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Les Arvernes : "Le programme économique d'Emmanuel Macron manque totalement d'ambition, il relève de la résignation"
©Capture d'écran France 2

présidentielle 2017

Selon les sondages, la messe est donc dite. Emmanuel Macron sera notre prochain Président de la République. Cette prédiction aurait fait sourire il y a encore quelques mois. Elle ne fait plus du tout rire aujourd’hui. Il n’est plus temps de s’interroger sur l’incroyable concours de circonstances qui a permis un tel retournement. Il faut plutôt regarder en face toutes les conséquences attendues de cette élection probable pour l’avenir du pays.

Les Arvernes

Les Arvernes

Les Arvernes sont un groupe de hauts fonctionnaires, de professeurs, d’essayistes et d’entrepreneurs. Ils ont vocation à intervenir régulièrement, désormais, dans le débat public.

Composé de personnalités préférant rester anonymes, ce groupe se veut l'équivalent de droite aux Gracques qui s'étaient lancés lors de la campagne présidentielle de 2007 en signant un appel à une alliance PS-UDF. Les Arvernes, eux, souhaitent agir contre le déni de réalité dans lequel s'enferment trop souvent les élites françaises.

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L’élection de 2017 est l’élection de la dernière chance. François Hollande termine son mandat avec un bilan économique désolant : un chômage de masse toujours proche des 10%, un déficit public en 2016 maintenu au-dessus de la barre des 3% (3,4%), une dette publique à 96% du PIB, une dépense publique toujours très élevée (56,2% du PIB) et des prélèvements obligatoires maintenus à un niveau record sur toute la durée du mandat (44,3% du PIB). Pourtant, le président sortant aura bénéficié d’un alignement des planètes exceptionnel (euro faible, pétrole faible, reprise de la croissance internationale) qui ne durera plus longtemps. A un moment ou à un autre, le prochain chef de l’Etat aura à affronter un choc économique externe -retournement du cycle américain- ou interne - remontée des taux en Europe - qui feront peser de nouveaux risques financiers majeurs. L’élection de 2017 est donc notre dernière chance de mettre en œuvre les réformes si souvent reportées pour retrouver de la compétitivité, muscler notre appareil productif et réformer l’Etat pour traverser le prochain retournement de cycle sans drame.

Malheureusement, ces réformes indispensables ne seront pas mises en œuvre si Monsieur Macron est élu. Car qu’est-il donc sinon la parfaite continuation de la présidence Hollande ?

Sur la compétitivité, il n’y a rien à attendre. Certes, Emmanuel Macron est l’inspirateur du virage « social libéral » de François Hollande. Il soutient donc la poursuite d’une politique de l’offre, financée par une progression limitée de la dépense publique, mais l’ordre de grandeur annoncé pour le prochain quinquennat n’est pas à la hauteur des enjeux. Il prévoit simplement de pérenniser le CICE sous la forme de baisses de charges permanentes (20 milliards d’euros) là ou un nouvel effort, au-delà des baisses de charges déjà consenties, est indispensable pour espérer rétablir la compétitivité de notre industrie face à nos concurrents européens et notamment allemands. Une continuation pure et simple de la politique Hollande, là où une nouvelle impulsion forte, comme celle proposée par François Fillon, est nécessaire. Pérenniser le CICE dont on connait tous les défauts (absence de ciblage vers le secteur manufacturier), c’est faire le choix du conservatisme sans imagination. 

Sur la réduction de la dépense publique et des charges, le compte n’y est pas non plus. En affichant un objectif de 60 milliards d’euros, Emmanuel Macron s’inscrit dans la continuité de François Hollande qui affichait déjà en 2014 un objectif de 50 milliards qui ne sera même pas atteint. Car pour réussir, la maîtrise de la dépense (il ne s’agit bien évidemment pas de coupes en valeur nominale mais par rapport à une tendance…) doit être soutenue par une vision d’ensemble et des signaux forts. Les objectifs fixés par Emmanuel Macron sont compatibles avec une politique de coupes budgétaires ponctuelles au fil de l’eau. Ils ne gêneront personne. Une réduction des postes de fonctionnaires limitée à 120 000 sur 5 ans, facilement réalisable grâce aux départs en retraite, sera une bien faible réponse à la hausse de plus d’un million des effectifs des collectivités territoriales depuis l’an 2000.

Sur l’Europe, enfin, l’échec de Macron est couru d’avance. En s’appuyant sur un programme de réforme si faible, il espère convaincre l’Allemagne de consentir à une construction institutionnelle nouvelle (encore une) et à une forme d’union de transferts. Nos partenaires Allemands sont à bout de patience. Ils attendent de la France autre chose que la continuation des politiques de renoncement. Elire Macron, c’est à terme prendre le risque d’une rupture finale du couple franco-allemand.

Macron sera donc un Hollande en plus jeune, tout aussi timoré, sans ambition et sans force. Il n’aura pas de majorité à sa main et devra donc rechercher en permanence la conciliation avec le rassemblement des intérêts particuliers qui accourent depuis des semaines dans son mouvement « En Marche ! ». On connait le résultat de la « petite cuisine » macronienne, sa loi de 2014 en donne en aperçu saisissant : des heures de débats au parlement, un passage en force à coup de « 49-3 » en l’absence de majorité, pour accoucher d’une souris. 

Car ne nous voilons pas la face : l’action réformatrice vigoureuse et salvatrice qui seule peut sauver ce qui peut l’être de notre tissu économique ne peut être conduite que par un gouvernement fort et uni sur l’essentiel. Une présidence Macron sera dès le début prise en étau entre une gauche antilibérale et une droite frustrée par sa défaite présidentielle et par le manque d’ambition du président. 

Une victoire d’Emmanuel Macron le 7 mai prochain serait consternante pour la France. Consternante par le manque absolu d’ambition de son programme, par la recherche permanente du consensus mou là où la France doit avoir le courage de faire des choix décisifs. N’étant élu sur rien, sinon des messages stéréotypés concoctés par des logiciels, il ne pourra rien.

La victoire d’Emmanuel Macron sera donc une résignation. La coalition de tous les conservatismes pour perpétuer cinq ans encore des choix économiques et sociaux d’un autre temps. Ses électeurs voudront éviter les efforts et éviter le FN. La meilleure manière sans doute de provoquer un ajustement très douloureux le jour où les vents contraires se lèveront. Ce jour-là, il sera trop tard pour déplorer l’arrivée d’extrémistes au pouvoir. 

Non, l’élection d’Emmanuel Macron n’annoncerait rien de bon. Il est encore temps pour que les Français s’en rendent compte. 

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