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Permis de conduire : fin de la love story avec les jeunes Français
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Ringard

Depuis 2008, le nombre de personnes possédant un permis de conduire aux Etats-Unis a connu une certaine tendance à la baisse. Le mouvement à la baisse pourrait bien se propager en France.

Jean-Pierre Corniou

Jean-Pierre Corniou

Jean-Pierre Corniou est directeur général adjoint du cabinet de conseil Sia Partners. Il est l'auteur de "Liberté, égalité, mobilié" aux éditions Marie B et "1,2 milliards d’automobiles, 7 milliards de terriens, la cohabitation est-elle possible ?" (2012).

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Atlantico : Le pourcentage de personnes possédant un permis de conduire aux Etats-Unis est passé de 87% en 2008 à 84% en 2015. Est-ce que l'on peut remarquer une baisse similaire en France ? Quelles sont les raisons qui peuvent expliquer ce reflux des détentions du permis de conduire ?

Jean-Pierre CorniouLes statistiques françaises ne montrent pas de baisse d’intérêt pour le permis de conduire qui est le premier examen de France. Les candidats sont toujours très nombreux. En 2009, 1,126 million de candidats avaient été enregistrés pour toutes les catégories de permis de conduire. Ils étaient 1,245 million en 2015. Si la décroissance du nombre de candidats au permis moto a été forte -148000 en 2009 contre 69000 en 2015 - les candidats pour le permis auto ont largement augmenté - 1026000 en 2015 contre 917000 -. 847000 permis auto B et B1, qui représentent 83% des permis mis en circulation, ont été délivrés en 2015. Ils n’étaient que 750000 en 2009. Les femmes représentaient 40 % des permis délivrés en 2009, et 42,6% en 2015. Il faut souligner que le nombre de permis délivrés après avoir été à peu près constant en France depuis le début des années soixante-dix autour de 950000 permis en dehors d’une pointe en 1979 à 1,3 million tend à se stabiliser depuis 2000 autour de 850000 avec des variations annuelles qui ne traduisent pas de tendances longues.

Obtenir son permis de conduire est un opération compliquée et coûteuse qui concerne essentiellement les jeunes. 80 % des clients d’auto-école ont en 16 et 25 ans.  

Et il est possible de le perdre même si le chiffre annuel est faible. En Suisse voisine le nombre de retraits de permis de conduire s’est élevé en 2016 à 78000. En France, ce chiffre est de même ordre, environ 80000 retraits, pour une population huit fois plus importante. On estime même à 500000 personnes le nombre de conducteurs qui circulent sans permis.

Quelles sont les conséquences d'une baisse du nombre de détenteurs du permis de conduire, pour l'industrie automobile ? Faut-il y voir une désaffection de la voiture chez les jeunes qui serait à même de menacer les constructeurs sur le plus long terme ? 

La culture automobile reste un élément déterminant du paysage social. 83% des Français ont le permis de conduire et 83% disposent d’un véhicule. Le parc automobile est de 31,8 millions de véhicules particuliers, sur un parc total de 38 millions de véhicules. Mais c’est aussi devenu un élément de clivage entre la France urbaine qui a les moyens de délaisser l’automobile, tout au moins au quotidien, en utilisant des réseaux de transports publics payés largement par la communauté, et la France des périphéries et des campagnes qui ne peut se passer de l’automobile individuelle et en supporte directement les coûts d’usage. Le taux de motorisation dans les centre villes est de 71% en 2015, et tombe même à 59 % en Ile-de-France, mais atteint 92,5 % en zone périurbaine et 94,4 % en zone rurale. Les jeunes ne sont pas globalement hostiles à l’automobile. Ils le sont quand ils ont la liberté de faire ce choix. Toutefois la possession d’un véhicule est aussi liée à l’âge. 74% des ménages de moins de 25 ans ont une voiture quand ce chiffre culmine à 85% pour les 55-64 ans. Dans les zones non convenablement desservies par les transports publics, ils se sont appropriés le covoiturage. Le succès de BlaBlaCar auprès des jeunes démontre que ce système répond parfaitement aux impératifs de la mobilité, flexible et à bas coût. 

Est-il possible de dresser un tableau de l'utilisation de la voiture personnelle ? Quelles en ont été les évolutions récentes ?

Les données sur l’usage de la voiture par les Français apportent une lecture très riche de la situation économique, sociale et politique. La métropolisation de la société française induit une régression de la place de l’automobile auprès des citadins, qui trouvent emplois et loisirs dans un environnement immédiat largement irrigué par les transports publics. 48 de 50 agglomérations françaises disposent aujourd’hui d'un tramway, un système de transport moderne qui connait un grand succès avec un taux de croissance de la fréquentation de 3% par an. En 2015, le transport intérieur de voyageurs a connu une croissance de +2,1 %, soit une accélération par rapport  à la moyenne annuelle observée depuis 2010 (+0,8 %). Cette forte hausse de la mobilité est surtout liée à l’augmentation de la circulation des véhicules particuliers, qui s’est accélérée par rapport aux dernières années (+2,4 % au lieu de +0,8 % entre 2008 et 2015). Ces données sont issues du rapport annuel 2016 dU CCFA (Comité des Constructeurs Français d’Automobile).

Car en dehors des noyaux urbains, la voiture redevient indispensable même si elle coûteuse. Les Français ont acheté en 2016 2 millions de voitures neuves, mais surtout de 5,5 voitures d’occasion. Le vieillissement du parc et l’augmentation depuis 2000 de la part des voitures d’occasion traduisent un changement de comportement dans l’allocation des ressources des consommateurs, sollicités par d’autres types de consommation, comme les télécommunications, et valorisant moins le caractère statutaire de la possession d’un véhicule. 58 % des véhicules utilisés par les ménages ont été achetés d’occasion. Les ménages conservent leur voiture près de six ans et un quart des véhicules échangés ont plus de 100000 km. 19% du parc automobile a désormais plus de quinze ans. Ceci ne favorise pas l’évolution vers des véhicules moins consommateurs d’énergie et moins polluants.

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