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Pourquoi  la France continue de refuser de faire du plein emploi une priorité
©Reuters

Edito

Pendant la fameuse période des trente glorieuses qu’a connue la France l’objectif du plein emploi paraissait s’imposer : il était devenu la règle générale et ne supportait pas d’exception. Il continue au demeurant de dominer la politique des grands pays industriels. Aux –Etats-Unis, au Japon, en Allemagne, en Suisse et dans la plupart des pays de l’Europe du Nord, le travail pour tous est la norme générale. Mais, comme dans de nombreux autres domaines, la France fait exception.

Michel Garibal

Michel Garibal

Michel Garibal , journaliste, a fait une grande partie de sa carrière à la radio, sur France Inter, et dans la presse écrite, aux Échos et au Figaro Magazine.

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Pendant la fameuse période des trente glorieuses qu’a connue la  France l’objectif du plein emploi paraissait s’imposer : il était devenu la règle générale et ne supportait pas d’exception. Il continue au demeurant de dominer la politique des  grands pays industriels. Aux –Etats-Unis, au Japon,  en Allemagne, en  Suisse et dans la plupart des pays de l’Europe du Nord, le travail pour tous est la norme générale. Mais,  comme dans  de  nombreux autres  domaines,  la France fait exception. L’affaire n’est pas  nouvelle : elle taraude  le pays depuis plusieurs décennies. Au départ,  on note un glissement  de sémantique : on est passé du concept de plein  emploi à celui  de lutte contre le  chômage. Comme si l’’on avait abandonné  au fil  des ans l’idée de fournir à chacun une activité pour  parer au plus pressé et tenter d’endiguer la progression régulière du chômage.

Le point culminant de cette évolution est apparu avec l’idée de renverser la fameuse courbe  à laquelle François Hollande avait conféré un véritable caractère religieux, qui donnait lieu chaque mois à de longs commentaires  désabusés dans la presse et qui aura finalement été en partie à l’origine du renoncement du chef de l’Etat à se représenter à l’élection présidentielle, un cas unique sous la cinquième République. Aujourd’hui, le chômage est devenu une  véritable obsession. Pour les jeunes, l’idée d’obtenir un emploi apparait comme un parcours d’obstacles, où un grand  nombre  trébuche,  tandis que ceux qui ont franchi la  barrière n’ont qu’une crainte, celle de perdre ce qu’ils ont eu de la peine  à gagner. Car la situation n’a cessé d’empirer depuis un demi-sècle. En 1967, alors que le chômage concernait  moins  d’un pour cent de  la  population  active, le premier Ministre Georges Pompidou affirmait que si la France atteignait le chiffre de 500 000 sans emplois, ce serait la révolution.  C’est alors qu’à titre de précaution, son gouvernement créait l’Agence nationale pour l’emploi, ancêtre de Pôle emploi, qui n’a cessé de prospérer  depuis lors. C’est aussi la période, où la  crainte de troubles  sociaux qui pourraient résulter de  la dégradation de la situation, a conduit à bâtir un  système d’indemnisation  du chômage particulièrement généreux puisque les licenciés  économiques bénéficiaient d’une indemnisation  correspondant à 90% de  leur dernier  salaire, de manière à  assurer le  maintien de leur pouvoir d’achat. Une générosité fondée au départ sur la crainte que le chômage faisait régner dans les milieux politiques, mais  qui a contribué à provoquer un effet anesthésiant, qui installait peu à peu les  chômeurs  dans une sorte d’état de droit, rendant plus difficile psychologiquement  la recherche  d’un emploi.

La gauche n’a pas agi différemment de la droite sur ce plan.  En arrivant  au pouvoir en 1981, François Mitterrand s’engageait à maintenir le chômage en  dessous de deux  millions. Mais très vite, il comprenait que c’était un objectif intenable et se contentait de  multiplier les mesures de cache misère, comme les allègements de charge, les emplois jeunes, etc., avec le sentiment que tout avait été essayé sans succès et qu’il valait mieux passer à autre chose. François Hollande,  grand admirateur de Mitterrand, a voulu reprendre le flambeau avec le résultat que l’on sait.

Tout  ceci explique aujourd’hui  la prudence des candidats à la présidentielle qui ont pratiquement  écarté la question du chômage de leurs objectifs. François Fillion s’est montré le plus audacieux en estimant que l’on pourrait revenir un jour au plein emploi et ramener  le chômage à 7% de la population  active en  2022. Mais, ses compétiteurs  gardent  dans ce domaine  un silence  assourdissant.  Comme si  personne  n’osait  vouloir  prendre  le dossier à  bras le  corps, en préférant  recourir à la facilité d’indemniser le chômage plutôt qu’engager une lutte frontale à laquelle  notre pays  renonce depuis un demi-siècle, et qui ronge peu à peu son économie.

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