Pourquoi nous ne sauverons jamais Gandrange sans oser affronter la Chine sur le libre-échange !<!-- --> | Atlantico.fr
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L’acharnement de l’Europe à continuer de considérer sa technologie comme la première du monde (il faut innover, etc) pourrait être touchant, si les dettes ne s’accumulaient pas indéfiniment, tandis que les réserves chinoises gonflent dans les proportions
L’acharnement de l’Europe à continuer de considérer sa technologie comme la première du monde (il faut innover, etc) pourrait être touchant, si les dettes ne s’accumulaient pas indéfiniment, tandis que les réserves chinoises gonflent dans les proportions
©Reuters

Déjà vu

Gandrange représente toute l'impuissance politique européenne : les candidats se relaient, proposant toutes sortes de solutions pour sauver l'usine. Pourtant, derrière, c'est une impasse franco-européenne qui se dessine. Nos pays échouent systématiquement à renégocier avec la Chine des bases d'échanges complètement dérégulés.

Gérard Lignac

Gérard Lignac

Sciences Po, Droit, MBA Harvard, Gérard Lignac a d'abord fait carrière dans l'industrie, puis dans la presse comme Président de l'Est Républicain et Président du groupe EBRA.

Il est également actionnaire d'Atlantico.

Il a écrit La mondialisation pour une juste concurrence (Unicom, 2009).

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Ce qui se passe à Gandrange est symptomatique de l’impasse dans laquelle se trouve l’industrie française. D’un côté, on veut maintenir voire développer l’emploi. Et de l’autre, on veut continuer à jouer intégralement la libéralisation des frontières complètement ouvertes.

C’est pourtant une situation qui devient de plus en plus intenable face au potentiel industriel sans cesse croissant des pays émergents. De ce potentiel, la Chine en représente aujourd’hui

90 %. La masse de sa population, la capacité d’adaptation de cette dernière, reposant sur une des plus anciennes civilisations de la terre et un régime politique stable, en constituent la base exceptionnelle. Si on y ajoute que, à la suite de circonstances historiques particulières, la main d’œuvre n’y coûte qu’entre le 10e et le 20e de la nôtre, il ne faut pas être grand clerc pour anticiper la progression quasi algorithmique qui s’en suit : comment en 8 ans, de 2002 à 2010, la Chine va passer de 4 % du PIB mondial à 20 %, comment la production du textile, de la chaussure,  de l’électronique grand public, a disparu en Europe, comment le poly silicone suit le même chemin, et bientôt l’automobile en attendant l’aéronautique puis le nucléaire.

L’acharnement de l’Europe à continuer de considérer sa technologie comme la première du monde (il faut innover, etc) pourrait être touchant, si les dettes ne s’accumulaient pas indéfiniment, tandis que les réserves chinoises gonflent dans les proportions que l’on sait.

Mais Gandrange est là. Non pas, hélas, que cela soit un cas exceptionnel, mais les visites spectaculaires de nos responsables politiques l’ont montée en épingle. Les remèdes proposés sont emblématiques. L’un envisage une loi, un autre verrait bien un rachat par l’Etat, alors que le problème vient de la saturation du marché par la concurrence asiatique dont nous venons de parler.

Le seul remède valable devient dès lors évident. C’est vrai pour Gandrange, il sera bientôt vrai pour l’automobile. Il s’agit d’instaurer des droits de douane afin de restaurer – aussi longtemps que nécessaire – une concurrence équilibrée entre pays à hauts salaires et pays à salaires bas.

Mais, dira-t-on, nos amis Chinois n’apprécieront pas. Moralement cependant, sur le plan de la réciprocité, ils n’ont rien à opposer, eux qui en plus de leurs avantages initiaux de coûts de main d’œuvre, pratiquent un taux de change du Yen considérablement minoré (20 % ou davantage ?) et en plus frappent de droits de douane les importations dans leur pays (25 % pour l’automobile).

Alors un bras de fer ?

La France qui importe de Chine librement pour 35 milliards d’€ par an et un déficit de 25 milliards, aurait largement de quoi y répondre : tout se négocie entre gens raisonnables !

Bien sûr, c’est un problème à régler à l’échelle européenne, et pas seulement française. Ce qui pose la question de l’Allemagne, certes largement exportatrice, et très largement excédentaire. Si cela est indiscutable, il n’en est pas moins indiscutable aussi que ses excédents proviennent en totalité de ses voisins occidentaux. Elle se retrouve et se retrouvera encore plus clairement à l’avenir vis-à-vis de la Chine, devant les mêmes problèmes d’insurmontables différentiels de coûts de main d’œuvre que ses voisins européens.

Même si convaincre l’Allemagne pourra s’avérer difficile, les arguments ici non plus ne manquent pas. Ils reposent sur des faits présents ou à venir.

Voilà donc un chantier des plus urgents qui s’ouvre à nos autorités nationales et européennes.

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