Femme députée, un homme comme les autres ? (2014) et Bruno Le Maire, l'Affranchi (2015). 

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Mais ce n'est pas acquis. Les règles de financement de la vie politique ainsi que celles concernant le seuil des voix nécessaires à la qualification pour le deuxième tour pourraient avoir raison de ces principes... 

Cette hypothèse est dans tous les esprits, au point que certains oublieraient presque que l'on n'en est qu'à l'entre deux tours de la présidentielle, et chez les Socialistes, comme chez les  Républicains, on a beaucoup de mal à digérer le choc de la défaite. Chez les Républicains pour qui cette présidentielle était théoriquement imperdable, la zizanie est à son comble et les troupes continuent de se  déchirer sur l'opportunité d'appeler à voter nommément pour Emmanuel Macron le 7 mai ou s'il faut se contenter d'appeler à faire barrage au Front National. Hier soir Alain  Juppé qui réunissait ses amis dans un bistrot parisien a clairement demandé que l'on  arrête de tergiverser : "Voter blanc c'est donner sa chance au FN, Assez de finasserie ! Pour battre MLP, il n'y a qu'une solution : voter Macron" a-t-il déclaré .Nicolas Sarkozy, dont la parole est également attendue puisqu'il a fait dire qu'il va s'engager, a déjà reporté deux fois son  éventuelle prise de position, attendant, selon de ses proches "le bon moment". Ce ne sont pas les échos provenant de la réunion de groupe des députés LR de ce mardi, ni les prises de position  et tribunes publiées ici et là  qui vont l'y inciter, mais il a déclaré à des proches que "la droite a failli".

Dans l'ordre chronologique des derniers rebondissements, c'est Bruno Le Maire qui a ouvert le bal en déclarant sur BFMTV qu'il pourrait " évidemment travailler avec Emmanuel Macron" si ce dernier, une fois élu, n'avait pas de majorité au Parlement. Même tonalité chez le président de la région PACA, Christian Estrosi (élu avec des voix de gauche), qui ne veut pas d'une France ingouvernable. Cette hypothèse  est (pour l'heure), totalement balayée par les dirigeants de L.R. qui croient dur comme fer (ou font semblant, pour maintenir la cohésion des troupes), qu'une victoire de la droite est possible aux législatives... Dans la droite ligne du Bureau Politique de la veille, ils ont accepté de la désignation de Christian Jacob, actuel président du groupe, comme coordinateur de la campagne pour les législatives,  ainsi que l'intronisation de François Baroin comme premier ministrable dans l'hypothèse de la victoire. Le sénateur maire de Troyes se voit donc premier ministre virtuel d'un  président virtuel pour la troisième fois en quelques mois, puisqu'il l'a été successivement sous la bannière de Nicolas Sarkozy pendant la campagne de la primaire, puis avec François Fillon, à la fin de la campagne présidentielle.

Le Président de la Région Rhône-Alpes-Auvergne, Laurent Wauquiez, qui brigue la direction du Parti, continue de dire (et il a encore posté un tweet dans ce sens hier), qu'il "ne croit pas aux consignes de vote. Certains voteront Macron, d'autres blanc. Je demande que ce choix soit respecté". Ce qui lui vaut la réplique du député juppéiste Frank Riester qui déclare qu'il est "irresponsable et dangereux de cautionner le vote blanc alors qu'il faut battre la candidate FN". Les députés candidats à leur réélection ainsi que les aspirants  à l'élection seront invités à signer une charte plate-forme, à travers  laquelle ils s'engageront à soutenir le programme  des Républicains ; ce document a aussi but de "maintenir l'unité", et d'éviter les fuites vers En Marche, car la suspicion règne. 

Mais quid de ceux qui, à LR appellent à voter pour Marine Le Pen au deuxième tour ? Christine Boutin, présidente d'honneur du Parti Chrétien Démocrate (qui fait partie de LR), a annoncé qu'elle le ferait. L'ancienne secrétaire d'Etat Françoise Hostalier (tombée dans l'anonymat depuis son exclusion du gouvernement Juppé avec les "Juppettes"), également. Des responsables de Sens Commun, frange ultra conservatrice de La Manif pour Tous vont dans le même sens, même si officiellement Sens Commun refuse de choisir entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron. Christian Estrosi a réclamé leur exclusion de LR dans une lettre ouverte où il écrit qu'"en tolérant un quelconque rapprochement avec le FN, ce sont nos valeurs que nous excluons". La direction du Parti ne s'est pas prononcée pour le moment. 

Christian Estrosi ne fait pas partie des  juppéistes qui se sont retrouvés autour du maire de Bordeaux en début de soirée. Avec ses amis, le maire de Bordeaux  et candidat malheureux  à la primaire, pense également à l'avenir : il se dit "prêt à s'engager pour aider la jeune génération des humanistes" (les humanistes était le nom du courant de Jean-Pierre Raffarin au sein de l'UMP) ; il invite les siens à "s'organiser", et les appelle à être "progressistes" en ajoutant que "s'il y a de bonnes réformes, il faudra y participer". On est à mille lieux des principes énoncés quelques heures plus tôt dans l'enceinte de l'Assemblée. Et la sénatrice du Bas-Rhin Fabienne Keller, constatant le fossé qui se creuse entre les deux lignes à droite, évoque maintenant l'existence de deux "droites irréconciliables", car, a-t-elle déclaré "ce qui nous rassemblait était peut-être moins fort que ce qui nous distingue ".

Ce n'est pas une lettre ouverte, mais une tribune que publient cinq membres dont les députés Damien Abad et Julien Aubert dans le journal l'Opinion, et lancent un avertissement : "La droite ne survivra pas longtemps si elle débat uniquement des consignes de vote d'un  autre temps"..., ils  prédisent "une période de déchirements pour savoir qui est responsable de ce terrible fiasco"... et reconnaissent que "nous n'avons pas su parler aux Français : la droite a perdu l' élection parce qu'elle s'est montrée trop rancunière et idéologiquement divisée pour faire campagne en rangs serrés derrière le vainqueur de la primaire...

"Beaucoup d'entre nous ont été paresseux : au lieu d'écouter les problèmes des Français, les barons de la droite croyaient dur comme fer que le hollandisme inefficace rappellerait automatiquement la droite au pouvoir". Cet examen de conscience les amène à eux aussi à envisager l'hypothèse d'une participation  à une future coalition de gouvernement : "Nous ne pourrons pas ignorer le résultat de la présidentielle et nous opposer sur tout, ce serait destructeur au moment où la France a besoin de réforme" et parlent d'"un accord sur des thèmes très concrets - sur l'Europe, sur l'économie, sur les économies budgétaires", qui "pourra être trouvé dans le seul intérêt de la France. Mais pour la clarté du débat politique, il faut que chacun reste dans son mouvement". C'est le propre d'une coalition.

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