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Faut-il croire les Farc quand ils annoncent -une fois de plus- renoncer aux enlèvements de civils ?
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Farc Attacks

Après plus de 40 années de guerre civile, les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) ont même promis de relâcher unilatéralement les dix otages issus de l’armée et de la police qu’elles détiennent...

Eduardo Mackenzie

Eduardo Mackenzie

Eduardo Mackenzie est journaliste et écrivain. Il est notamment l’auteur de Les Farc ou l’échec d’un communisme de combat (Publibook, Paris, 2005).

 

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Ni « déclaration historique », ni « tournant majeur » dans la vie des Farc : l’annonce faite par les chefs de la guérilla la plus ancienne au monde, quant à leur intention de « mettre fin aux enlèvements de civils » n’a pas dupé les Colombiens. Tous les sondages montrent ces jours-ci que la population ne croit guère aux paroles de ces terroristes, dont l’une des principales sources de financement est, précisément, l’enlèvement des êtres humains.

Même le président colombien Juan Manuel Santos a répondu que cette annonce n’était « pas suffisante». Le chef de l’État exige que les Farc mettent fin à leurs attaques et libèrent l'ensemble des otages. Selon l’ancien kidnappé Gustavo Muñoz Roa, les Farc détiennent encore 725 civils kidnappés, en plus de onze militaires et policiers.

Ce n’est pas la première fois que les Farc font une telle promesse. En mars 1984, elles avaient signé les « Accords de l’Uribe » avec le gouvernement du président Belisario Betancur. Elles y exhortaient leurs blocs, fronts et colonnes à ne plus commettre ce crime détestable. L'article 2 de ces accords disait, en effet: «Les Farc-Ep n’encouragent plus l'enlèvement, l'extorsion et le terrorisme sous toutes ses formes et veulent cesser  ces pratiques, comme toutes les autres attaques contre la liberté et la dignité humaine». 

Les Farc n'ont jamais respecté ce « compromis » et ont continué à enlever et à tuer des civils, des militaires et des policiers. Elles ont fait croire la même chose au président Virgilio Barco. Les Farc lui ont promis de procéder à une « trêve unilatérale » pour prouver leur bonne volonté et leur intention de négocier avec lui afin de trouver une « solution politique au conflit ». La réalité fut toute autre. En décembre 1988, les autorités de la Jamaïque découvraient une cargaison d'armes, avec des explosifs et avec plus de 1250 fusils et mitrailleuses allemandes, que les Farc avaient achetées au Portugal et qu'elles voulaient faire entrer clandestinement en Colombie pour renforcer leurs fronts.

Les opérations de séduction des Farc ont toujours le même but : confondre, isoler et démobiliser leur ennemi. Les «Accords de l’Uribe» appartiennent à une époque où les Farc étaient en train de recruter de nouveaux combattants et de construire leur propre parti politique pour s’adonner au prosélytisme sans encombre. Parallèlement, elles s’activaient dans la conformation d’une « coordination des guérillas » pour imposer aux bandes armées d’extrême-gauche leurs plans et leurs objectifs.

Les serments des Farc de vouloir se priver d’une ou de deux « formes de lutte », comme elles appellent la panoplie de crimes qu’elles utilisent contre le peuple et  l’État colombien, ne sont que des dispositifs de combat et de désinformation destinés à jouer un rôle précis dans un plan tactique et dans un cadre stratégique - ainsi que dans un contexte national et international.

Cette fois-ci, par exemple, les Farc visent un objectif majeur : paralyser l’action des forces militaires dans tout le pays ou dans une partie du territoire de la Colombie sous prétexte d’une nouvelle négociation de paix. Cette tactique avait déjà été utilisée par les Farc avec grand succès pendant le gouvernement de Andrés Pastrana (1998-2002), qui a cédé aux Farc 41 000 Km² pendant trois années en échange de rien. De cette concession hallucinante et irresponsable les Farc sont sorties plus fortes que jamais.

Mais pendant les huit années qui suivirent, celles du gouvernement du président Alvaro Uribe (2002-2010), les Farc ont subi de sérieux coups durs : leurs effectifs ont été réduits de moitié, leurs otages les plus importants ont été libérés par les forces armées, en juillet 2008, et les chefs « historiques » des Farc ont été abattus, incluant Alfonso Cano, en 2011.

Chaque semaine - ou presque - les Farc subissent les assauts des militaires, et elles voudraient obtenir de Juan Manuel Santos une « trêve bilatérale » et relancer un processus semblable à celui du Caguan (1999-2002).

Le scénario idéal pour faire pression sur le président colombien est le Vième Sommet des Amériques du 14 et 15 avril prochains à Carthagène où les gouvernements pro Chavez du continent vont vanter les mérites d’une telle stratégie « de paix ».

Santos s’est éloigné de son prédécesseur, Alvaro Uribe, et a abandonné la doctrine de la sécurité démocratique. Il s’est entouré des fractions politiques qui avaient perdu l’élection présidentielle de 2010. Ces fractions sont enclines à revenir à la méthode « douce » des pourparlers avec les terroristes.

Sous Santos, la guerre que mène l’extrême-gauche consistant à monter des procès truqués contre les militaires s’est accentuée. La justice pénale militaire a été abolie de fait. Tout cela contribue à miner le moral de l’Armée. Il y a quelques jours, le ministre colombien de la Défense, a osé discuter avec l’ONG Human Right Watch, à Washington, un point capital de la lutte contre les narcoterroristes sur le droit – ou non- de l’aviation de combat de les attaquer. Le ministre n’a pas cédé aux pressions mais le fait d’avoir accepté de discuter un tel point a donné froid dans le dos auprès de beaucoup d’observateurs. Du jamais vu. Cela a révélé à quel point le gouvernement de Santos est prêt à prêter l’oreille aux ONG dites de « droits de l’Homme » ainsi qu’aux groupuscules qui sont vus en Colombie comme la périphérie « politique » des Farc.

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